En un rien de temps, l’audience avait dérapé. Nous étions le 16 mars 2009, le tribunal correctionnel de Béziers avait décidé de renvoyer à plus tard l’examen d’une affaire de cambriolage présentée en comparution immédiate (1). Et deux prévenus venaient d’apprendre qu’ils allaient devoir attendre le procès en prison, le troisième étant, lui, placé sous contrôle judiciaire.
Une annonce accueillie, ce jour-là, dans un brouhaha en salle d’audience. Le frère d’un des jeunes placés sous mandat de dépôt se leva, se rapprocha de la porte, et gratifia le tribunal de ces mots : « Bande d’enc…., fils de p… ». Le président du tribunal ordonna son interpellation. Mais le jeune parvint à s’évaporer, protégé dans sa fuite par le prévenu placé sous contrôle judiciaire qui fit barrage

à la police, avant de fermer les portes et prendre, lui aussi, la poudre d’escampette. L’affaire fit grand bruit, posant même la question de la sécurité du tribunal (Midi Libre des 16 et 18 mars derniers) .
Elle a trouvé son épilogue, hier, avec une nouvelle comparution immédiate, celle du Biterrois de 19 ans qui avait injurié les magistrats. Celui-ci a été identifié sur photos et retrouvé par la police. Et, alors que son frère a récemment bénéficié d’une relaxe, c’est lui qui a comparu, cette fois, devant le tribunal. Un tribunal composé avec soin pour éviter la présence des cinq magistrats insultés, parmi lesquels se trouvaient les deux principales figures du palais de justice, le président du TGI, François Mallet et le procureur de la République, Denis Mondon.
A l’audience, aucun juge ne s’est constitué partie civile. Mais, rien à dire, cette fois, le Biterrois se tient à carreau. « Aujourd’hui, avec le recul, vous en pensez quoi de votre comportement ? », interroge la présidente, Claire Ougier. Celui-ci rappelle son incompréhension, ce jour-là, concernant le traitement réservé à son frère. « J’étais énervé. Il n’avait rien fait. Mais j’ai regretté juste après. » Regrets réitérés à la barre. « En insultant des personnes qui représentant la juridiction, vous insultez la justice et vous troublez la sérénité des débats », martèle Chérif Chabbi, pour le ministère public, en s’étonnant de son attitude et de son absence de sang froid pour un militaire. Ses réquisitions : trois mois de prison avec sursis. Mais le Parquet souhaite surtout voir la condamnation inscrite sur son casier.
La mesure pourrait entraîner sa révocation de l’armée. Elle sera en ligne de mire de la plaidoirie de la défense. Me Bouveron souligne que le prévenu, qui affiche un casier vierge, a peut-être eu « une enfance difficile, qui ne lui a pas permis d’avoir tous les repères nécessaires ». Or, des repères, l’armée pourrait justement lui en apporter, argue la défense. « Il s’est excusé, il a regretté. La leçon est faite. Il est primordial de lui laisser poursuivre sa carrière. » Des arguments entendus par le tribunal. Le Biterrois a été reconnu coupable, mais il sera exceptionnellement dispensé d’inscription sur le casier. Il vivra désormais avec une peine de trois mois de prison avec sursis en guise d’épée de Damoclès, mais ses gradés n’en sauront rien.

(1) Le vol de nombreux produits perpétré dans la boutique SFR des Trois-Six à Pézenas, pour lequel les prévenus ont finalement été relaxés le 24 avril dernier, en raison d’un manque de preuves.

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