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L’affaire dormait dans un tiroir du tribunal depuis… le 5 juillet 2007. C’est pourtant sous le régime de la comparution immédiate que Walid N. était, hier, devant le tribunal correctionnel de Lille. Plongée dans un imbroglio procédural.

Tout commence le 20 mai 2007 à Lille-Fives. Trois individus sont interpellés par les services de police, paquets de cigarettes, jeux à gratter et autres produits sous le bras. Ils viennent de visiter un bureau de tabac.

Quand on lui demande de décliner son identité, l’un des individus affirme se prénommer Ali. Il écope alors de six mois de prison avec sursis. Le 5 juillet de la même année, Walid N. est arrêté pour vol. Sauf que… les policiers découvrent que l’individu qui se trouve devant eux et celui qu’ils ont arrêté deux mois plus tôt, sont une seule et même personne. Le jeune homme avoue : « En mai, j’avais donné le prénom de mon frère. » Il est jugé pour usurpation d’identité et écope de deux mois de prison ferme.

Pour une raison que l’on ignore, Walid N. n’est convoqué au tribunal correctionnel de Lille que le 26 juin 2009 pour les faits de vol, dans le cadre d’une comparution immédiate. Soit deux ans et demi après les faits. Une situation qui laisse Me Pianezza, l’avocat de la défense, pantois : « C’est un loupé. Procéduralement, il faut rectifier le tir. » Le tribunal a condamné Walid N., hier, à deux ans de prison, intégralement assortis du sursis avec mise à l’épreuve. •

HEDWIGE HORNOY

La Voix du Nord

Quatre individus ont été jugés hier après avoir voulu se faire justice eux-mêmes dans le quartier de Laden

C'est dans le quartier de Laden que quatre individus dont la famille a été victime d'un vol de bijoux, vont venus s'en prendre à ceux que la rumeur publique désignait comme les voleurs. Photo DDM, archives

C'est dans le quartier de Laden que quatre individus dont la famille a été victime d'un vol de bijoux, vont venus s'en prendre à ceux que la rumeur publique désignait comme les voleurs. Photo DDM, archives
C’est dans le quartier de Laden que quatre individus dont la famille a été victime d’un vol de bijoux, vont venus s’en prendre à ceux que la rumeur publique désignait comme les voleurs. Photo DDM, archives

Régler ses comptes par la violence, ce n’est pas comme cela qu’on arrange les situations. Au contraire. Parce qu’il veut « la paix dans les quartiers », le vice-procureur de la République Philippe Mao a souhaité une comparution immédiate hier devant le tribunal de Castres pour quatre prévenus soupçonnés de violences aggravées.

L’affaire remonte au début de la semaine dernière. Tout commence par un cambriolage commis au domicile d’une famille installée à Lameilhé. Et ce sont essentiellement des bijoux de famille qui sont volés. Une valeur inestimable pour cette famille dont quatre membres vont organiser une expédition punitive au domicile de personnes qui sont désignées comme coupables par la rumeur qui court Lameilhé. Ce sont ces quatre personnes, deux oncles et deux neveux des victimes du vol, qui comparaissaient hier alors que, pour l’instant, les auteurs du cambriolage n’ont pas été encore identifiés par la Police.

Mardi dernier, ils se sont rendus dans plusieurs domiciles de ceux qu’ils pensaient être leurs voleurs, dans le quartier de Laden, et ont donné des coups de poing et de bâtons. Cinq personnes ont été légèrement blessées lors de cette expédition vengeresse.

A la barre du tribunal hier, le vice-procureur n’a pas mâché ses mots : « Si le quartier de Laden est agressé injustement, il est normal que la justice fasse respecter notre ordre républicain. Ce quartier mérite autant, si ce n’est plus, d’attention quand il y a des victimes. Voilà le sens de la comparution immédiate de ce jour. » Une audience peu ordinaire puisque cette affaire n’a pas été jugée sur le fond, les victimes de l’agression n’ayant pas été avisées régulièrement. La présidente du tribunal, Marie-Paule Menu a donc rappelé les faits. « Dans ce dossier, même s’ils minimisent les violences ou discutent du nombre de gifles ou de coups, il n’empêche que les 3 prévenus reconnaissent les violences. Sauf le quatrième, dont le rôle se serait limité à arrêter les agresseurs. »

Le parquet a aussi rappelé : « Les personnes accusées de vol ont aussi été placées en garde à vue en fin de semaine mais elles ont été relâchées faute de preuves. »

Pour Me Eliane Gazan, l’avocate de la défense, « mes clients ont tous reconnu avoir commis une erreur, on doit leur laisser une chance de ne pas perdre tout ce qu’ils ont réussi dans la vie jusqu’à présent. »

Cette affaire est renvoyée au 16 juillet pour être jugée définitivement. Jusqu’à cette date, les 4 prévenus sont placés sous contrôle judiciaire, avec l’interdiction de séjourner à Castres et d’entrer en relation avec les victimes.

Sylvie Ferré

Les avocats des quatre jeunes majeurs impliqués dénonçaient hier « une parodie de justice ». (PHOTO R.G.)
Les avocats des quatre jeunes majeurs impliqués dénonçaient hier « une parodie de justice ». (PHOTO R.G.)
CAMBRIOLAGES EN SÉRIE. Quatre jeunes passaient en comparution immédiate hier. Leurs avocats dénoncent une procédure trop rapide. L’affaire a finalement été renvoyée

Surprise hier à Marmande : quatre des jeunes majeurs impliqués dans l’affaire des cambriolages en série, et interpellés mercredi (lire nos précédentes éditions) passaient en comparution immédiate. Au grand soulagement de leurs avocats, à la demande de la présidente Braud, l’affaire a été renvoyée au 30 juillet. Elle n’a finalement pas été jugée sur le fond et il a été décidé de laisser les quatre jeunes gens libres, sous contrôle judiciaire, jusqu’à cette date (lire par ailleurs).

Il n’empêche, la décision du parquet de les juger en comparution immédiate, a provoqué stupeur et colère chez leurs avocats, Franck Dupouy, Stéphanie Gouzes et Yann Delbrel. Au vu de l’ampleur du dossier, des dizaines et des dizaines de vols commis depuis juillet 2008, ils ne s’attendaient pas une telle promptitude et dénonçaient, avant l’audience, « une parodie de justice ».

Trop rapide pour la défense « Le dossier fait un mètre de haut.

On nous l’a communiqué à midi, pour une audience prévue à 14 heures, se désolait Stéphanie Gouzes. Nous avons à peine eu le temps de discuter avec nos clients. Comment voulez-vous défendre correctement quelqu’un dans ces conditions ? »

Les trois avocats pensaient qu’il y aurait une instruction, cette procédure pendant laquelle le juge d’instruction examine les éléments à charge et à décharge. Dans un cas comme celui-ci, « cela aurait pu prendre environ un an », estiment-ils, et ça leur aurait laissé le temps d’examiner de près les centaines de pièces du dossier.

Le parquet d’Agen a semble-t-il vu dans cette option procédurale une alternative pertinente à une phase d’instruction qui aurait pu durer de longues années, tout en sachant pertinemment que les avocats allaient demander un délai pour préparer leurs défenses.

Les trois avocats marmandais, eux, ont une tout autre idée sur la question. « C’est parce que le tribunal de Marmande va fermer en fin d’année. Pour cette raison expliquent-ils, depuis près d’un mois environ, on ne fait plus d’instructions ici, c’est trop long. »

« Pour la même affaire, dans un tribunal qui va rester ouvert, ou ici il y a encore un ou deux ans, il y aurait eu une instruction », commente furieux Franck Dupouy. Et l’ancien bâtonnier de Marmande, d’ajouter : « Quelle que soit la gravité des faits, ils ont droit à une défense digne de ce nom. On ne peut pas juger différemment d’un tribunal à l’autre pour de simples raisons administratives. »