Une loi entrant dans le cadre de la législation Coroners and Justice préoccupe grandement le PEN anglais, qui invite les éditeurs à contacter le ministère de la Justice au plus tôt. Cette dernière permettrait aux tribunaux anglais de saisir les biens d’anciens criminels qui ont été rémunérés pour avoir écrit ou parlé de leurs crimes.
Des abus, inévitablement
C’est dans une lettre ouverte publiée par le Guardian que Lisa Appignanesi, présidente du PEN, a invité les éditeurs à réagir face à ce projet de “baillonnage” des anciens criminels. Selon elle, si ce projet devient loi, il sera « sujet à des abus », immanquablement. Lord Leicester, vice-président du PEN s’est également exprimé devant la Chambre des Lords pour protester contre les projets de ce texte.
Pour les éditeurs, il serait encore temps d’intervenir, étant donné que le texte ne sera voté qu’après les vacances ; de là la nécessité d’une action rapide. Pour Robert Sharpe, du PEN, l’industrie a le temps de jouer son coup : « Nous conseillons aux personnes concernées par ce sujet de faire pression sur le secrétaire d’État à la Justice, Jack Straw ou Maria Eagle, membre du parlement, pour qu’ils revoient le projet de loi, lancent une consultation plus large, et qu’ils arrivent alors avec des propositions plus clairement définies et plus resserrées. »
Interdiction de faire de l’argent avec ses crimes
Ministres et membres de l’industrie n’auraient d’ailleurs pas suffisamment prêté l’oreille au PEN qui avait déjà lancé des avertissements voilà plusieurs mois. En outre, seuls quelques professionnels du secteur ont été interrogés sur ce point. Aucune possibilité de s’opposer en masse au projet, qui fait suite à une loi interdisant à un criminel, durant sa période de prison, de gagner de l’argent avec ses textes.
En France, le Code pénal abonde dans ce sens, quoique dans des limites plus précises : un criminel doit en effet « s’abstenir de diffuser tout ouvrage ou oeuvre audiovisuelle dont il serait l’auteur ou le co-auteur et qui porterait, en tout ou partie, sur l’infraction commise et s’abstenir de toute intervention publique relative à cette infraction ; les dispositions du présent alinéa ne sont applicables qu’en cas de condamnation pour crimes ou délits d’atteintes volontaires à la vie, d’agressions sexuelles ou d’atteintes sexuelles. »
Vox populi, vox du législateur
L’un des arguments de cette loi serait de s’appuyer sur la vox populi, laquelle serait choquée par le fait que l’on puisse faire de l’argent avec ses crimes. Mais alors, quid de Nelson Mandela, considéré par le passé comme un terroriste et enfermé à ce titre ? Et comme la décision ne reviendrait qu’à un procureur, cela ne fait que conforter le PEN dans son mauvais, très mauvais pressentiment.
Une autre source de confusion pointée serait de mettre dans le même panier un fou qui raconte avec délectation comment il a poignardé des dizaines de personnes, et un détenu racontant ses méandres face au système judiciaire et comment il a dû se débattre. Bien évidemment, le texte sanctionnerait l’un et l’autre…
Le problème est pourtant compréhensible, mais probablement trop tranché dans le cadre anglais : on imagine facilement les parents d’une victime ne pas très bien tolérer que la mort de leur enfant serve à quelques dividendes pour le meurtrier. Mais n’a-t-on pas payé sa dette, une fois la peine de prison purgée ?
Rédigé par Nicolas G , le mardi 21 juillet 2009 à 17h55
Source : The Bookseller
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