Un homme de 41 ans, condamné pour assassinat à 20 ans de prison par la cour d’assises de Côte d’Or, a été acquitté vendredi soir en appel par la cour d’assises de Saône-et-Loire, a indiqué son avocat Me Eric Dupont-Moretti.
Jean-François Macri avait été condamné à Dijon en première instance à 20 ans de prison, pour la mort avec préméditation de son ami, Eric Vermenot, 25 ans, dont le crâne et quelques ossements avaient été retrouvés, en février 2004, dans un bois à Fernay, près de Dijon.
La victime qui venait de bénéficier d’une libération conditionnelle dans une affaire de trafic de drogue, avait disparu du domicile de sa mère le 25 juillet 2003, alors qu’il n’était vêtu que d’un short et qu’il était parti sans argent, sans clefs, ni téléphone portable.
Les restes de son corps n’avaient été identifiés qu’à «50%» selon certains experts. L’accusation s’appuyait principalement sur les relevés téléphoniques de l’accusé, qui «entre le 24 et le 26 juillet 2003» avait passé «22 appels à la concubine de M. Vermenot,» dont deux localisés près des lieux de la découverte du corps.
«Ce dossier était complètement vide et mon client n’a pas cessé de clamer son innocence dès son arrestation et son incarcération» le 15 mars 2006, a affirmé Me Dupont-Moretti.
Lors de l’audience d’appel, vendredi à Chalon-sur-Saône, l’avocat général a requis une peine de 10 ans de prison. Les jurés ne l’ont pas suivi et ont prononcé l’acquittement de M. Macri.
SOURCE
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assises. Me Dupond-Moretti plaidait hier à Chalon.
Dupond-Moretti, un virtuose dans le prétoire
Pas question de le déranger dans les dix minutes précédant sa plaidoirie -il se concentre en déambulant tête baissée- ni dans les dix minutes après, il décompresse. Pendant, c’est un régal. On imagine que Me Eric Dupond-Moretti, 48 ans, du barreau de Lille, a dû saliver à la lecture du dossier de Jean-François Macri -condamné à 20 ans à Dijon pour assassinat- qu’il défendait hier en appel à Chalon. Le dossier affichait, selon le ténor du barreau, un « vide abyssal » qui lui a fait plaider l’acquittement. On peut faire confiance à « l’ogre » -comme il est parfois qualifié- pour enfoncer le coin du doute dans la tête des jurés. Et pour bousculer l’accusation autant que les avocats de la partie civile.
Il impose sa présence
Avant de plaider, pendant les trois jours du procès, le bretteur marque ses adversaires à la culotte. Même quand il n’a pas la parole, on le voit marmonner pour signifier qu’il n’est pas d’accord, lever les yeux au ciel, hausser les épaules à chaque tentative de l’avocat général de muscler un indice, un début de preuve. Dupond-Moretti, carrure de taureau, bouc envahissant, ne laisse rien passer et en impose par sa stature. Son sens du geste est parfait. C’est tout son corps qui parle quand sa bouche se tait. Telle est sa façon de faire comprendre aux jurés que lorsque l’accusation parle, il y a de quoi douter, que ce qui est dit est loin d’être parole d’évangile, que telle affirmation est gratuite.
Le pénaliste lillois s’est taillé une réputation nationale lors du procès d’Outreau avec l’acquittement de la boulangère Roselyne Godard. Un avocat en réussit un ou deux dans une carrière, lui approche des 80 acquittements !
Dupond-Moretti, c’est la défiance systématique, la force de la conviction, le verbe populaire, l’effet de manche sans le cabotinage, l’image qui fait mouche. « Pour un homicide involontaire -celui de Lady Diana- on a contrôlé 21 000 fiat Uno et pour un assassinat, vous n’explorez pas les pistes des autres suspects ? » lance-t-il dans sa plaidoirie pour saper le travail des enquêteurs.
Un procureur renvoyé dans les cordes
« C’est un vieux routier, il a de l’expérience, il sait tout de suite déceler les points faibles d’un dossier d’accusation » admet le président Theurey de la Cour d’assises hier. L’avocat général Rode en prendra pour son grade. Doutant que Macri ait tenu le pistolet, il ne requiert « que » dix ans de réclusion. Le défenseur n’hésite pas à lui rentrer dans le lard, s’amuse des « soldes judiciaires à Chalon » pour mieux s’en indigner, bien sûr.
Au dernier rang, des avocats du barreau de Chalon sont venus écouter le virtuose, prendre une leçon d’efficacité. « Pour nous, c’est très formateur d’observer la façon dont il démonte une accusation » dit Laurence Grenier-Guignard. « Il parle simple, sait s’adapter, tout le monde le comprend. Il alterne les moments de calme et les moments forts…» Pour l’avocat, l’instant le plus fort s’est sans doute passé tandis qu’il se taisait. À 19 h 20, lorsque l’acquittement a été prononcé. Un de plus…
THIERRY DROMARD
Publié le 28/11/2009
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