ANTANANARIVO (AFP) — Le président évincé de Madagascar Marc Ravalomanana a été condamné mercredi par contumace à quatre ans de prison pour “conflits d’intérêts” dans l’achat fin 2008 d’un avion présidentiel qui avait cristallisé l’opposition à son régime et contribué à sa chute.

“Il a été condamné à quatre ans de prison et à 70 millions de dollars de dommages et intérêts à l’Etat malgache. (…) Il y a des conflits d’interêts. Il a mélangé l’argent personnel et l’argent de l’Etat”, a déclaré à l’AFP à Antananarivo la ministre de la Justice de la Haute Autorité de transition (HAT) Christine Razanamahasoa.

“S’il met le pied sur le territoire malgache, le mandat d’arrêt sera exécuté”, a-t-elle ajouté.

“C’est la première condamnation mais il y a d’autre dossiers en cours”, a averti la ministre.

L’ancien ministre des Finances et du Budget, Haja Razafinjatovo, a également été condamné à quatre ans de prison et à payer solidairement les 70 millions de dollars pour son implication dans l’acquisition de “Force One II”, un Boeing 737-700 acheté fin 2008 pour 60 millions de dollars.

Lors de la réception de l’avion le 5 janvier, M. Ravalomanana avait insisté sur la nécessité de doter le pays, l’un des plus pauvres de la planète, de cet appareil de 25 places, son acquisition relevant selon lui “d’une priorité nationale”.

Madagascar est plongée depuis fin janvier dans une grave crise politique qui a entraîné la mort de plus d’une centaine de personnes.

Lâché par l’armée, M. Ravalomanana avait remis le 17 mars ses pouvoirs à un directoire militaire qui les avait immédiatement transférés à Andry Rajoelina, alors chef de l’opposition et actuellement à la tête de la HAT.

Depuis, les partisans du président évincé réclament son retour au pouvoir.

M. Rajoelina, 35 ans, s’était imposé fin 2008 comme le principal opposant au régime Ravalomanana, se faisant le porte-voix des frustrations de la population de ce pays très pauvre de l’océan Indien.

Alors maire d’Antananarivo, M. Rajoelina avait fait de l’achat de ce deuxième avion présidentiel un symbole de la dérive du pouvoir de M. Ravalomanana, déjà considéré par une partie de la population comme coupé des réalités et affairiste.

La coûteuse acquisition avait également fait sourciller les principaux bailleurs de fonds du pays (FMI, Banque Mondiale, UE, etc) qui, pour justifier la suspension fin décembre du versement de leur aide budgétaire, évoquaient entre autres un “achat décidé par la présidence”.

A peine arrivé au pouvoir, M. Rajoelina avait d’ailleurs annoncé parmi ses premières mesures la mise en vente de l’appareil.

La condamnation de M. Ravalomanana, actuellement en exil en Afrique du sud où il tente de rallier des soutiens internationaux, risque de plonger le pays un peu plus dans l’impasse.

De laborieuses discussions censées dessiner l’architecture de la transition, sous l’égide de la communauté internationale, pourraient ne pas survivre à l’interdiction de facto de retour au pays pour l’ancien président et homme d’affaires accompli.

La situation n’en demeure pas moins précaire pour le pouvoir en place: l’UA a suspendu Madagascar de ses instances, estimant que le pays avait été victime d’un changement anticonstitutionnel de gouvernement. Les Occidentaux ont condamné ce qu’ils considèrent comme un “coup d’Etat”.

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