19 février 2009

Prévenus d’avoir participé à un trafic de stupéfiants en 2007 et début 2008 sur la région morlaisienne, quinze prévenus comparaissent depuis hier sous bonne garde au tribunal de Morlaix.

Pour cette première journée, seuls douze des quinze prévenus sont présents. La plupart sont issues de la région parisienne. Cinq sont en détention provisoire depuis leur arrestation, en février2008. Les autres, sous contrôle judiciaire, comparaissent libres. Ce nouveau procès de la drogue sur Morlaix est placé sous haute surveillance. L’enceinte du tribunal est, en effet, protégée par les hommes du GIPN (Groupement d’intervention de la police nationale) et des gardes mobiles.

Règlement de comptes

Ce dossier fleuve avait débuté par deux affaires de violences s’étant déroulées à Morlaix en août et octobre2007. La première rixe avait eu lieu dans le quartier populaire de la Vierge Noire. Elle ressemblait fort à un règlement de comptes. L’un des prévenus avait été passé à tabac. Un fusil avait été brandi. Ces violences répétées avaient éveillé les soupçons des enquêteurs de la police de Morlaix et de la police judiciaire de Brest. Leur enquête conjointe avait permis de mettre à jour un trafic de stupéfiants sur Morlaix et sa région. Le procès qui s’est ouvert hier s’est révélé d’une confusion extrême, avec une multiplication de versions contradictoires. Appelés, un par un, à s’expliquer devant les juges, les prévenus sont tous revenus sur les déclarations faites lors des gardes à vue puis devant le juge instructeur. Ces revirements ont fini par irriter la présidente du tribunal. «C’est curieux de constater que les policiers de Morlaix ont tous été victimes de maladies d’oreilles», a-t-elle ironisé.

«Vous vouliez être le boss»

L’un des principaux protagonistes, un homme originaire de la région parisienne installé à Morlaix depuis plus de deux ans, est soupçonné d’avoir voulu mettre la main sur le marché des stupéfiants à Morlaix. En n’hésitant pas à employer la manière forte. C’est cette lutte pour le pouvoir-«Vous vouliez être le boss»-qui l’aurait entraîné à tendre un guet-apens à l’un des autres prévenus et à le frapper. Le tribunal s’est longuement attardé sur le cas de sa «victime». En s’interrogeant, notamment, sur le décalage existant entre ses revenus officiels et son train de vie. L’intéressé, qui aurait pu bénéficier du RMI, ne l’avait pas demandé. Ce qui ne l’avait pas empêché de faire l’acquisition d’une Mercedes, puis d’une BMW et de deux motos. «Je suis quelqu’un de débrouillard, c’est tout», a avancé le prévenu, en admettant au passage «avoir vendu un peu de drogue, peut-être deux kilosde résine de cannabis». Au total, des centaines de grammes de cocaïne et des dizaines de kilos de cannabis auraient été écoulées sur le marché morlaisien en 2007 et début 2008.

«Leur paye pour un bout de shit»

Les approvisionnements étaient effectués dans la région parisienne. La plupart des prévenus ont reconnu être des consommateurs réguliers de cannabis et de cocaïne. Tous ont tenté de minimiser les quantités achetées et revendues. Certains ont mis en avant un marché local porteur pour les dealers de drogue. «À Morlaix, les gens sont prêts à donner leur paye pour avoir un bout de shit», a expliqué un prévenu. Le procès se poursuit aujourd’hui, avec les réquisitions du parquet et les plaidoiries des avocats.

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Notes – Jean-Paul Jean – 13 février 2009 La réforme de la procédure pénale s’est engagée dans la précipitation, après l’annonce de la suppression du juge d’instruction par le Président de la République le 7 janvier dernier.
Selon Jean-Paul Jean, magistrat, professeur associé à l’Université de Poitiers et membre du groupe de travail “Justice et Pouvoirs” de Terra Nova, plutôt qu’une rupture illusoire, c’est une réforme pragmatique qu’il faut engager, dans le respect des libertés, de l’égalité et de l’efficacité de la procédure pénale.

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L’annonce mercredi 7 janvier par le Président de La République de la suppression du juge d’instruction est pour le moins inhabituelle : le comité de réflexion sur la rénovation des codes pénal et de procédure pénale, présidé par le magistrat Philippe Léger, n’a pas encore rendu son rapport, et la déclaration du chef de l’Etat a déjà provoqué la démission de deux de ses membres. Alors que s’est ouverte la procédure disciplinaire initiée contre le juge Burgaud, jugé pour le fiasco de l’affaire d’Outreau, le climat actuel ne prête pas à la sérénité. Or, les enjeux majeurs de la réforme de la procédure judicaire n’autorisent pas la précipitation. Il convient de prendre la distance nécessaire à la réflexion.

Les changements opérés depuis une décennie ont profondément modifié la procédure pénale. Les juges d’instruction, de moins en moins saisis, ont vu leurs prérogatives se réduire en faveur de celles du parquet et de la police. La procéduralisation croissante de l’instruction a conduit à la réduction du temps judiciaire consacré au traitement de fond et à la recherche de la vérité. Quant au transfert du pouvoir de placer en détention provisoire au Juge des Libertés et de la détention, il n’a pas suffit à limiter l’usage excessif de cette pratique.

Ce bilan appelle une réforme pragmatique du système pénal, guidée par le respect de l’égalité, des libertés, et de l’efficacité de la procédure pénale. Plutôt qu’une rupture illusoire, il conviendrait d’assurer une continuité réformiste, en limitant le rôle du juge d’instruction aux seules affaires qui nécessitent son intervention, et en poursuivant la modernisation du schéma global d’organisation de la justice pénale, pour concilier l’efficacité dans la lutte contre la criminalité et la protection des libertés.

Le juge d’instruction est trop souvent perçu à travers son mythe . Bien d’autres réalités se cachent derrière l’image du « petit juge » solitaire, chevalier blanc s’attaquant aux puissants, qui a marqué la période des affaires politico-financières des années quatre-vingt-dix. C’est à partir de ces réalités qu’il faut réfléchir sereinement à la fonction de juge d’instruction au regard des principes qui gouvernent l’enquête pénale.

La finalité de l’instruction préparatoire est de permettre le jugement d’une affaire pénale dans les meilleures conditions possibles : un délai raisonnable, les éléments de droit et de fait rassemblés contradictoirement pour un débat à l’audience publique permettant de statuer sur la culpabilité et, dans le cas où celle-ci est établie, sur la peine. L’intervention du juge d’instruction est obligatoire en matière de crime et nécessaire pour les délits concernant des affaires complexes ou dans lesquelles lui seul peut réaliser certaines investigations.

Les choix effectués depuis une décennie, sous deux majorités politiques différentes, ont profondément modifié la procédure pénale et recomposé la place des différents acteurs du système judiciaire . On peut résumer ainsi ces évolutions : les 616 juges d’instruction français sont de moins en moins saisis, et leurs prérogatives ont fortement diminué, tandis que celles du parquet et de la police se sont élargies, le tout sous un contrôle de plus en plus formel et ponctuel des juges du siège.

–  Des juges de moins en moins saisis : 30.800 affaires nouvelles en 2006 contre 43.600 en 1997, 7,4 % des crimes et délits poursuivis en 1996, 4,3 % en 2006.

–  Des instructions préparatoires de plus en plus lentes : avant d’aboutir à un jugement, 35 mois pour une affaire de moeurs ou financière.

–  Des juges de plus en plus concurrencés par le parquet : tant qu’une mesure de contrainte n’est pas nécessaire, les bureaux des enquêtes des grands parquets traitent les affaires en enquête préliminaire en demandant au juge des libertés et de la détention (JLD) les autorisations d’actes portant atteinte aux libertés (écoutes, perquisitions…). Ainsi, suite à une dénonciation de TRACFIN, l’affaire mettant en cause Julien Dray sans qu’il puisse avoir accès à la procédure aurait à l’évidence fait l’objet, il y a encore peu, d’une ouverture d’information. Les juges d’instruction parisiens spécialisés en matière économique et financière dénoncent la diminution de leurs saisines dans les affaires sensibles et une maîtrise totale du parquet sur la gestion de ces contentieux. En 2006, les 14 juges du pôle financier ont reçu 200 affaires nouvelles, 165 en 2007, et… 90 en 2008.

Si les juges d’instruction sont de moins en moins saisis par les parquets, leurs cabinets sont encore  encombrés de plaintes avec constitution de partie civile dont beaucoup n’ont d’autre but que de retarder une procédure civile ou commerciale ou de faire procéder à des investigations financées sur frais de justice. Ainsi, à Paris, en matière économique et financière, 60% des dossiers de cabinets d’instruction étaient ouverts à l’initiative des parties civiles, dont 80% se terminaient par un non-lieu. La loi du 5 mars 2007, en obligeant préalablement à saisir le parquet pour enquête et éventuelles poursuites, avant toute ouverture d’information , a utilement fait diminuer le nombre de ces procédures.

Les cabinets d’instruction sont également surchargés du fait d’une procéduralisation croissante qui conduit à multiplier les actes formels sans aucun intérêt pour ce qui constitue la mission première du juge, la recherche de la vérité. Les réformes législatives successives ont multiplié les possibilités d’intervention et de recours des parties, parquet, mis en examen, parties civiles. D’où une augmentation des saisines de la chambre de l’instruction en incidents, demandes d’actes et de nullité de procédure qui s’ajoutent aux contentieux relatifs à la détention provisoire et au contrôle judiciaire.

Le résultat de ce formalisme inadapté imposé par le législateur est une part de plus en plus réduite du temps judiciaire consacré au traitement des questions de fond. A la durée excessive des procédures d’instruction elles-mêmes, vient s’ajouter celle du délai d’audiencement pour que l’affaire soit jugée au fond, du fait de l’encombrement des tribunaux correctionnels et des cours d’assises. La France est régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi l’arrêt Crétello du 23 janvier 2007 constatant 5 ans de détention provisoire dont 17 mois entre la fin de l’instruction et l’ouverture du procès.

La loi Guigou du 15 juin 2000 a retiré au juge d’instruction son pouvoir le plus important, celui de placer en détention provisoire, transféré au JLD qui statue ponctuellement sur les demandes transmises par le juge d’instruction, voire par le parquet en cas de refus de saisine par le juge d’instruction, cette dernière possibilité étant issue de la loi Perben II du 9 mars 2004. Le juge d’instruction conserve la possibilité de placer le mis en examen sous contrôle judiciaire (cautionnement, interdiction professionnelle…), ainsi que, disposition favorable aux libertés, de remettre une personne en liberté à tout moment.

Toutefois le recours trop important à la détention provisoire et sa durée excessive, comme dans l’affaire d’Outreau, constituent toujours des vices majeurs de notre système. Malgré les textes, les pressions et les habitudes sont fortes. Le caractère exceptionnel de la détention provisoire, affirmé par l’article 137 du code de procédure pénale, n’est plus qu’un vœu pieux quand 3 personnes sur 4 entrent en prison à ce titre.

1 – QUESTIONS-CLES POUR DES AXES DE REFORME

Si l’on estime nécessaire une nouvelle réforme de notre système pénal pour les affaires complexes, celles qui aujourd’hui sont instruites par un juge ou devraient l’être, une approche ponctuelle n’est plus permise.

Peut-on penser l’instruction préparatoire et le magistrat qui en aura la charge en évitant le réflexe corporatiste (on attaque le juge d’instruction parce qu’il s’attaque aux puissants !), l’immobilisme (pourquoi changer alors que l’on envie notre système à l’étranger ?) et l’anglophobie primaire (il faut refuser le système accusatoire car le droit anglo-saxon nous envahit !) que l’on trouve très souvent exprimés de façon explicite ou implicite ?

Une autre approche est possible, fondée sur un pragmatisme conciliant le respect des principes du procès équitable et l’efficacité dans la lutte contre la criminalité. On peut réfléchir à l’amélioration de la phase préparatoire au jugement en partant de quatre questions clés. Avec un juge d’instruction plutôt que sans, la procédure pénale est-elle plus efficace ? Les libertés sont-elles mieux garanties ? L’égalité des armes entre accusation et défense, et l’égalité des citoyens devant la loi sont-elles mieux assurées ? Les ingérences politiques dans l’établissement de la vérité judiciaire sont-elles limitées ?

1.1 – LE TRAITEMENT DES DOSSIERS COMPLEXES EST-IL PLUS EFFICACE AVEC UN JUGE D’INSTRUCTION QUE SANS ?

Si l’on étudie les délais d’instruction, la réponse est non. Lorsque l’on analyse la valeur ajoutée du travail du juge d’instruction, la réponse est variable. Dans trop de dossiers, le juge d’instruction se contente de reprendre ou de compléter à la marge les investigations policières, voire de leur donner un cadre juridique pendant le temps de la détention provisoire. Pour une grande partie de ces dossiers qui passent actuellement par l’instruction, même pour des affaires  criminelles susceptibles d’aboutir en cour d’assises, il suffirait de saisir un juge de l’instruction qui autoriserait les principaux actes portant atteinte aux libertés, ordonnerait des compléments d’enquête et des expertises, statuerait en premier ressort sur les détentions provisoires et les mesures de contrôle judiciaire et s’assurerait par un débat public et contradictoire entre le parquet, les parties civiles et les mis en cause, que l’affaire est en état d’être jugée. L’essentiel est que le juge du fond soit saisi rapidement pour une audience publique qui devra nécessairement prendre plus de temps qu’aujourd’hui, puisqu’il faudra entendre les principaux témoins, procéder aux confrontations. L’oralité des débats, comme en cour d’assises, redeviendra la règle effective. Compte tenu des temps d’audience nécessaires, cela implique un redéploiement des moyens et des modes d’organisation modernes, que le système judiciaire peut intégrer si la pédagogie, les moyens humains et budgétaires précèdent et accompagnent la réforme. Egalement si, par ailleurs, pour dégager du temps d’audience, on traite selon le mode de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, en débat public, des affaires graves mais dans lesquelles les faits sont reconnus.

1.2 – AVEC UN JUGE D’INSTRUCTION, LES LIBERTES SONT-ELLES MIEUX GARANTIES ?

Non, du fait de « la justice de cabinet » à laquelle on doit toujours préférer le débat public qui empêche les pressions expresses ou diffuses. Mais l’atteinte première aux libertés par la détention provisoire n’est plus le fait du juge d’instruction. Et malheureusement l’on doit constater que l’instauration du JLD, ce juge sans statut saisi ponctuellement, s’il a complexifié la procédure, n’a en rien fait diminuer la détention provisoire.

1.3 – L’EGALITE DES ARMES ET L’EGALITE DES CITOYENS DEVANT LA JUSTICE PENALE SONT-ELLES MIEUX ASSUREES AVEC UN JUGE D’INSTRUCTION ?

Oui. Dans un système de type inquisitoire comme le nôtre, le coût des procédures est à la charge de l’Etat, à la différence du système accusatoire de common law où les personnes modestes ne peuvent pas réellement assurer leur défense, ou documenter leur plainte en ce qui concerne les victimes. Beaucoup dépend de la qualité, des moyens et des prérogatives de la défense. Il faut donc créer un service public de défense pénale, financé sur le budget de l’aide juridictionnelle, intégrant des avocats seniors encadrant des plus jeunes assurant un minimum de cinq ans d’activité, avec un statut leur garantissant une totale indépendance. Le coût sera élevé, mais sans investissement lourd, l’égalité des armes ne sera qu’un leurre et seules les personnes disposant des moyens financiers suffisants pourront se permettre le recours aux services d’avocats spécialisés, l’appui d’experts et la mise en œuvre de contre-enquêtes.

1.4 – L’EXISTENCE DU JUGE D’INSTRUCTION PERMET-ELLE DE LIMITER LES INGERENCES POLITIQUES DANS L’ETABLISSEMENT DE LA VERITE JUDICIAIRE ?

Oui, car le juge d’instruction est celui qui peut conduire ses investigations lorsque des puissants sont en cause, notamment dans les affaires politico-financières. Nombre d’affaires de corruption, de financement illégal de partis politiques, d’abus de biens sociaux, impliquant le pouvoir socioéconomique ou des personnalités ayant les réseaux d’appui suffisants n’auraient jamais pu aboutir, voire n’auraient même pas été initiées si des juges d’instruction n’avaient pas été saisis. Là réside le principal risque si les procureurs se voient confier l’initiative de toutes les investigations. Le garde des sceaux, encore plus depuis la loi du 9 mars 2004, veut s’affirmer comme « le chef des parquets ». Les procureurs généraux sont nommés de façon discrétionnaire en conseil des ministres, la hiérarchie des parquets étant renforcée dans le cadre d’un processus de nomination très encadré qui promeut aux postes de responsabilité les plus proches du pouvoir en place. Les ministres de la Justice ne respectent plus les avis non conformes du Conseil supérieur de la magistrature, contrairement à la période 1997-2002. L’intervention du politique dans les affaires ne peut donc être contrebalancée que par l’indépendance des magistrats en charge des affaires sensibles ainsi que par la transparence des procédures et des décisions.

2 – DE DELICATS EQUILIBRES

La principale conséquence de la suppression du juge d’instruction serait le transfert de toutes les initiatives et des fonctions d’investigation au parquet, même dans les affaires les plus sensibles. Ce choix serait lourd de conséquences. Il ne pourrait évidemment, pour éviter les interventions du politique, garantir les libertés et être compatible avec la Convention européenne des droits de l’homme , s’effectuer qu’après avoir accordé un statut garantissant l’indépendance des magistrats du parquet dans la conduite des enquêtes. Cette orientation semble difficilement compatible avec celles fixées par le président de la République, et en tous cas serait en contradiction totale avec les dispositions résultant de la loi du 9 mars 2004 .

L’hypothèse de la suppression du juge d’instruction implique donc préalablement une réforme  pour garantir l’indépendance des magistrats du parquet dans la conduite des affaires individuelles. Le statut de la police judiciaire devrait aussi être renforcé dans la loi, pour éviter les pressions de la hiérarchie politique et administrative du ministère de l’Intérieur qui a désormais autorité sur toutes les forces de police et de gendarmerie.

En fin de compte, plutôt qu’une rupture illusoire, ne serait-il pas plus raisonnable d’assurer une continuité réformiste et de rester en cohérence avec les conclusions de la commission parlementaire tirant les leçons de l’affaire d’Outreau ? Et donc mettre en œuvre, comme prévu par la loi du 5 mars 2007, la collégialité de l’instruction, autour des pôles de l’instruction, à compter du 1er janvier 2010. Le juge d’instruction ne serait pas supprimé, mais son rôle serait limité aux seules affaires dans lesquelles il apporte une réelle valeur ajoutée, par la nécessité d’investigations nouvelles, la grande complexité de l’affaire ou pour prévenir les risques d’intervention politique dans un dossier sensible.

Quand les faits sont reconnus, même en matière criminelle, il n’y a aucune raison de saisir un juge d’instruction pour allonger inutilement les délais de comparution à l’audience de jugement. Ce pourrait être un magistrat du siège, président du tribunal ou son délégué, obligatoirement saisi par le parquet, qui effectuerait le choix de saisir ou non un juge d’instruction. Pour tous les autres dossiers, un juge de l’instruction, à l’instar d’un juge de la mise en état en matière civile pourrait simplement, en audience publique, valider le fait que la procédure peut être transmise au tribunal pour être jugée au fond, avec une volonté forte d’accélérer les délais et de supprimer les temps morts de la procédure. Ce même magistrat exercerait également, avec un statut fixé par la loi, les fonctions actuellement dévolues au JLD. Mais, quelles que soient les solutions retenues, il convient d’améliorer le statut les magistrats du parquet pour garantir leur rôle constitutionnel de garant des libertés, leur impartialité dans la conduite des enquêtes et empêcher toute ingérence du politique dans les affaires individuelles.

Ces réformes, enfin, doivent s’articuler avec une conception rénovée de l’organisation judiciaire. La suppression de la fonction d’instruction – et donc aussi du JLD – dans tous les petits tribunaux permet une rationalisation et une économie de moyens. Le schéma global d’organisation de la justice pénale, heureusement repensé depuis la mise en place des pôles financiers et des assistants spécialisés en 1998, puis par les juridictions interrégionales spécialisées créées par la loi du 9 mars 2004, pourrait ainsi poursuivre sa modernisation et favoriser la coopération dans l’espace judiciaire européen, en conciliant efficacité dans la lutte contre la criminalité et protection des libertés. Au sein de cette justice spécialisée, des juges d’instruction moins nombreux, mais ayant fait l’objet d’une formation continue et d’un recrutement ad hoc, travaillant en équipe, assistés de collaborateurs de haut niveau, tiendraient toute leur place.

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NOUVELOBS.COM | 19.02.2009 | 07:52

La Cour supérieure judiciaire irakienne examine le dossier du journaliste Mountazer al-Zaïdi, qui avait lancé en décembre ses chaussures au visage de George W. Bush.

Sur cette image vidéo, George Bush (à gauche) évite une chaussure lancée par un journaliste lors d'une conférence de presse

Sur cette image vidéo, George Bush (à gauche) évite une chaussure lancée par un journaliste lors d’une conférence de presse

(c) Reuters

C‘est ce jeudi 19 février qu’est jugé, devant la Cour supérieure judiciaire irakienne, le journaliste irakien qui avait lancé en décembre ses chaussures au visage de George W. Bush.
Mountazar al-Zaidi, 30 ans, est en détention depuis le 14 décembre. Ce jour-là, lors d’une conférence de presse conjointe à Bagdad du Premier ministre irakien Nouri al-Maliki et de George W. Bush, alors président, Mountazar al-Zaidi avait eu le temps de lancer ses deux chaussures, l’une après l’autre, avant d’être violemment plaqué au sol par les services de sécurité.
Le procès du jeune homme, devenu un héros en Irak et dans le monde arabe, devait s’ouvrir initialement le 31 décembre mais ses avocats ont obtenu un report: la défense demandait une requalification des poursuites, en injures contre un chef d’Etat étranger. Mais selon Abdel-Sattar Bayrkdar, le journaliste sera poursuivi pour agression sur un chef d’Etat étranger.

Il encourt 15 ans

Il s’est refusé à dire quelle peine risquait le journaliste, mais selon les avocats de la défense, il encourt une peine maximale de 15 années de prison.
Il y a également eu des inquiétudes sur la santé et la sécurité du journaliste, qui aurait été frappé et torturé pendant sa détention, le juge chargé de l’enquête ayant constaté des traces de coups au visage. En outre, selon son frère Dhargham, Al-Zaidi a été “privé de ses droits élémentaires”, et ses proches et avocats se sont à plusieurs reprises vus refuser des visites, comme encore jeudi pour sa famille. Un autre frère qui avait rendu visite le mois dernier au journaliste a dit qu’il semblait en forme et que ses blessures étaient guéries.

Comme des œufs ou des tomates

Selon Dhia al-Saadi, un des avocats du journaliste, la défense va faire valoir que son lancer de chaussure constituait une “expression nationaliste” destinée non à blesser George W. Bush mais à dire son opposition à “l’occupation”.
“Ce type d’expression est bien connu en Amérique et en Europe, où des gens jettent des oeufs ou des tomates pourries sur leurs dirigeants pour affirmer le rejet de leurs politiques”, a expliqué l’avocat à Associated Press Television News. “Quand al-Zaidi a jeté ses chaussures sur Bush, c’était ce genre d’expression politique. Dès lors, il ne doit pas y avoir de charges criminelles”, a-t-il ajouté.
Le lancer de chaussure est devenu un moyen de protestation populaire. Lundi dernier, un manifestant a ainsi jeté, sans l’atteindre, un de ses souliers sur le Premier ministre chinois Wen Jiabao qui prononçait un discours à l’université de Cambridge à l’occasion de sa visite en Grande-Bretagne. (avec AP)

Bastia –  19 février 2009

Après trois jours d’audience, la cour d’assises de Haute-Corse a, en appel et sous la présidence de Jean Brunet, condamné hier Paul-Joseph Poggi à 13 ans de réclusion criminelle sans délai de sûreté. Soit deux années de moins qu’en octobre 2007 à Ajaccio où ce verdict de première instance avait été assorti d’une peine incompressible de dix années.

Une dernière fois, l’accusé avait eu l’occasion de redire, en début de séance, qu’il ne voulait « pas tuer cet homme, juste lui faire peur ». Une thèse naturellement rejetée avec vigueur par Me Dominique Ferrari, l’avocat des parties civiles. Selon lui « Poggi voulait en découdre ! S’il se sentait menacé, il avait largement le temps d’avertir la gendarmerie. On peut parler de crime abject, de crime odieux, de crime de lâche ! » Et pour donner plus de poids à sa plaidoirie, Me Ferrari avait usé de l’opposition des deux personnalités : « Émile Corticchiato était un jeune homme de bien, il défendait et même incarnait les vraies valeurs de la Corse. L’homme qui lui a ôté la vie est quelqu’un qui n’est jamais content, qui rend toujours responsables les autres de sa situation et qui avait fini par communiquer à son épouse son délire de la persécution. Pour l’assassinat dont il s’est rendu coupable, je ne réclame pas vengeance mais simplement justice… »

« Les amis de ses ennemis sont ses ennemis »

L’avocat général Hyppolyte Savelli avait évidemment abondé dans son sens, en rappelant les propos de Paul-Joseph Poggi dès lors qu’il avait su imminente la « visite » d’Émile Corticchiato : « J’avais de mauvaises choses dans la tête ». Dans son réquisitoire, le représentant du ministère public avait ensuite démonté le processus qui, comme dans une tragédie antique, avait conduit au drame : « Le sort de la victime a été scellé dès lors qu’il a été prononcé son nom dans la querelle des deux femmes. Dans l’esprit de Paul-Joseph Poggi, il était dès lors devenu un réel danger et les mots qu’il a employés pour le décrire traduisent son animosité envers lui. Plus tard, il parlera même de « pourriture » ! Son raisonnement tient au fait que les jeunes qui avaient roué de coups son fils, fréquentaient l’établissement tenu par la compagne d’Émile Corticchiato. L’un et l’autre ont dès lors été suspectés d’appartenir au complot. Suivant la formule consacrée, l’accusé avait fait des amis de ses ennemis, ses propres ennemis. Tout simplement parce qu’il n’y a, dans son esprit, que deux thèses possibles : soit on est avec lui, soit on est contre lui ! »

En conséquence, l’avocat général en était venu à requérir contre Paul-Joseph Poggi une peine d’emprisonnement plus lourde que celle initialement prononcée. À savoir : de 18 à 20 ans dont les deux tiers incompressibles.

Il avait alors appartenu à Me Karine Foata d’ouvrir les plaidoiries de la défense. Après avoir rappelé que Mickaël Poggi n’avait pas seulement été tabassé mais aussi menacé de mort par ses agresseurs (d’où l’achat du pistolet par son père) elle avait réfuté la préméditation en donnant une autre interprétation des « mauvaises choses » auxquelles l’accusé avait dit avoir pensé : « Il parlait de ce qui pouvait arriver à sa famille, au danger qui planait sur les siens, et non de ce qu’il se préparait à faire ! »

« Pas irrécupérable pour la société »

Me Antoine-Pierre Carlotti insistait à son tour sur le fait que « Paul-Joseph Poggi n’avait, face au péril, pas une structure mentale qui aurait pu lui permettre de faire la part des choses ». Revenant sur l’altération du discernement évoquée par l’expert psychiatre, il demandait donc à la cour de prendre en compte cette atténuation de la responsabilité pour rendre un verdict plus juste que la sentence ordonnée en première instance. Enfin, Me Sacha Thomas-Porri avait retracé le parcours de l’accusé pour parler de « tous les préjudices qui l’avaient jalonné, jusqu’à cette journée du 1er novembre 2005 faite, elle-même, d’un tragique enchevêtrement d’actes et de mots qui allaient rendre la situation incontrôlable ». Insistant sur l’incapacité de Paul-Joseph Poggi à mettre des mots sur sa souffrance et à exprimer clairement son ressenti des événements, il avait au préalable vertement rejeté « l’idée que cet homme puisse être irrécupérable pour la société ».

Des arguments développés avec beaucoup de conviction par la défense et qui ont donc convaincu les jurés de ne pas retenir la préméditation dans l’assassinat du malheureux Émile Corticchiato.

Compte Rendu D’audience Jean-paul Cappuri


18/02/2009 | 19:11 par Ph.L./AFP

Le verdict dans l’affaire de l’incendie du poste de police de l’Ousse-des-Bois à Pau est tombé. Tous sont acquittés.

Les huit hommes accusés de l’incendie d’un poste de police dans le quartier de l’Ousse-des-Bois à Pau ont été acquittés par la cour d’assises de Toulouse, confirmant ainsi le jugement de 2005. Les policiers présents dans la salle d’audience se sont dits “écoeurés” du verdict.

Des peines de 8 ans d’emprisonnement avaient été requises mardi devant la cour d’assises de Haute-Garonne à Toulouse contre quatre des huit hommes poursuivis pour l’incendie d’un poste de police en 2003 à Pau, et acquittés en 2005 par les assises des Pyrénées-Atlantiques.

L’avocate générale, Florence Galtier, avait demandé des peines plus clémentes qu’en première instance. Elle a demandé des condamnations contre quatre des accusés, estimant qu’il n’y avait pas “assez d’éléments graves” contre les autres malgré leur mise en cause par le principal témoin de l’accusation.

L’avocate générale a souligné “les pressions multiples” pesant sur les témoins de l’accusation, entraînant “la rétractation programmée” du principal accusateur, revenu sur ses déclarations pourtant “très détaillées et vérifiées par les enquêteurs”. Elle a également souligné l’incohérence des alibis des accusés qui “ont donné entre quatre à huit versions différentes.”

- L'incendie du commissariat de Pau le 27 septembre 2003 - France 3 Aquitaine -© France 3 AquitaineL’incendie du commissariat de Pau le 27 septembre 2003De leur côté, les avocates des parties civiles ont rejeté catégoriquement “une machination judiciaire” à l’encontre des huit accusés. “Dans cette affaire, qui n’était pas l’affaire du siècle, il n’y avait eu aucune pression sur les enquêteurs”, ont-elles dit.

A l’instar de l’avocate générale, elles ont également insisté sur “les intimidations dont ont été victimes les témoins, frappés d’amnésie ou qui s’étaient rétractés”.

L’attaque de ce poste de police de proximité, le 27 septembre 2003 dans le quartier sensible l’Ousse-des-Bois, avait suscité une vive émotion à Pau. Le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, s’était rendu à deux reprises à Pau et avait promis l’arrestation des incendiaires dans un délai de trois mois. Et trois mois plus tard, la majorité des accusés avait été interpellée.

Après l’acquittement des accusés en 2005 par la cour d’assises des Pyrénées-Atlantiques, le parquet général, qui avait requis des peines allant de 6 à 12 ans de prison à l’encontre des accusés, avait interjeté appel.

Point de vue
Une imposture bulgare ?, par François Frison-Roche
LE MONDE | 14.02.09 | 13h30  •  Mis à jour le 14.02.09 | 13h30

ingt ans après la fin du régime communiste et deux ans après son entrée dans l’Union européenne, la Bulgarie n’est pas à la hauteur des attentes qu’elle suscitait parmi ses partenaires. Au-delà de la suppression récente de fonds d’adhésion pour fraudes, elle inquiète au point que la mise en application de la clause de sauvegarde en matière judiciaire prévue à l’article 38 du traité d’adhésion est évoquée par certains Etats membres. Depuis de nombreuses années, le système judiciaire, pilier de toute démocratie, est miné par la criminalisation rampante de l’Etat et la corruption. L’exemple récent de ce que l’on appelle “l’affaire Borilski” en est une illustration.

Martin Borilski était un jeune Bulgare de 24 ans en quatrième année de droit à Paris. En juillet 2000, il a été assassiné de 93 coups de couteau. Malgré les preuves scientifiques accumulées par la police française et transmises à la justice bulgare, ses meurtriers présumés, deux Bulgares qui étaient parvenus à quitter la France, viennent d’être acquittés en appel. Bien que les autorités françaises aient manifesté une très grande vigilance sur ce dossier (l’ambassadeur de France s’est déplacé lors du premier procès devant le tribunal de Choumen, la garde des sceaux a évoqué l’affaire avec son homologue bulgare), l’aboutissement judiciaire de ce crime après neuf ans de procédure est révélateur d’une justice dévoyée, achetée, gangrenée.

L’un des deux accusés, Gueorgui J., n’est autre que le fils d’un ancien haut responsable du service de l’instruction devenu “avocat d’affaires” très influent dans la principale ville côtière de la mer Noire. Il ne fait pas de doute que ce “jugement” est un déni de justice. Obtenu par corruption ? Sous la menace ? A “l’incompréhension” exprimée par l’ambassadeur de France après ce verdict, la ministre de la justice bulgare a déclaré à la télévision que la justice était “indépendante”. Force est de constater que l’impunité totale dont certains peuvent se prévaloir du fait de leurs liens politiques ou de l’influence que leur procure leur fortune est une caractéristique locale.

On assiste depuis de nombreuses années, dans les Balkans et en Bulgarie en particulier, à un phénomène de criminalisation de l’Etat. Ce phénomène est plus dangereux que les manifestations de criminalité économique et de corruption que dénonce avec raison l’UE. Après la chute du “parti-Etat” communiste, la machine de l’Etat – son administration, son système judiciaire, sa police – n’a pas acquis la capacité à exercer ses missions régulatrices et de “bonne gouvernance”. Faute de volonté politique et d’un personnel de remplacement qualifié, les nouveaux organes institutionnels mis en place à l’époque ont été “investis” pour être instrumentalisés au profit de quelques groupes de personnes cherchant à s’approprier un maximum de ressources. Non seulement le Parlement, le gouvernement, la présidence de la République, les municipalités, la Prokuratura, les hautes instances judiciaires, la police… sont concernés, mais aussi les partis politiques et les médias.

Des listes encore incomplètes ont été publiées, recensant les très nombreuses personnes occupant des postes de responsabilité dans tous ces secteurs et qui ont par le passé appartenu aux services de sécurité du régime communiste ou collaboré avec eux. Certains hauts responsables de ces anciens services, reconvertis dans “les affaires”, gravitent aussi autour du pouvoir de manière efficace. La Bulgarie est un petit pays, ses “élites” sont restreintes et, dans chaque secteur, tout le monde connaît tout le monde. Les biographies peuvent être facilement reconstituées.

Un ancien ambassadeur américain à Sofia soulignait dans une formule caustique que “le problème avec la criminalité organisée bulgare, c’est qu’elle est trop bien organisée”. Il faisait allusion à la filiation entre l’ancienne sécurité d’Etat dissoute au début de la transition et les principaux dirigeants de ces “groupes économiques” (dont l’origine des fonds laisse perplexes tous les experts occidentaux).

Deux sortes de criminalité organisée coexistent en Bulgarie. Si l’une est issue d’en bas, dirigée par des petits gangsters et autres trafiquants de tout poil, l’autre est organisée d’en haut par des gens éduqués, bien informés, qui ont une bonne connaissance des circuits les plus rémunérateurs et disposent d’un “portefeuille relationnel” conséquent dans les pays de l’espace postcommuniste. La première se met souvent au service de la seconde pour accomplir ses basses oeuvres.

Chacune a ses clans, ses secteurs d’activité privilégiée, son implantation géographique, ses codes, et il arrive, à l’occasion, que les loups se dévorent entre eux. Le plus grave est que depuis deux décennies, cette petite élite de la nomenklatura communiste est arrivée à mettre les représentants du pouvoir politique bulgare sous dépendance. Elle peut les influencer et faire en sorte que leurs choix législatifs la gênent le moins possible. Elle peut les manipuler, voire les corrompre, pour gagner du temps. Elle peut aussi avoir recours à l’assassinat pour se débarrasser d’un concurrent, intimider les entourages ou “redistribuer les cartes” comme ce fut le cas en 1996 avec le meurtre devant son domicile de l’ancien premier ministre Andreï Loukanov (trop bien informé sans doute sur les “ressources financières” disséminées à l’étranger par l’ancien Parti communiste) ou, en 2005, avec l’exécution en plein centre de Sofia du “banquier” Emil Kiulev, un ami proche de l’actuel président de la République. Ceux qui tentent d’enquêter et de dénoncer, comme le journaliste Ognian Stefanov, sont au mieux tabassés.

Gueorgui Stoev, lui, auteur de plusieurs ouvrages sur la mafia, a été assassiné dans la foule à un arrêt de bus il y a quelques mois à peine. La parution d’un livre du journaliste d’investigation allemand Jürgen Roth présentant des faisceaux d’indices concordants sur la criminalité organisée en Bulgarie a levé le voile. Même si l’opacité est la règle en la matière, le phénomène est donc bien cerné. Mais en Bulgarie, après quelques jours de scandale, le silence revient, la chape de plomb retombe, l’impunité continue. Il serait absurde et faux de dire que tous les responsables bulgares sont corrompus, mais beaucoup ont peur. Quand l’Etat est défaillant, c’est la loi du plus fort qui prévaut et, comme le dit un proverbe bulgare, “tête courbée n’est pas coupée”

Dans ce contexte, les autorités gouvernementales bulgares – de gauche ou de droite, actuelles ou futures – sont-elles en mesure de faire preuve de volonté politique comme le demande l’UE ? En l’état actuel, la réponse est négative. Que va-t-il alors se passer ? Des promesses seront évidemment faites à l’UE, des lois plus sophistiquées seront même adoptées, mais elles ne seront pas ou mal appliquées. Quelques affaires de corruption avérée seront mises en avant pour distraire l’opinion et c’est ainsi, par exemple, que l’ancien directeur de l’entreprise de chauffage de Sofia (Toplofikatsia), pris la main dans le sac, devrait passer en justice. De même quelques fraudeurs aux fonds européens et quelques juges de second rang joueront le rôle de fusibles. Un espoir subsiste encore : c’est l’Europe et une occasion se présentera, à savoir les élections législatives.

Contrairement à ce qui se passe en Europe occidentale, l’opinion bulgare est en attente de “plus d’Europe”. Le rapport d’évaluation du commissaire européen à la justice et aux affaires intérieures, Jacques Barrot, qui vient d’être rendu public, peut être un levier efficace pour susciter un électrochoc avant ces élections. Si rien n’est fait, si l’Europe ne répond pas aux demandes de l’opinion, les engagements des autorités, en fin de mandat et à bout de souffle, pourraient passer pour une imposture.

Chercheur au Centre d’études et de recherches de science administrative (CERSA) de Paris-II, spécialiste de la Bulgarie

Article paru dans l’édition du 15.02.09

Draguignan 18 février 2009

Jean-Louis Parra, ce conducteur d’engins de 45 ans, qui lors d’une dispute familiale avait provoqué la mort de son père hémiplégique, en lui assénant deux coups au visage le 24 octobre 2004 à Toulon, a été condamné hier à huit ans d’emprisonnement par la cour d’assises du Var.

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Le jury a délibéré une heure et demie pour rendre ce verdict à 12 h 30, choisissant l’option basse proposée par l’avocat général. Celui-ci avait préconisé une peine dans une fourchette de huit à douze ans.

Le condamné, venu libre à l’audience après avoir subi dix-neuf mois de détention provisoire, a été incarcéré à l’issue du délibéré. Il a réfléchi un peu moins de quatre heures au sens de cette peine. A 16 h 10, le centre pénitentiaire de Draguignan a expédié un fax au greffe de la cour d’assises, pour signifier que Jean-Louis Parra faisait appel de la décision.

Il y aura donc un deuxième procès criminel, sans doute devant les assises d’Aix-en-Provence.

Comment punir le fils sans faire souffrir sa mère

Au nom de la veuve et des deux filles d’Antoine Parra, qui avait succombé à 71 ans aux complications d’un coup reçu sur le front, Me Jean-Claude Guidicelli a demandé « un verdict juste, pour qu’il repose en paix ».

Il a regretté l’attitude indifférente de l’accusé, estimant qu’il avait été jusqu’à inverser les rôles, « en faisant avec aplomb le procès de son père post mortem, le salissant, le tuant une deuxième fois ». L’avocat général M. Ange Fiorito était du même avis : « L’objectif principal de l’accusé est de limiter les dégâts, de minimiser, de se défausser. »

Ainsi ne croyait-il pas à la version de Jean-Louis Parra, qui ne reconnaissait avoir porté que deux gifles à son père, et non s’être acharné à coups de poings comme le disaient sa mère et sa soeur cadette.

« La vérité est du côté de la famille. Pourquoi mentiraient-elles pour l’enfoncer ? Surtout sa mère, qui a perdu son mari, mais qui perd aussi son fils. »

Pour lui, ce parricide était le crime d’un « enfant gâté qui ne supporte pas qu’on le contrarie ».

Rappelant que l’accusé encourait vingt ans de réclusion, M. Fiorito a attiré l’attention du jury sur la difficulté à trouver la juste peine : « Parce qu’en punissant le fils, vous allez faire souffrir la mère. »

En annonçant la fourchette de ses réquisitions, il n’a pas caché qu’il s’était refréné, pour tenir compte de cette mère doublement meurtrie.

Retour en prison

Ce paradoxe, né de la position très délicate de la veuve de la victime dans ce procès, a également été souligné en défense par Me Edith Angelico.

Elle a plaidé sur la personnalité de Jean-Louis Parra, sur son fantasme de peur face à l’image écrasante de son père, qu’avait noté l’expert psychologue.

« Les faits résultent d’un malheureux concours de circonstances, dans un contexte de brouhaha où les discussions familiales s’enveniment. S’il a causé la mort de son père, c’est par un mauvais coup au mauvais endroit, sur un homme fragilisé par ses pathologies importantes. »

Me Angelico a demandé à la cour de tenir compte des dix-neuf mois déjà passés en détention provisoire, pour accorder à Jean-Louis Parra le bénéfice du sursis et ne pas le renvoyer en prison.

« Sa détention ne rendra pas la vie à la victime et rajoutera à la douleur de la partie civile. »

Le mandat de dépôt délivré contre Jean-Louis Parra au moment du verdict a visiblement été insupportable pour l’accusé, qui avait repris le fil de sa vie d’homme libre depuis mai 2006.

G. D.

AFP
17/02/2009 |

Des peines de 8 ans d’emprisonnement ont été requises aujourd’hui devant la cour d’assises de Haute-Garonne contre quatre des huit hommes poursuivis pour l’incendie d’un poste de police en 2003 à Pau, et acquittés en 2005 par les assises des Pyrénées-Atlantiques.

L’attaque de ce poste de police de proximité, le 27 septembre 2003 dans le quartier sensible l’Ousse-des-Bois, avait suscité une vive émotion à Pau. Le président, Nicolas Sarkozy, à l’époque ministre de l’Intérieur, qui s’était rendu à deux reprises à Pau, avait promis l’arrestation des incendiaires dans un délai de trois mois. Trois mois plus tard, la majorité des accusés avait été interpellée.

Après l’acquittement des accusés en 2005 par la cour d’assises des Pyrénées-Atlantiques, le parquet général, qui avait requis des peines allant de 6 à 12 ans de prison à l’encontre des accusés, avait interjeté appel.

Le verdict devait être rendu jeudi matin.