Au tribunal de Munich, l'histoire rocambolesque de la femme la plus riche d'Allemagne contre "le gigolo" suisse

Compte rendu
LE MONDE
BERLIN CORRESPONDANCE
C’est un procès qui fait le bonheur de la presse à scandales, outre-Rhin. La victime : Susanne Klatten, 46 ans, la femme la plus riche d’Allemagne, copropriétaire du constructeur BMW. Le prévenu : Helg Sgarbi, un Suisse de 44 ans, surnommé « le Gigolo » par les médias allemands.

Accusé d’avoir fait chanter plusieurs de ses fortunées maîtresses, dont Mme Klatten, M. Sgarbi risque jusqu’à dix ans de prison pour « escroquerie, tentative d’escroquerie et chantage ». Le procès s’est ouvert lundi 9 mars devant le tribunal de grande instance de Munich.

Plutôt discrète, dans sa vie privée comme pour ses affaires professionnelles, Susanne Klatten voit depuis des mois le récit de ses mésaventures sentimentales étalé à la « une » des tabloïds. L’héritière de la famille Quandt, qui possède 12,5 % de BMW et contrôle aussi le groupe de chimie Altana, est pourtant prête à témoigner à la barre contre celui qui lui aurait extorqué plusieurs millions d’euros.

Telle que présentée par l’acte d’accusation, l’affaire débute en juillet 2007, dans un centre de remise en forme des Alpes autrichiennes. Helg Sgarbi y aborde Susanne Klatten pour la première fois. Après quelques semaines, il parvient à convaincre la riche blonde aux yeux bleus, mariée et mère de trois enfants, de s’engager dans une liaison clandestine. Traducteur de métier, Helg Sgarbi se fait passer pour un conseiller spécial du gouvernement suisse, émissaire dans les zones de guerre.

Très vite, le séducteur réclame 7 millions d’euros à sa maîtresse en invoquant une histoire rocambolesque : lors d’un voyage aux Etats-Unis, il aurait percuté une fillette. Les parents de l’enfant, désormais paralysée, lui réclamerait ce dédommagement que lui-même serait incapable de fournir. Susanne Klatten accepte de jouer les pourvoyeuses et lui fait parvenir dans un carton de déménagement la somme, en liasses de billets de 500 euros.

« CASANOVA » MYTHOMANE

Les exigences de M. Sgarbi prennent une nouvelle dimension. Il demande à la milliardaire de quitter son mari et de transférer sur un compte 290 millions d’euros pour assurer leurs besoins. Elle refuse et met fin à leur liaison. Le « Casanova » mythomane se métamorphose alors pour de bon en maître chanteur sans scrupules. Il envoie à Mme Klatten des vidéos de leurs ébats, filmés à son insu.

Le marché est simple : elle doit lui verser 49 millions d’euros sous peine de voir ces images compromettantes atterrir entre les mains de son mari, de la presse et des groupes dont elle est actionnaire. L’amante abusée ne se laisse pas faire. Malgré les répercussions médiatiques que le scandale risque d’entraîner, elle porte plainte pour escroquerie. Le 14 janvier 2008, Helg Sgarbi est arrêté en Autriche.

Susanne Klatten n’est pas la seule victime du « gigolo » suisse. Trois autres femmes – toutes riches et plus âgées que lui – se seraient fait piéger selon le même modus operandi. Reste à déterminer si M. Sgarbi agissait seul. Les médias allemands affirment qu’il travaillait pour un Italien de 63 ans, Ernano Barretta, chef d’un réseau mafieux. Son nom ne figure pas dans l’acte d’accusation.

Marie de Vergès
Article paru dans l’édition du 10.03.09

| 09.03.09 | 15h00  •  Mis à jour le 09.03.09 | 17h39

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