De juré à condamné : deux jours en cour d'assises : narration réflexive

Christian Verrier  

Éditeur:L’Harmattan
Format:Livre Broché
Collection:La justice au quotidien, n° 55
Catégorie:Droit
Langue:Français
Parution:06 – 2018
Nombre de pages:133
EAN:9782343152738
Dimensions:14 x 22 x  mm

CHF 20.70

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Ce livre est le récit réflexif d’un juré d’assises qui, pour refuser de juger et de condamner après avoir été tiré au sort, se voit pour cela lui-même condamné au nom du code de procédure pénale. Sans rien avoir commis au préalable de contraire à la loi, sans s’être jamais livré à aucun crime ou délit, il est possible aujourd’hui, en France, pays libre respectant les opinions individuelles, d’être condamné tout à fait légalement à de lourdes sanctions pénales pour refuser de siéger en cour d’assises pour motifs moraux et philosophiques. L’auteur décrit les suites de tirages au sort successifs dont il a été un élément involontaire, insistant sur les détails des deux premiers jours d’une session de cour d’assises durant lesquels, par son refus pacifique d’être juré et de condamner, il commet un acte de désobéissance civile. Sont aussi proposées des pistes de réflexion visant à rendre les jurys populaires mieux adaptés à notre époque, depuis le mode de sélection des jurés jusqu’à leur formation, sans oublier l’évaluation démocratique de leurs actes par des citoyens volontaires.

Marc, juré d’Assises récemment en Haute-Vienne

Par Fabienne JoigneaultFrance Bleu Limousin

11 décembre 2017 

SOURCE 

Tout citoyen peut un jour se retrouver juré d'Assises
Tout citoyen peut un jour se retrouver juré d’Assises © Maxppp – Nicolas Kovarik

Alors que la Cour d’Assises de la Haute-Vienne entame ce lundi une série de 4 procès, les derniers de 2017, France Bleu Limousin donnait la parole à 8h15 à un juré, qui a siégé lors d’une précédente session. Le témoignage d’un citoyen qui en sait un peu plus aujourd’hui sur la justice de son pays.

C’est une parole rare : celle d’un ancien juré d’assises, l’un de ces citoyens ordinaires, tirés au sort pour juger d’affaires graves, notamment les meurtres.  Alors qu’un session d’Assises débute justement aujourd’hui à Limoges, pour 3 affaires de viol et une tentative de braquage, Marc, juré lors d’une précédente session, s’est confié à Nathalie Col.

Découvrir les rouages de la justice

Il n’avait jamais mis les pieds dans un tribunal. Marc dit avoir ressenti un mélange de sensations entre le fait de “découvrir quelque-chose de nouveau, les plaidoyers des avocats, les rouages de la justice ; et une part de stress, avec des faits auxquels on est pas confronté souvent“.   Mais en recevant la convocation, c’est avant tout à la gestion du temps qu’il a pensé, par rapport à son activité professionnelle, pour savoir comment se libérer !

Un débat très libre entre jurés

La prise de conscience intervient au fil du procès. Au début, “le président du jury nous a vraiment expliqué dans le détail le processus et nous a dit de raisonner en notre âme et conscience“, raconte Marc, qui se souvient d’un très bon accompagnement : “on a des repères, on nous donne les peines encourues selon les faits“.  Mais “chacun est libre de donner son opinion et sa peine, et de défendre son point de vue“, tient-il à rappeler, “on délibère, on vote à plusieurs reprises pour tenter de trouver la peine la plus juste, et ne pas avoir le sentiment de faire une erreur“.

“La réalité dépasse la fiction !

Au final, Marc a changé de regard sur le fonctionnement de la justice. “De l’extérieur, on se dit que ce n’est pas toujours bien fait, et quand on participe, on voit que la décision est prise de manière unanime“. Ce qui l’a surtout frappé, ce sont les histoires de vie souvent difficiles racontées aux Assises.  “Malheureusement, on découvre la misère qui nous entoure (…), la réalité dépasse parfois la fiction, il y a des vies qui sont vraiment difficiles“.  Et il retient l’idée “de ne pas juger au premier regard, d’être parfois moins sévère, car il y a une histoire derrière chaque affaire“.

Réécoutez l’interview de Marc en intégralité ici.

C’est un témoignage rare, et qui restera anonyme : celui d’un juré d’Assises. Marc a été tiré au sort il y a quelques mois pour participer à un jury populaire à la Cour d’Assises de la Haute-Vienne. Une expérience qui a changé son regard sur la justice.

Le premier juré du procès en appel de l’affaire de la petite Fiona a publié un commentaire sur la page Facebook d’une avocate…

Cécile Bourgeon et Berkane Makhlouf sont jugés, en appel au Puy-en-Velay, pour les violences ayant entraîné la mort de Fiona, 5 ans.

 

  • Tirés au sort, les jurés d’assises sont soumis au secret.
  • L’un d’entre eux a commenté le procès de l’affaire de la petite Fiona en octobre.
  • La défense des deux accusés s’en est émue.

Il n’a pas donné son avis sur le fond de l’affaire. Juste sa « frustration » que le procès en appel de Cécile Bourgeon et de Berkane Makhlouf pour les violences ayant entraîné la mort de Fiona sans intention de la donner, en octobre au Puy-en-Velay (Haute-Loire), ait été interrompu avant son terme.

>> Pourquoi le procès en appel de l’affaire Fiona a été renvoyé ?

Comme l’a révélé Le Parisien mercredi, l’un des jurés ayant été désigné pour ce procès d’assises a publié un commentaire sur la page Facebook d’une des avocates de la partie civile quelques heures après le renvoi de l’audience. 20 Minutes revient sur les obligations des jurés d’assises…

  • Qui peut être désigné juré d’assises ?

Toutes les personnes âgées de 23 ans ou plus. Les jurés d’assises sont tirés au sort à partir des listes électorales. Une fois désigné pour siéger, impossible d’y déroger à moins d’invoquer « un motif grave (maladie, surdité, enfant handicapé…) », comme le rappelle le ministère de la Justice dans un guide pratique.

Ceux qui ne se déplacent pas à l’audience en sont pour leurs frais. Le fait de ne pas se présenter sans motif légitime peut être puni par une amende allant jusqu’à 3.750 euros. Et les magistrats ne plaisantent pas avec ça. Lors du procès en appel de Fabienne Kabou, à Douai (Nord), en septembre, l’un des jurés qui n’avait pas fait le déplacement a été condamné à 1.200 euros d’amende.

  • A-t-il le droit de parler du procès avec ses proches ?

Difficile de ne pas raconter sa journée quand on rentre chez soi le soir. En revanche, les présidents de cours d’assises recommandent aux jurés de ne pas parler de l’affaire à tort et à travers qu’ils ont à juger. Et donc surtout pas sur Facebook.

« Ils n’ont pas de contacts avec les avocats de la procédure en cours ni avec les représentants du ministère public, poursuit Clarisse Taron. Dans les petites villes, on leur recommande même, le midi, de se faire livrer une pizza au palais de justice plutôt que d’aller au restaurant où ils pourraient croiser certaines parties au procès. »

  • Doivent-ils suivre l’intégralité des débats ?

Évidemment. Un juré à l’obligation d’être attentif à ce qu’il se dit lors du procès. On lui fournit du papier et un crayon pour prendre des notes. Et l’alimentation a son importance quand les journées sont longues et chargées. « Je me souviens d’un président qui recommandait aux jurés de manger léger le midi pour éviter de s’endormir à 14h », raconte encore Clarisse Taron.

  • Peut-il manifester son opinion ?

Absolument pas. Un juré se doit d’être « indépendant, neutre, impartial et objectif », précise le guide pratique du ministère de la Justice. Il ne doit donc manifester aucune émotion lors des débats même si certains avocats rompus à l’exercice parviennent, d’un regard, à savoir quel juré leur est acquis, ou pas.

La discrétion est donc la norme. « Lors d’un procès, la plaidoirie d’une partie civile avait été très émouvante, raconte encore Clarisse Taron, la présidente du syndicat de la magistrature. La salle a applaudi. Et l’un des jurés a commencé lui aussi à taper dans ses mains. Il a été immédiatement remplacé. »

  • Que risque un juré qui révélerait le secret d’un verdict ?

« Le secret du délibéré est absolu et éternel », rappelle Clarisse Taron. Un juré ne peut donc à aucun moment révéler ce qu’il s’est passé lors de la délibération. Quand le président de la cour annonce le verdict, il précise que l’acquittement ou la condamnation a été voté « à une majorité d’au moins 6 voix sur 9 (8 sur 12 en appel) ». De cette manière, il est impossible de retrouver les votes de chacun.

>> Un juré jugé pour violation du secret du délibéré

Cela peut coûter cher de révéler le secret. En 2010, un juré d’assises s’était permis de critiquer dans les colonnes du Parisien le verdict auquel il avait assisté. Il a écopé d’une peine de deux mois de prison avec sursis.

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Julie Laborderie, 4 juillet 2009

La Une travaille actuellement sur un projet ultraconfidentiel et inédit à la télévision française : procéder à la reconstitution de procès criminels avec scénario, réalisateur et comédiens.

Des procès criminels emblématiques rejoués par des comédiens en prime time dans la lucarne. C’est le projet ambitieux et secret sur lequel planche actuellement la direction des magazines de l’information de TF1.

Il y a quatre mois, les équipes de la première chaîne ont contacté la Chancellerie et le parquet général de Paris afin d’étudier le cadre légal de ce programme inspiré d’une émission britannique.

Explications : l’article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse interdit « dès l’ouverture de l’audience des juridictions administratives ou judiciaires, l’emploi de tout appareil permettant d’enregistrer, de fixer ou de transmettre la parole ou l’image ».

Sauf à ce que ledit procès soit historique et filmé pour la mémoire collective. Ainsi ceux de Klaus Barbie, de Paul Touvier ou, plus récemment, de Maurice Papon ont été intégralement fixés sur pellicule, grâce à la loi du 11 juillet 1985 autorisant la constitution d’archives audiovisuelles de la justice.

Des sténodactylos dans le prétoire

Caméras, appareils photo et autres enregistreurs de sons et d’images formellement prohibés du prétoire, TF1 fera donc appel à un escadron de sténodactylos. Lesquelles se relaieront afin de prendre en notes chaque minute d’audience. Les services du ministère de la Justice ont déjà validé le procédé.

Dernièrement, lors du procès de Véronique Courjault, on a ainsi pu voir deux dactylos retranscrire les débats pour le compte de la société de production de Jean-Xavier de Lestrade qui prépare un film sur l’affaire des bébés congelés. Pour mémoire, le réalisateur avait remporté un Oscar en 2002 pour Un coupable idéal, un documentaire sur l’histoire d’un adolescent afro-américain victime d’une erreur judiciaire.

Le procès de Youssouf Fofana était dans les tuyaux

A partir de ces retranscriptions, un scénario sera concocté, puis remis à des comédiens qui se glisseront dans la peau des protagonistes du prétoire : accusé(e), victime, président(e), avocat(e) général, partie civile, défenseur, témoins, etc. Propos et attitudes seront joués à l’identique.

« L’idée, c’est de se saisir d’un procès emblématique soulevant une question sociétale qui pourrait trouver un écho dans l’opinion », détaille un cadre de la maison TF1. A l’image de celui du « gang des barbares », en cours devant les assises de Paris. La comparution des coupables présumés de ce fait divers sordide avait suscité l’intérêt de la première chaîne, qui s’était parée de toutes les autorisations nécessaires. Las ! le prononcé d’un huis clos au bénéfice de Youssouf Fofana et de ses acolytes a remisé le projet au placard. Loin d’abdiquer, les limiers de la Une auraient déjà dégoté, selon une source interne, un autre dossier judiciaire d’importance en province.

Restera toutefois une dernière obligation à respecter, comme on l’indique au parquet de Paris : « Nous avons donné notre accord sur le principe de ce qui sera une sorte de rediffusion de procès, mais uniquement dans le cas où il sera frappé d’une décision définitive. Cela afin de ne pas soulever de problèmes juridiques. » Impossible, donc, de procéder à une reconstitution si tous les recours – appel, cassation, Cour européenne – n’ont pas été épuisés.

TF1 a peur d’un plagiat

Sollicité hier par téléphone, Pascal Pinning, le patron des magazines de la Une, n’a pas souhaité confirmer nos informations. Dans le monde de la télé, on ne prend pas le risque de se faire plagier par la concurrence tant qu’un projet n’a pas été déposé. Surtout quand du côté du service public, Faites entrer l’accusé dope les audiences de France 2.

Pour l’heure, si le format de ce futur programme n’a pas encore été validé, la diffusion en prime time a été entérinée. Au-delà des contraintes juridiques, l’arrivée d’une émission de « real justice », inédite en France, soulève des questions éthiques et partage les professionnels du monde judiciaire.

Alors qu’aux Etats-Unis, la législation permet la diffusion sur truTV – anciennement Court TV – de procès tel que celui de O.J. Simpson, dans l’Hexagone le débat a récemment fait rage sur la possibilité de filmer les audiences. Les « pro » et « anti » se sont affrontés dans plusieurs commissions chargées, par la Chancellerie, de se pencher sur le sujet. Sans résultat puisque, à ce jour, la loi n’a pas changé d’un iota.

Le quidam continue, lui, de se précipiter au palais de justice dès qu’un procès médiatisé s’annonce. Souvent, il s’en retourne frustré car, faute de place dans le prétoire, il ne peut assister à des débats pourtant publics – sauf lorsqu’ils concernent des mineurs ou qu’une victime demande le huis clos.

Une chose est sûre, la première chaîne a flairé le bon filon avec sa future émission. Celui d’une opinion curieuse de la chose judiciaire souvent méconnue et méfiée. Alors, comédie humaine étalée à la télé ou respect d’une justice démocratique ? On attend de voir sur TF1.


“Il faut montrer la justice dans tous ses aspects”, Daniel Karlin, documentariste

Le réalisateur de Justice en France (*) se dit partisan d’une chaîne câblée qui diffuserait des procès dans leur intégralité.

FRANCE-SOIR. Que pensez-vous d’un projet d’émission de reconstitution d’un procès d’assises ?
DANIEL KARLIN.
L’idée n’est pas inintéressante, mais rejouer des procès à l’identique me semble d’une formidable médiocrité. Lorsque j’ai moi-même filmé des audiences, je l’ai fait avec des vrais gens qui avaient la capacité de me dire « Je ne veux pas que ça passe à la télévision », ce qui ne sera pas le cas avec TF1 puisqu’ils feront intervenir des comédiens. In fine, TF1 va choisir de gros procès qui ont fait du bruit et va couper ce qui l’arrange. Or cette démarche sera probablement malhonnête. Aujourd’hui, personne ne prend la responsabilité de réfléchir à la manière de montrer la justice française, et TF1 choisit ce moment pour monter un projet de procès rejoués à l’identique par des comédiens. Alors que la question essentielle est de savoir comment et quand on filme la justice ?

Au regard de votre expérience, quelles sont les précautions éthiques et techniques à respecter dans la mise en images de la justice, notamment au travers d’un procès ?
C’est très compliqué de filmer un procès, car le vrai dilemme est de savoir si l’on prend parti pour l’un ou l’autre des protagonistes. Et puis le dispositif technique est très important. Mais, ce qui l’est encore plus, c’est que soit respectée la publicité des débats. C’est-à-dire que l’on doit pouvoir voir un procès du début jusqu’à la fin. Je suis partisan d’une chaîne câblée, comme Court TV aux Etats-Unis, qui diffuserait des audiences dans leur intégralité. Avec, en « incruste », un spécialiste juridique qui éclaire les téléspectateurs car, très souvent, il se passe des choses incompréhensibles pour le néophyte dans une audience.

Pensez-vous que la présence d’une caméra ou la reconstitution d’une audience influent sur la tenue des débats ?
Non, la reconstitution ne change rien car, dans la tête des protagonistes, elle reste au stade théorique. En revanche, la présence d’une caméra change tout le monde, avec comme première conséquence le fait de diminuer la médiocrité de beaucoup de magistrats. Au fond, l’interdiction de filmer les procès a d’abord pour objectif de protéger la magistrature, et non les justiciables. La caméra influence tout le monde, mais dans le bon sens.

La justice est-elle un spectacle pour celui qui la filme ?
La justice est un spectacle pour tout le monde. Elle est conçue comme tel, avec des habits spécifiques, des positions bien définies dans le prétoire et dans la prise de parole. C’est même un des spectacles les plus codifiés et les plus hiérarchisés qui existent dans notre société. Si elle fonctionne de la sorte, c’est qu’elle doit servir d’exemple.

Le projet de TF1 n’est-il pas une manière de redonner tout son sens à l’expression « publicité des débats », fondement d’une justice démocratique ?
Le projet se concentre sur la justice criminelle, or il s’agit de quelques milliers de procès sur plusieurs millions. Il faut montrer la justice dans tous ses aspects, et notamment ceux qui concernent le plus directement les justiciables : les histoires de voisinage, de propriété, de location, de surendettement, etc. C’est là que j’ai rencontré les personnages les plus intéressants du monde judiciaire. »

(*) Justice en France, deux films de 90 minutes réalisés au début des années 90 sur le suivi intégral, de l’instruction jusqu’au procès, dans une affaire criminelle à Lille. Le réalisateur Daniel Karlin a également signé La Justice ordinaire (dans les tribunaux de commerce et administratifs), Les Urgences (flagrants délits, référés), la Défense (au barreau de Lyon) et La Justice des mineurs (avec le juge Véron de Marseille).

Edition France Soir du samedi 4 juillet 2009 page 28