Assises. Thierry Alquier est accusé d’avoir roué de coups sa concubine, fin décembre 2007 à Bram.

Le président Masia et ses assesseurs, hier après-midi à la reprise de l'audience. Photo DDM, R.G.

Le président Masia et ses assesseurs, hier après-midi à la reprise de l'audience. Photo DDM, R.G.
Le président Masia et ses assesseurs, hier après-midi à la reprise de l’audience. Photo DDM, R.G.

Peut-on battre sa concubine pour s’assurer de son amour? Pour aussi étrange qu’elle semble, la question, choquante sur le plan sociétal, se pose au plan psychiatrique. C’est ce qui transparaît des conclusions de l’expert psychiatrique présentées à la cour d’assises hier matin, dans cette quatrième affaire de la session d’octobre. Thierry Alquier aimait sa concubine, il l’a répété dans ses déclarations, et depuis sa mise en détention provisoire il y a deux ans à la maison d’arrêt de Carcassonne. Mais il la battait aussi régulièrement, jusqu’à ce qu’au soir du 28 décembre 2007 il la roue littéralement de coups, des violences qui entraîneront sa mort dans la nuit. Des faits qu’il a reconnus, et au sujet desquels il regrettera de ne pas avoir alerté les secours. Le couple, formé en 1995, est alcoolique. Elle boit 4 litres et demi de vin par jour, lui cinq à six litres de bière. Et ça les rend agressifs, elle jalouse, lui cogneur. Ils vivent au lieu-dit Le Jardin Notre-Dame à Bram, dans un abri de jardin de 1,50m sur 1, qu’il a agrandi avec des palettes de bois et des planches pour faire une chambre de 3,50m sur 2. «Pas l’endroit idéal où loger», dira le président Masia, la misère dans tous les sens du terme. C’est lui, lors de l’interrogatoire de curriculum vitae dans la matinée, qui dresse le portrait de l’accusé, et rappelle les faits selon ses déclarations. Déjà condamné à trois reprises pour des actes de violence, Thierry Alquier, comme la victime, est issu d’un milieu social défavorisé et d’une famille nombreuse. Comme elle, son enfance a été difficile: il a perdu un œil à l’âge de huit ans, elle était le souffre-douleur de ses camarades à l’école. Ce 28 décembre 2007, ils ont commencé à boire dès le matin. En début de soirée, l’accusé reçoit un appel téléphonique sur son portable, auquel il ne répond pas. Il s’ensuit une dispute, sa concubine jugeant qu’il provient d’une amante. Il fait nuit devant le cabanon, il va la rouer de coups. Un premier médecin légiste expliquera son étonnement face au nombre de lésions cutanées qu’il trouve sur le corps de la victime: «Elle avait des bleus partout». Un second parlera d’«overkilling», un déchaînement de violence. Thierry Alquier lui-même, déclare qu’il ne l’a jamais frappée aussi fort que cette fois. Elle s’enfuit, il tente de la rattrapper, et sur le sentier qui borde le ruisseau elle tombe lourdement en contrebas d’un talus. Il descend pour l’aider, la remonte à bout de bras, la tire par les épaules jusqu’à une brouette, la ramène à l’abri pour la coucher sur un matelas. Elle saigne, elle a l’œil gauche au beurre noir, et mal au ventre. Il est 20 heures, il se couche auprès d’elle, elle ne veut pas aller à l’hôpital. Le lendemain matin, elle est morte.

Outre l’audition de l’accusé et des témoins, la journée d’hier a été consacrée à celle des experts, psychiatriques et médico-légaux. Avec cette question: de quoi est morte la victime? Très certainement d’une insuffisance respiratoire aiguë, conjonction des coups à la tête et au thorax, et de l’alcool. Et cette autre question: de quoi est fait Thierry Alquier? Le psychiatre le décrit comme un homme au vocabulaire pauvre mais spontané, prématurément vieilli, atteint de délires hallucinatoires du buveur (mais pas au moment des faits), et qui éprouve un sentiment de culpabilité. Le gendarme qui a mené l’enquête assure croire à sa sincérité. Jugé entièrement responsable de ses actes, avec cette circonstance nouvellement aggravante qu’il les a commis sous l’emprise de l’alcool, l’accusé encourt 20 ans de réclusion criminelle. Il sera assisté par Me Laetitia Fouquenet. La famille, qui s’est portée partie civile, est représentée par Me Sébastien Leguay, qui débutera les plaidoiries demain, avant celle de l’avocat général, Brigitte Etchegoinberry.

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