Les juges du tribunal correctionnel de Rodez ont essayé, en vain, de comprendre le parcours hors du commun d’E.D., présenté hier après-midi dans le cadre d’une comparution immédiate. « Vous connaissez bien la géographie du pays. Votre mode de vie depuis les années 80 c’est la rapine, vous avez été condamné par toutes les juridictions de France et de Navarre », lui a lancé la présidente Peybernes. Trois décennies en effet que cet homme de 50 ans, sans domicile fixe et qui s’est coupé de la société, commet des vols et conduit sans permis. Une errance organisée : il roule avec des véhicules volés, diesel de préférence pour pouvoir les approvisionner plus facilement avec du gasoil siphonné dans les réservoirs de camions ; il vole les annuaires des départements qu’il traverse

pour trouver des campings où se doucher et se raser ; s’introduit chez les gens pour dérober quelques tranches de jambon, une bouteille d’eau ou un paquet de sucre dans la cuisine et du linge propre qui sèche sur l’étendoir du jardin… Le casier judiciaire d’E.D. est long : trente condamnations en trente ans devant trente juridictions différentes. Libéré en juin dernier, après 61 mois cumulés d’emprisonnement, il reprend aussitôt sa vie de vagabond voleur et se fait interpeller le 6 août, sans permis, au volant d’un véhicule volé, à Lédergues. Pourquoi persister dans cette voie sans issue ? Sans parents, amis, compagne, pas même un chien ou un chat, le prévenu vit seul et reste là, muré dans son silence sur le banc des accusés. Intrigué, le tribunal n’obtient pas de véritables réponses à ses questions.
La plaidoirie de son avocate, Me Montels, elle aussi stupéfaite par le comportement de son client, apporte quelques éléments de réponse. Petit, E.D. a connu les familles d’accueil. Lorsqu’il retrouve sa mère, à l’âge de 6 ans, elle a épousé un homme qui le rejette, le traite de petit « Boche » à cause de la sonorité germanique de son nom. A 18 ans, après avoir déserté deux fois l’armée et subit les suicides successifs de sa mère et de son père, il entame son tour de France, un « suicide social » comme il le qualifie lui-même. « Il n’est pas violent, c’est un détenu modèle qui n’a pas connu une seule commission disciplinaire en trente ans », a souligné Me Montels. « Tendez-lui la main, donnez-lui cet espoir qu’il attend ». Le ministère public, représenté par Eric Camous, a requis à son encontre deux ans d’emprisonnement et son maintien en détention.
E.D. a été condamné à deux ans d’emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve de trois ans, obligation de soins et de fixer un domicile. Centre Presse

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