Le Tribunal constitutionnel allemand de Karlsruhe a jugé aujourd’hui le traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 conforme à la Loi Fondamentale allemande, mais a exigé, avant que le Président de la République, Horst Köhler, signe la loi de ratification votée par le Bundestag et le Bundesrat, qu’une nouvelle loi garantissant les droits du Parlement en matière européenne soit votée. Ce qui ne devrait pas entrainer de retard dans l’entrée en vigueur de ce texte, prévue pour le 1er novembre prochain.
« Pour résumer, on pourrait dire : la Constitution dit oui au traité de Lisbonne, mais exige au niveau national un renforcement de la responsabilité du Parlement en matière d’intégration » communautaire, a expliqué le vice-président du Tribunal, Andreas Vosskuhle. En réalité, le Tribunal constitutionnel exige simplement que soient mises en œuvre les dispositions de Lisbonne renforçant les droits des Parlements nationaux. L’Allemagne dispose déjà d’une telle loi, mais le Tribunal estime qu’elle est insuffisante. Ln France, elle, a modifié sa Constitution avant de ratifier le traité de Lisbonne : les articles 88-6 et 88-7 transcrivent ces nouvelles dispositions.
La motivation de l’arrêt est particulièrement intéressante (le long communiqué du Tribunal, en allemand, est à télécharger ici. En anglais, c’est là). Le Tribunal estime, en effet, que l’Union européenne n’est pas un État fédéral, même si elle lui emprunte certains éléments, et que la démocratie continue à s’exercer, pour l’essentiel, dans le cadre des États, faute d’un « peuple européen uniforme comme sujet de légitimation pouvant exprimer sa volonté politique de façon effective ». En clair, les sujets de l’Union restent les États et non les peuples, ce qui implique que les États respectent la démocratie interne avant d’exercer en commun leur souveraineté. On peut dire que c’est presque par anticipation que le traité de Lisbonne, notamment dans ses articles 12 et 48 du traité sur l’Union européenne (TUE) et dans le protocole sur l’information des Parlements nationaux, a répondu à ces objections en organisant l’association effective des Parlements nationaux dans le processus européen.
Ce nouveau retard dans le processus de ratification ne devrait pas être dramatique. Déjà, la CDU/CSU de la chancelière Angela Merkel et le SPD se sont entendus pour réunir le Parlement en session extraordinaire à partir du 26 août afin que la loi de ratification puisse être signée le 9 septembre, soit avant le second référendum irlandais. En cas de réponse positive des Irlandais, ce que les sondages indiquent, il ne restera plus qu’aux présidents eurosceptiques polonais et tchèque à signer les lois de ratification déjà votées par leur Parlement national. Ce qu’ils ne peuvent pas, en théorie, refuser.
Cela étant, une course de lenteur n’est pas à exclure, les deux présidents (le Tchèque est élu par son Parlement, le Polonais par les citoyens) pariant sur une arrivée au pouvoir des conservateurs britanniques qui ont promis d’organiser un référendum sur le traité de Lisbonne s’il n’était pas encore entré en vigueur. Un tel refus des deux présidents europhobes serait un véritable coup d’État institutionnel puisqu’ils n’ont pas le pouvoir de refuser de signer une loi votée par leur Parlement.
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