Conflit . Rabat maintient la pression sur les territoires occupés, niant aux Sahraouis le droit à l’autodétermination. Retour sur un procès « pour l’exemple ».

Quinze ans de prison ferme. C’est la peine que devra endurer Yahya Mohamed Elhafed Iaaza, à l’issue d’une parodie de procès qui s’est déroulée le 24 juin dernier. Onze autres militants sahraouis ont été condamnés à de lourdes peines par la cour d’appel d’Agadir. Âgé de quarante-trois ans, Yahya Mohamed Elhafed Iaaza est accusé d’avoir participé à une manifestation dans la ville de Tan Tan, au sud-ouest du Maroc, au cours de laquelle un policier a trouvé la mort. Dans le calme, les participants revendiquaient le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance, conformément aux résolutions onusiennes. Depuis mai 2005, la population sahraouie des territoires occupés illégalement par le Maroc mène pacifiquement un soulèvement populaire contre la colonisation. Yahya a toujours nié avoir participé à cette manifestation. Lors de son procès, un témoin a d’ailleurs expliqué qu’il se trouvait avec lui au moment des faits reprochés, loin du lieu du drame. C’est dire si la condamnation paraît disproportionnée. Et ce d’autant plus que le chef d’accusation pour meurtre n’a pas été retenu par les juges. Huit autres prévenus ont écopé de peines allant de un an à quatre ans de prison. Arrêtés depuis le 28 février 2008, les douze Sahraouis ont toujours nié les faits qui leur sont reprochés. En signe de protestation, ils avaient poursuivi une grève de la faim.

Depuis le début du soulèvement populaire, les manifestations pour le droit à l’autodétermination sont violemment réprimées par la police. Michèle Decaster, présidente de l’Association française d’amitié avec les peuples d’Afrique, a rapporté que, ce 24 juin 2009, lors du procès en appel, les douze prévenus ont dénoncé les « tortures, viols et brutalités dont ils ont été victimes depuis leur arrestation ». Mais les autorités leur ont toujours refusé le droit à des expertises médicales. Les peines prononcées en première instance ont même été alourdies en appel, certaines allant jusqu’à quinze ans de prison.

Les accusés n’ont jamais pu bénéficier du statut de – prisonniers politiques. Un exemple de plus qui démontre qu’au Sahara occidental occupé, le droit international est sans cesse violé. Le peuple sahraoui se voit privé de la liberté d’expression, d’association et de manifestation. Quant au droit à l’autodétermination, pourtant préconisé par l’ONU, il est constamment refusé par Rabat. Au terme de plusieurs séjours sur place, Michèle Decaster fait état de viols, de disparitions et cas de torture des militants de la cause sahraouie qui sont régulièrement condamnés. Les défenseurs des droits de l’homme au Sahara occidental témoignent d’un harcèlement constant de la part des autorités marocaines et ce, dans le plus grand silence de la communauté internationale. Un mutisme qui permet au pays colonisateur d’intensifier ses intimidations.

La nouvelle politique de Barack Obama dans la région rompra-t-elle avec celle de ses prédécesseurs ? Alors que George W. Bush soutenait ouvertement la proposition d’autonomie défendue par le Maroc, le nouveau président des États-Unis se montre plus prudent, laissant carte blanche à Christopher Ross, l’émissaire spécial onusien pour le Sahara occidental. Ce dernier a annoncé la tenue d’une réunion informelle à la fin juillet à Vienne entre le Maroc et le Front Polisario (mouvement de libération du Sahara occidental) pour relancer les – négociations aujourd’hui au point mort.

Valentine Lecluse

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