Christian Verrier
Éditeur: | L’Harmattan |
Format: | Livre Broché |
Collection: | La justice au quotidien, n° 55 |
Catégorie: | Droit |
Langue: | Français |
Parution: | 06 – 2018 |
Nombre de pages: | 133 |
EAN: | 9782343152738 |
Dimensions: | 14 x 22 x mm |
CHF 20.70
Ce livre est le récit réflexif d’un juré d’assises qui, pour refuser de juger et de condamner après avoir été tiré au sort, se voit pour cela lui-même condamné au nom du code de procédure pénale. Sans rien avoir commis au préalable de contraire à la loi, sans s’être jamais livré à aucun crime ou délit, il est possible aujourd’hui, en France, pays libre respectant les opinions individuelles, d’être condamné tout à fait légalement à de lourdes sanctions pénales pour refuser de siéger en cour d’assises pour motifs moraux et philosophiques. L’auteur décrit les suites de tirages au sort successifs dont il a été un élément involontaire, insistant sur les détails des deux premiers jours d’une session de cour d’assises durant lesquels, par son refus pacifique d’être juré et de condamner, il commet un acte de désobéissance civile. Sont aussi proposées des pistes de réflexion visant à rendre les jurys populaires mieux adaptés à notre époque, depuis le mode de sélection des jurés jusqu’à leur formation, sans oublier l’évaluation démocratique de leurs actes par des citoyens volontaires.
Carole Sterlé|15 octobre 2018
Christian Verrier a été condamné en 2017 pour avoir refusé de siéger à la cour d’assises. Dans un livre, il propose que soit créée une « objection de conscience ».
Le fantasme du délibéré, dans le secret d’une arrière-salle d’une cour d’assises, pour débattre de la culpabilité d’un homme ou d’une femme, et de la sanction à lui infliger… Très peu pour lui. Christian Verrier ne veut pas juger ses pairs. Cet ancien cheminot, enseignant chercheur en sciences de l’éducation, âgé de 63 ans, a eu plusieurs fois l’occasion de s’en expliquer.
Tiré au sort sur les listes électorales, il a été convoqué par la cour d’assises de Seine-Saint-Denis, à Bobigny, pour accomplir un « devoir civique » de juré. Par deux fois, il a fait valoir son refus d’être juré. Il a été excusé la première fois, pas la seconde, comme il l’explique dans un ouvrage qui vient de paraître. Ce qui lui a valu d’être condamné à 3 750 euros d’amende, montant maximum prévu par le code de procédure pénale.
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« Ça s’est produit à moins de dix ans d’intervalle. J’ai fait valoir exactement les mêmes arguments les deux fois, je ne veux pas en conscience juger et infliger une peine à qui que ce soit », explique Christian Verrier. La prison, il connaît en tant que militant des droits de l’homme, il y a même organisé des débats auprès de détenus, et est plus que perplexe sur l’efficacité de l’incarcération. « Je suis inapte à juger qui que ce soit, d’autres en sont capables, je leur laisse ma place », dit-il non sans humour.
Pas d’objection morale pour les jurés
Ce refus, Christian Verrier raconte en détail comment il s’en est expliqué devant les juges professionnels de la cour, au moment de l’appel. « La première fois, le président a bien essayé de me convaincre, mais on m’a accordé une dispense sans explication ni commentaire », raconte-t-il. Mais en 2017, l’avocate générale réclame et obtient la condamnation du « juré supplémentaire numéro 1 ».
Quelques recherches a posteriori lui permettent de découvrir que l’objection conscience n’est pas prévue pour les jurés. « L’objection morale d’ordre laïque ou religieux ne constitue pas un motif grave susceptible de justifier l’exclusion de la liste des jurés », précise le code pénal. En revanche, s’il avait fourni une excuse médicale, professionnelle, ou s’il avait eu plus de 70 ans, il aurait pu espérer une dispense.
A-t-il paru plus présomptueux la seconde fois dans ses explications ? Fait preuve d’insolence, en adressant de surcroît une lettre à la présidente pour réaffirmer ses convictions assortie d’un chèque du montant de l’amende encourue ?
Aurait-il dû se taire jusqu’au bout ? Se priver du droit de vote pour ne pas être inscrit sur les listes électorales et ainsi ne pas risquer d’être tiré au sort ? Christian Verrier s’interroge toujours et admet que ça lui a mis « le moral au plus bas ».
Il a renoncé à faire appel, pour « en finir une bonne fois pour toutes avec ses mésaventures en cour d’assises », dit-il. Sans fermer définitivement le chapitre, toutefois, puisque la situation du juré obligatoire le contrarie. Il se met à collecter toute la littérature produite sur la question, de Montesquieu à André Gide, en passant par des récits de jurés d’assises, des ouvrages de sociologues…
Un procès renvoyé cet été, faute de jurés
« Si je ne mets pas la justice dans l’embarras en agissant comme je le fais, qu’elle-même prenne en compte ma liberté de pensée », espère Christian Verrier. Dans son livre, il propose des pistes de réflexion pour revisiter le statut des jurés, qu’il faudrait mieux former et surtout créer cette clause de conscience comme il en existait pour l’armée du temps du service militaire.
Une trentaine de condamnations sont prononcées chaque annéeavec des peines d’amende généralement comprise entre 400 et 700 euros. L’infraction est caractérisée lorsque le juré, convoqué, ne se présente pas ou s’il se retire avant l’expiration de ses fonctions sans excuse jugée valable par la cour.
Fait rarissime à la cour d’assises de Seine-Saint-Denis, cet été, un procès a dû être renvoyé faute de jurés en nombre suffisant. Avec deux sessions d’assises simultanées, la cour d’assises de Seine-Saint-Denis a besoin de plus de jurés qu’ailleurs.
« De juré à condamné, Deux jours en cour d’assises, Narration réflexive » (L’Harmattan) 133 pages, 15,50 €.
Marc, juré d’Assises récemment en Haute-Vienne
Par Fabienne Joigneault, France Bleu Limousin
11 décembre 2017
Alors que la Cour d’Assises de la Haute-Vienne entame ce lundi une série de 4 procès, les derniers de 2017, France Bleu Limousin donnait la parole à 8h15 à un juré, qui a siégé lors d’une précédente session. Le témoignage d’un citoyen qui en sait un peu plus aujourd’hui sur la justice de son pays.
C’est une parole rare : celle d’un ancien juré d’assises, l’un de ces citoyens ordinaires, tirés au sort pour juger d’affaires graves, notamment les meurtres. Alors qu’un session d’Assises débute justement aujourd’hui à Limoges, pour 3 affaires de viol et une tentative de braquage, Marc, juré lors d’une précédente session, s’est confié à Nathalie Col.
Découvrir les rouages de la justice
Il n’avait jamais mis les pieds dans un tribunal. Marc dit avoir ressenti un mélange de sensations entre le fait de “découvrir quelque-chose de nouveau, les plaidoyers des avocats, les rouages de la justice ; et une part de stress, avec des faits auxquels on est pas confronté souvent“. Mais en recevant la convocation, c’est avant tout à la gestion du temps qu’il a pensé, par rapport à son activité professionnelle, pour savoir comment se libérer !
Un débat très libre entre jurés
La prise de conscience intervient au fil du procès. Au début, “le président du jury nous a vraiment expliqué dans le détail le processus et nous a dit de raisonner en notre âme et conscience“, raconte Marc, qui se souvient d’un très bon accompagnement : “on a des repères, on nous donne les peines encourues selon les faits“. Mais “chacun est libre de donner son opinion et sa peine, et de défendre son point de vue“, tient-il à rappeler, “on délibère, on vote à plusieurs reprises pour tenter de trouver la peine la plus juste, et ne pas avoir le sentiment de faire une erreur“.
“La réalité dépasse la fiction !
Au final, Marc a changé de regard sur le fonctionnement de la justice. “De l’extérieur, on se dit que ce n’est pas toujours bien fait, et quand on participe, on voit que la décision est prise de manière unanime“. Ce qui l’a surtout frappé, ce sont les histoires de vie souvent difficiles racontées aux Assises. “Malheureusement, on découvre la misère qui nous entoure (…), la réalité dépasse parfois la fiction, il y a des vies qui sont vraiment difficiles“. Et il retient l’idée “de ne pas juger au premier regard, d’être parfois moins sévère, car il y a une histoire derrière chaque affaire“.
Réécoutez l’interview de Marc en intégralité ici.
C’est un témoignage rare, et qui restera anonyme : celui d’un juré d’Assises. Marc a été tiré au sort il y a quelques mois pour participer à un jury populaire à la Cour d’Assises de la Haute-Vienne. Une expérience qui a changé son regard sur la justice.
Le premier juré du procès en appel de l’affaire de la petite Fiona a publié un commentaire sur la page Facebook d’une avocate…
- Tirés au sort, les jurés d’assises sont soumis au secret.
- L’un d’entre eux a commenté le procès de l’affaire de la petite Fiona en octobre.
- La défense des deux accusés s’en est émue.
Il n’a pas donné son avis sur le fond de l’affaire. Juste sa « frustration » que le procès en appel de Cécile Bourgeon et de Berkane Makhlouf pour les violences ayant entraîné la mort de Fiona sans intention de la donner, en octobre au Puy-en-Velay (Haute-Loire), ait été interrompu avant son terme.
>> Pourquoi le procès en appel de l’affaire Fiona a été renvoyé ?
Comme l’a révélé Le Parisien mercredi, l’un des jurés ayant été désigné pour ce procès d’assises a publié un commentaire sur la page Facebook d’une des avocates de la partie civile quelques heures après le renvoi de l’audience. 20 Minutes revient sur les obligations des jurés d’assises…
- Qui peut être désigné juré d’assises ?
Toutes les personnes âgées de 23 ans ou plus. Les jurés d’assises sont tirés au sort à partir des listes électorales. Une fois désigné pour siéger, impossible d’y déroger à moins d’invoquer « un motif grave (maladie, surdité, enfant handicapé…) », comme le rappelle le ministère de la Justice dans un guide pratique.
Ceux qui ne se déplacent pas à l’audience en sont pour leurs frais. Le fait de ne pas se présenter sans motif légitime peut être puni par une amende allant jusqu’à 3.750 euros. Et les magistrats ne plaisantent pas avec ça. Lors du procès en appel de Fabienne Kabou, à Douai (Nord), en septembre, l’un des jurés qui n’avait pas fait le déplacement a été condamné à 1.200 euros d’amende.
- A-t-il le droit de parler du procès avec ses proches ?
Difficile de ne pas raconter sa journée quand on rentre chez soi le soir. En revanche, les présidents de cours d’assises recommandent aux jurés de ne pas parler de l’affaire à tort et à travers qu’ils ont à juger. Et donc surtout pas sur Facebook.
« Ils n’ont pas de contacts avec les avocats de la procédure en cours ni avec les représentants du ministère public, poursuit Clarisse Taron. Dans les petites villes, on leur recommande même, le midi, de se faire livrer une pizza au palais de justice plutôt que d’aller au restaurant où ils pourraient croiser certaines parties au procès. »
- Doivent-ils suivre l’intégralité des débats ?
Évidemment. Un juré à l’obligation d’être attentif à ce qu’il se dit lors du procès. On lui fournit du papier et un crayon pour prendre des notes. Et l’alimentation a son importance quand les journées sont longues et chargées. « Je me souviens d’un président qui recommandait aux jurés de manger léger le midi pour éviter de s’endormir à 14h », raconte encore Clarisse Taron.
- Peut-il manifester son opinion ?
Absolument pas. Un juré se doit d’être « indépendant, neutre, impartial et objectif », précise le guide pratique du ministère de la Justice. Il ne doit donc manifester aucune émotion lors des débats même si certains avocats rompus à l’exercice parviennent, d’un regard, à savoir quel juré leur est acquis, ou pas.
La discrétion est donc la norme. « Lors d’un procès, la plaidoirie d’une partie civile avait été très émouvante, raconte encore Clarisse Taron, la présidente du syndicat de la magistrature. La salle a applaudi. Et l’un des jurés a commencé lui aussi à taper dans ses mains. Il a été immédiatement remplacé. »
- Que risque un juré qui révélerait le secret d’un verdict ?
« Le secret du délibéré est absolu et éternel », rappelle Clarisse Taron. Un juré ne peut donc à aucun moment révéler ce qu’il s’est passé lors de la délibération. Quand le président de la cour annonce le verdict, il précise que l’acquittement ou la condamnation a été voté « à une majorité d’au moins 6 voix sur 9 (8 sur 12 en appel) ». De cette manière, il est impossible de retrouver les votes de chacun.
>> Un juré jugé pour violation du secret du délibéré
Cela peut coûter cher de révéler le secret. En 2010, un juré d’assises s’était permis de critiquer dans les colonnes du Parisien le verdict auquel il avait assisté. Il a écopé d’une peine de deux mois de prison avec sursis.
Le premier a été relaxé, le second devra payer une amende de 400 € avec sursis.
Dura lex, sed lex
Les deux prévenus convoqués devant le tribunal correctionnel d’Évreux jeudi avaient été condamnés à des amendes de 500 et 400 € pour les raisons évoquées ci-dessus. Ils avaient fait opposition de cette sanction prononcée par la cour d’assises et venaient s’en expliquer.
Les justifications avancées par chacun des mis en cause étant parfaitement recevables, le ministère public a tempéré le fameux Dura lex, sed lex, la loi est dure mais c’est la loi, en relaxant le premier et en incitant le second à être plus vigilant : il a été condamné à payer une amende de 400 € avec sursis.
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