Guadeloupe Attitude

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5 juin 2009

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Quatorze Guyanais au banc des accusés de la cour d’assises de Nantes, en mars 1931.
Crédit : Le Phare/Archives municipales de la Ville de Nantes

L’historien André Bendjébbar prépare un livre et un documentaire sur le procès pour meurtres de 14 Guyanais devant la cour d’assises de Nantes en 1931 qui fit l’espace de dix jours fit de Nantes une capitale médiatique.

En 1931, l’affaire faisait la une de toute la presse internationale. Aujourd’hui, sans le travail de recherche de l’historien André Bendjébbar, elle aurait sans doute été oubliée à jamais.

En ce mois de mars 1931, à la sortie d’un hiver froid comme la mort, la cour d’assises de Nantes est appelée à juger 14 Guyanais, accusés de meurtres et d’avoir fomenté une émeute trois ans plus tôt, à l’été 1928 à Cayenne.

Des lapidations, des émasculations

« Tout part de la plus grande fraude électorale jamais vue en territoire français. Le 22 avril 1928, Jean Galmot, le candidat naturel des Guyanais et qui jouit d’un très grand crédit auprès d’eux, est battu lors des élections législatives par le candidat soutenu par le gouvernement et que personne n’aime ». La pilule est dure à avaler. Et quand le 6 août suivant, Jean Galmot meurt, « sans doute de mort naturelle », la rumeur d’un empoisonnement se répand.

Et Cayenne est mise à feu et à sang. « On assiste à des meurtres extrêmes, avec des lapidations, des émasculations ». Une fois le calme rétabli, l’enquête se conclut par l’arrestation de 31 personnes. Quatorze, dont deux femmes, sont finalement incarcérés et transférés en France pour être jugés. Embarqués à bord de La Martinière, le bateau du bagne, ils arrivent à Nantes, son port d’attache.

« Ce sont tous des gens de couleur, cultivés ou non. À l’exception de ceux qui ont fait la guerre, ils ne sont jamais venus en Europe. Ils n’ont pas d’argent ».

En cet hiver 1931, la Loire charrie des glaçons. Les Guyanais sont encore vêtus comme à Cayenne.

Les ténors du barreau de Paris

Tous les ténors du barreau parisien se pressent pour les défendre. Il y a Gaston Monnerville, le Guyanais futur président du Sénat, Henry Torrès, Me Zévaes qui avait défendu le meurtrier de Jean Jaurès… Ils sont aidés dans leur tâche par un jeune avocat nantais, Alexandre Fourny, franc-maçon, militant socialiste, futur adjoint au maire de Nantes qui sera fusillé comme otage en 1941.

Le dossier comporte plus de 3 000 pages. Tout semble envoyer les accusés vers la guillotine.

La justice a fait venir de Cayenne 31 témoins. « Ils sont logés au dortoir des jeunes filles de la rue Harrouys et prennent leurs repas rue d’Auvours ».

Le procès ouvre le 9 mars. Et dure 12 jours pleins. « Nantes devient alors l’une des attractions judiciaires de France ».

Acquittés

Me Monnerville, petit-fils d’esclave, plaide deux choses : « lI met les jurés devant leurs responsabilités, en s’inspirant des maquettes des navires négriers qu’il a vues en visitant le Musée des Salorges. Il crée un sentiment de culpabilité habile en jouant sur le registre de l’émotion ». Puis il explique qu’il est impossible de construire la citoyenneté si tous les Français n’ont pas les mêmes droits et si le suffrage universel n’est pas respecté.

« Le procureur, de son côté, va trouver des circonstances atténuantes. Et, alors qu’ils sont assurément coupables, ils sont acquittés après quelques heures de délibéré. Le procès se termine aux accents de la Marseillaise dans les embrassades ».

Mais à quelques semaines de l’ouverture de sa grande exposition coloniale, la France pouvait-elle se permettre de donner au monde une mauvaise image de la gestion de son empire colonial ?

Dominique Bloyet

Pour compléter son enquête, André Bendjébbar recherche des témoins de ce procès. Et lance un appel aux descendants des magistrats et des jurés dont voici la liste.

  • Juge d’instruction : M. Le Marchand.

  • Procureur général : M. Simonneau.
  • Président : M. Lemonnier.
  • Président des jurés : Gustave Charron, Saint-Sébastien-sur-Loire, né le 4 octobre 1883, employé aux Docks de l’Ouest.
  • Jean Danais, Pontchâteau, né le 21 juillet 1866, retraité de la Cie de chemin de fer Paris/Orléans.
  • Victor Vilain, Cheméré, né le 20 octobre 1872, retraité des chemins de fer.
  • Louis Chéneveaux, Saint-Nazaire, né le 17 octobre 1893, contremaître.
  • Jean-Baptiste Marchais, Rezé, né le 8 octobre 1871, entrepreneur de maçonnerie.
  • Donatien Rialland, Les Touches, né le 25 novembre 1887, horloger.
  • Théodore Bretin, Nantes, né le 19 septembre 1873, négociant.
  • Nicolle, pas d’autres renseignements.
  • Ernest Bernier, Rouans, né le 20 octobre 1873, propriétaire.
  • Gabriel Martin, Saint-Herblain, né le 4 mai 1894, commerçant.

Vos témoignages

Les témoignages, photos ou autres peuvent être adressés au journal, par courrier à Presse Océan, 8 rue Santeuil, 44 000 Nantes ou par mail à redac.locale.nantes@presse-ocean.com.

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