Le journal qui diffuse en langue kurde, Azadiya Welat, est interdit de parution pour un mois pour “propagande en faveur d’une organisation terroriste”. Une décision prise au regard des pages 1,2,3,4,5,6 et 8 du journal. Outre la censure, l’incrimination des articles p. 8 portant sur les EU et le président Obama est assez inquiétante et alarmante. La pratique révèle un système judiciaire répressif et arbitraire qui applique ces décisions sans réelle motivation et un deux poids deux mesures constant dans la République démocratique de Turquie.
Les motivations extravagantes de la Cour:
La Cour d’assises d’Istanbul a décidé d’interdire pour un mois la diffusion du seul journal kurde en Turquie. Sur la base des articles p. 1,2,3,4,5,6 et 8, la Cour a jugé que le journal Azadiya Welat faisait la propagande d’une organisation terroriste. A l’intérieur de ces pages: un reportage chez la famille de Mustafa Dağ, assassiné par la police turque lors de la marche d’Amara, un article qui traite de la visite de Mr Öcalan par ses avocats, des annonces commémoratives, des remerciements formulés par les maires élu(e)s du DTP ainsi que deux articles, page 8, portant sur les Etats – Unis et leur président Mr Obama: ”Le socialisme se renforce aux Etats – Unis“ et “Obama ne fait qu’embellir l’image des EU“. Les articles précités sont incriminés par la Cour d’assises et lui servent de motifs pour interdire le journal kurde pendant un mois.
Le système judiciaire turc sous le joug d’une idéologie répressive:
Les décisions judiciaires de ce type sont systématiques dans la République démocratique de Turquie. Elles servent à réprimer les forces d’oppositions kurdes et étouffer leurs revendications. Elles servent à assurer la protection de l’Etat contre le soulèvement de ces victimes. Elles exonèrent l’Etat de ces responsabilités, le protègent de toute critique. Etant sous le joug d’une idéologie xénophobe, répressive, militariste inscrite dans la Constitution turque (1982) imposée par les militaires, le système judiciaire turc est alors lui même xénophobe, répressif, oppressif dont le but premier n’est pas la Justice mais la protection de l’Etat. Raison pour laquelle les victimes de l’Etat n’ont jamais pu franchir les portes des tribunaux turcs et engager la responsabilité pénale des fonctionnaires, des militaires… etc auteurs de graves fautes et délits. Raison pour laquelle, des milliers de “citoyens” sont condamnés pénalement, considérés comme terroristes pour s’être opposé au régime politique. Raison pour laquelle les journaux kurdes et turques qui s’opposent à l’idéologie dominante sont systématiquement censurés sur la base de motivations insignifiantes.
En l’espèce, la Cour d’assises d’Istanbul, dans la pure logique du système politico judiciaire turque, considère le PKK comme une organisation terroriste, Mr Öcalan comme un très grand terroriste, le DTP (parti politique pro-kurde) comme une formation politique terroriste et leurs sympathisants comme terroristes. Elle censure alors “pour propagande en faveur d’une organisation terroriste” le journal kurde dès lors qu’il parle d’Öcalan, du DTP, du PKK et de ces sympathisants. Au regard de la décision, il semblerait que l’évocation du président Obama soit également et désormais source de propagande terroriste.
Un deux poids, deux mesures, une constante en Turquie.
On aurait tendance à penser que les lois sont les mêmes pour toutes. Qu’elles ont vocation à s’appliquer sur l’ensemble de la population vivant sur le territoire turc. Que les “citoyens” sont égaux devant la loi. Seulement, se serait faire dans l’optimisme. Les lois turques, quand elles sont supplétives pour les uns, sont impératives pour les autres. Une constante en Turquie.
En l’espèce, les journaux turcs peuvent évoquer Öcalan, le DTP, le PKK et les manifestants kurdes sans être systématiquement inquiétés par la censure. La rédactrice en chef du journal Azadiya Welat, Emine Demir, dénonce à ce titre, outre le caractère anti démocratique, le caractère discriminatoire de la décision. “Ces derniers temps, même les députés de l’AKP déclarent qu’il faut entamer un dialogue avec le PKK. Tous les journaux reprennent les photos et les discours d’Öcalan. Il est donc tout à fait normal que nous publions nous aussi les déclarations d’Öcalan pour en informer nos électeurs. C’est une décision anti- démocratique” a-t-elle ainsi déclaré.
A noter que la Cour d’assises d’Istanbul a condamné, le même jour, le nouvel hebdomaire, Özgür Mezopotamya, pour les mêmes motifs. Sur près de 8 pages, la Cour a censuré 7 pages. On pouvait y lire un reportage sur les famille de Mr Mustafa Dağ et Mr Mahsun Karaoğlan et un article relatif aux puits de la mort qui se situent à Cizre et Silopi (Sirnak). A comprendre donc qu’il est interdit de parler des victimes de l’Etat. Deux poids deux mesures là encore puisque qu’une telle décision ne s’applique pas aux journaux turcs de masses qui évoquent les puits de la mort et les victimes de l’Etat sans être inquiétés…
Source: ANF
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