assises de meurthe-et-moselle
Au terme de trois heures de délibéré, les jurés de la cour d’assises ont condamné Tony Delacre à une peine de 15 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Joseph Gatt et les tentatives sur les deux frères de la victime. L’avocat général avait réclamé 18 ans.
Enfin. Il aura fallu six ans, soit 2 000 jours, pour que l’on se retrouve devant vous ». Me Janick Languille, un des conseils de la famille Gatt, partie civile, prend la parole le premier pour s’interroger sur la lenteur de la justice. Joseph Gatt, 28 ans, est tué par son cousin Tony Delacre d’une balle dans la fesse, le 8 juillet 2003, au camp des gitans du Casse-fonte à Homécourt. La famille de la victime a patienté tout ce temps avant de se retrouver à la cour d’assises. «Le père de Joseph a dû écrire au président de la République et au garde des Sceaux pour être entendu trois ans après le crime », déplore l’avocat spinalien.
«Ce crime est un crime d’orgueil », estime Me Eric Dupond-Moretti, le second conseil de la famille Gatt. «Le couteau que vous invoquez, votre propre mère ne l’a pas vu, il existe dans votre imaginaire parce que cela vous arrange ». Pour lui, l’intention homicide ne fait aucun doute. «Il tire à dix mètres dans le dos d’un homme avec une arme chargée de balles pour le gros gibier. A dix mètres, on fait mouche, si ce n’est pas une intention homicide, dites-moi ce que c’est. Tirer dans le dos d’un homme est un crime de lâche, le présenter comme un accident est une défense de lâche », assène Me Dupond-Moretti.
Dans un réquisitoire resserré sur une demi-heure, Gueorgui Varbanov, l’avocat général, constate que «dans cette affaire, il y a beaucoup de blancs, de questions sans réponse, on reste sur sa faim ». Puis il livre «son intime conviction » pour expliquer ce crime qu’il qualifie également «d’orgueil, on est allé volontairement jusqu’au bout ». Il ne veut pas entendre parler de coups mortels «avec une arme de cette puissance ». Il réclame contre Tony Delacre «18 ans de réclusion criminelle et ce n’est pas cher payé pour un meurtre ».
«Sensibilité d’un lavabo»
«Parce qu’il ne réagit pas, vous croyez qu’il a la sensibilité d’un lavabo ? Laissons les apparences de côté », entame Me Jean-Yves Liénard, l’avocat de Tony Delacre, dans une défense subtile. D’abord, il dissèque le climat de «peur panique » qui régnait dans la famille de l’accusé. «S’ils déménagent, c’est pour qu’on leur fiche la paix. Lorsque les Gatt viennent sur leur terrain, c’est un défi, une sorte de provocation. La peur authentique, c’est le fond de ce dossier ». Ensuite, il délivre son doute sur l’intention homicide, «l’arme est tenue à la hanche, la zone touchée est non vitale ». Logiquement, il sollicite la requalification en coups mortels. Enfin, après un hommage appuyé à la famille de la victime, il conclut en rappelant que Tony Delacre, libre depuis trois ans, a «fait le meilleur usage possible de cette liberté. Il est marié, il a des enfants, il travaille. Il doit retourner en prison mais avec l’espérance d’entrevoir le bout du chemin ».
Après l’énoncé du verdict qui n’a satisfait ni les parties civiles ni la défense, Tony Delacre est reparti derrière les barreaux. Son avocat envisage de faire appel.
M.-O. N
Publié le 05/03/2009
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