Benoit : Croyez-vous que le parquet est indépendant du pouvoir politique ?
Jean-Marie Bockel : Au quotidien, l’indépendance du parquet se manifeste tous les jours, y compris sur des dossiers sensibles. Tous les pays démocratiques reconnaissent la nécessité de donner au parquet des indications sur la politique pénale du pays. Le système français se caractérise par le mode de désignation des magistrats du parquet. La réforme en cours du Conseil supérieur de la magistrature devrait renforcer encore l’autonomie du parquet. La Cour européenne des droits de l’homme ne nous a pas condamnés, mais des évolutions sont possibles, mais elles supposent une réforme de la Constitution.
Max : N’avez-vous pas laissé tomber les Mulhousiens en remettant les clefs de la ville au Dr. Jean Rottner (UMP) ?
Jean-Marie Bockel : Il ne faut pas faire semblant de découvrir aujourd’hui que ma réélection en 2008 s’était faite dans le cadre d’une coalition entre la Gauche moderne, l’UMP et les centristes. Le Parti socialiste m’avait beaucoup attaqué là-dessus et sur ma présence au gouvernement à l’époque. En passant le témoin à mon premier adjoint, ce n’est pas l’UMP que j’ai choisie, mais la personne la mieux à même d’exercer cette responsabilité et, à travers le saut générationnel auquel je procède, de préparer l’avenir.
Je n’abandonne pas mes concitoyens, puisque je conserve la présidence de la grande agglomération, que je suis enfin parvenu à finaliser après vingt ans d’efforts.
Clovis : Mme Alliot-Marie propose l’instauration d’un numerus clausus chez les avocats. Il est déjà difficile de trouver un avocat pour un bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, ne pensez-vous pas qu’une telle mesure risque de porter atteinte au droit d’accès à la justice des plus pauvres ?
Jean-Marie Bockel : Cela pose surtout la question, bien réelle, du financement de l’aide juridictionnelle (près de 300 millions d’euros sur le budget de la justice actuellement). C’est pourquoi nous travaillons actuellement, en concertation avec le barreau, à un complément de financement hors budget (de type assurance) qui permettra notamment une présence plus importante de l’avocat lors des gardes à vue dans le cadre de la réforme du code de procédure pénale. Et sans que cette mesure soit réservée aux plus fortunés.
Benoit : Vous présenterez-vous à la présidentielle de 2012 ?
Jean-Marie Bockel : La Gauche moderne, formation politique à l’aile gauche de la majorité, que je préside, n’a pas vocation aujourd’hui à présenter un candidat à l’élection présidentielle. J’ignore si nous allons vers une primaire au sein de la majorité et quel choix nous ferions dans cette hypothèse.
Je n’ai donc pas vocation aujourd’hui à me présenter à cette élection.
Arthur : Que pensez-vous des projets de candidature de Hervé Morin (Nouveau Centre) pour la présidentielle ?
Jean-Marie Bockel : Je peux comprendre l’intérêt d’une candidature qui permettrait, en recueillant des voix allant du centre droit au centre gauche, d’élargir au premier tour les assises de la majorité. Qui est le mieux à même d’incarner, le cas échéant, cette stratégie ? Hervé Morin est-il en capacité de recueillir des voix au-delà de la droite ? M. Borloo n’aurait-il pas davantage ce profil ? Le critère de succès d’une primaire au sein de la majorité, c’est d’élargir la majorité et non pas de mettre le président de la République, s’il se représente, en difficulté alors qu’il doit être nettement en tête au premier tour pour avoir toutes les chances de l’emporter au deuxième.
Guest : Croyez-vous, comme il le croit lui-même fortement, que François Bayrou rassemblera les votes du centre droit au centre gauche en 2012 ?
Jean-Marie Bockel : On ne peut pas nier le score de François Bayrou en 2007. J’ignore aujourd’hui s’il est encore en capacité de faire un score important au premier tour de l’élection présidentielle. Cela dépendra bien sûr de lui et de son positionnement politique, mais cela dépendra aussi de la capacité du ou des candidats de la majorité de convaincre dès le premier tour cet électorat, et aussi de la capacité ou non du candidat socialiste de rassembler au-delà de son camp traditionnel.
La Gauche moderne entend, par son engagement dans la préparation de 2012, contribuer à convaincre des électeurs déçus de la gauche et du Parti socialiste, et des électeurs du centre gauche, de soutenir dès le premier tour le candidat de la majorité dans l’esprit de la réforme juste.
Gilles : Quels sont les dossiers que vous laisse la garde des sceaux, Michèle Alliot-Marie ?
Jean-Marie Bockel : Faute de périmètre précis dans le cadre de mon décret d’attribution, nous sommes convenus que j’assure le suivi de la mise en œuvre de la réforme de la carte judiciaire, ainsi que les questions européennes. Je me suis beaucoup impliqué sur ces dossiers depuis un an en étant très présent sur le terrain. Cela ne m’empêche pas de m’engager également sur les questions pénitentiaires à travers la mise en œuvre de la nouvelle loi pénitentiaire et en lançant de nouveaux concepts comme celui de prison ouverte. J’ai par ailleurs engagé une réflexion très concrète sur la prévention de la délinquance des mineurs et des jeunes majeurs, qui fera l’objet d’assises à l’automne. Je suis par ailleurs très présent sur les questions parlementaires.
Catherine : Etes-vous sous-utilisé ?
Jean-Marie Bockel : Oui et non. Mes journées sont bien remplies. Je fais des choses passionnantes et, je pense, utiles. Mais un périmètre clair me permettrait certainement d’être encore plus efficace dans ma mission.
Fred : Quelle est votre position sur le mariage et l’adoption par les couples homosexuels ?
Jean-Marie Bockel : J’ai voté le PACS comme député. Je ne suis personnellement pas favorable au mariage homosexuel, considérant que le PACS, qui est d’ailleurs régulièrement réformé, apporte des réponses suffisantes. S’agissant de l’adoption, je n’ai pas d’opposition de principe à la présence d’enfants adoptés au sein d’un couple homosexuel, mais je suis attaché à l’idée de l’altérité homme-femme, symbolisée par le mariage. C’est, je crois, la position de Sylviane Agacinski, qui a écrit des choses très justes et très mesurées sur ce sujet délicat.
Choubidou wouah : Le parquet de Paris a fait appel de la décision d’un juge d’ouvrir une enquête pour prise illégale d’intérêt sur la nomination de François Pérol, ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, à la tête du groupe Banque populaire-Caisse d’épargne . Qu’en pensez-vous ?
Jean-Marie Bockel : Je ne connais pas ce dossier et ne ferai donc aucun commentaire. J’étais par ailleurs au Sénat ce matin sur une proposition de loi concernant une clarification de la notion de “prise illégale d’intérêts”, qui aujourd’hui suscite une jurisprudence très contrastée, et ce faisant, une réelle insécurité juridique.
Clovis : Le garde des sceaux a évoqué la création d’une nouvelle juridiction pénale, composée exclusivement de magistrats. Or nombre d’avocats préfèrent déjà passer en assises que devant le tribunal correctionnel… Qu’en pensez-vous ?
Jean-Marie Bockel : Cette réflexion – car il s’agit pour le moment d’une simple réflexion – répond à un vrai sujet : l’encombrement des cours d’assises malgré de très nombreuses correctionnalisations d’affaires criminelles et la lourdeur de la procédure. Nous ne sommes qu’au début de cette réflexion, qui passera forcément, si nous devions poursuivre dans cette direction, par la détermination de critères clairs et acceptables pour définir ce qui, dans ce cas, continuerait à relever de la cour d’assises avec jury populaire telle qu’elle fonctionne aujourd’hui depuis plus de deux siècles en France.
L’ancien avocat que je suis souhaite qu’on se donne réellement le temps de la réflexion sur un sujet qui n’est pas aujourd’hui prioritaire.
Alfred : Pensez-vous que votre idéal social-libéral soit en phase avec la politique sarkozyste?
Jean-Marie Bockel : Pour l’essentiel, oui. D’autant que la crise majeure intervenue en 2008 a amené le président sur des positions très volontaristes sur le plan économique et social, tant au niveau français qu’européen (on l’a vu pendant sa présidence française), voire mondial, avec l’instauration du G20, dont il fut l’initiateur. Aujourd’hui, nous rassemblons à la Gauche moderne des personnes qui avaient voté oui en 2005 et des personnes qui avaient voté non au référendum sur le traité de Lisbonne. Nous nous retrouvons ensemble dans cette démarche volontariste qui transcende les clivages, face à un Parti socialiste qui semble ne pas avoir pris la mesure du monde d’aujourd’hui, à quelques exceptions près.
Cela dit, la Gauche moderne entend bien se différencier de la droite et apporter ainsi sa contribution à la réussite des réformes à travers des propositions originales sur les grandes questions du moment (retraites, fiscalité, etc.).
Alpha : Quel regard votre formation, qui se définit comme sociale-libérale, porterait-elle sur une candidature de Dominique Strauss Kahn en 2012 ? Serait-ce de nature à cliver les positions ou à faire imploser le mouvement ?
Jean-Marie Bockel : Tout d’abord, je crois peu à cette candidature. J’étais en effet proche de DSK en 2002, après l’échec de Jospin, et lui avais à l’époque conseillé de se lancer dans la bataille, d’abord interne au PS, autour des idées sociales-libérales que nous partagions. Il a manqué d’audace à l’époque et on a bien vu comme il a laissé passer sa chance. Ce genre de train ne passe pas deux fois. En ce qui me concerne, je crains que même Dominique Strauss-Kahn, qui n’a pas osé réformer le PS quand il était en capacité de le faire, ne soit prisonnier d’une doctrine politique qui n’est pas la sienne mais qui seule permettrait, dans le contexte actuel, de rassembler son camp. Comment faire campagne présidentielle dans une position qui serait aussi complexe et insincère ? Pour moi, Nicolas Sarkozy, même si la période actuelle est très difficile, aura l’avantage de la clarté dans le projet qu’il proposera aux Français. Voilà mon analyse aujourd’hui.
Max : Dominique Strauss-Kahn pourrait-il mener une politique de gauche blairiste, politique à laquelle vous êtes tant attaché ?
Jean-Marie Bockel : Je n’aime plus le terme “blairiste” car il correspond à une époque aujourd’hui révolue, même s’il constitua en son temps un vrai progrès dans la pensée et dans l’action politiques. Je répondrai à votre question par une autre question : quand j’ai connu Martine Aubry – à l’époque nous étions ensemble dans l’aventure delorienne – jusqu’à il y a une quinzaine d’années, elle était au moins autant sociale-libérale que DSK et moi-même. J’ai le sentiment qu’elle est aujourd’hui très largement dans une posture liée à ses fonctions, d’abord de ministre des trente-cinq heures, auxquelles elle ne croyait pas jadis, puis de première secrétaire d’un Parti socialiste encore très archaïque.
Je pense que DSK serait le cas échéant confronté au même hiatus entre ce qu’il pense et ce qu’on attendrait de lui comme candidat ou comme élu. Cela dit, je dois saluer sa lucidité, et celle aujourd’hui encore de personnalités socialistes comme Michel Rocard, sur le dossier des retraites où il a su se démarquer, à l’instar d’ailleurs de Manuel Valls et de quelques autres trop rares socialistes, de la position incompréhensible et démagogique du Parti socialiste.
Rappelez-vous que Martine Aubry avait fait de même avant d’être obligée de se reprendre pour rester dans la ligne radicale dans laquelle semble s’enliser le Parti socialiste. Le problème de DSK, quels que soient son talent, sa lucidité et son regard sur le monde, que je peux souvent partager même aujourd’hui, est bien là.
Alfred : C’est la raison pour laquelle vous avez rejoint l’UMP ? Jean-Marie Bockel : Je n’ai jamais rejoint l’UMP, et je ne rejoindrai jamais l’UMP. La Gauche moderne, comme le Nouveau Centre, est une des deux formations de la majorité distinctes de l’UMP et sans double adhésion. Je suis un allié de l’UMP et de la majorité, libre et indépendant, libre de partir si je ne suis plus d’accord. Mon soutien, même s’il est parfois critique, n’en a que plus de valeur. Je suis persuadé que Nicolas Sarkozy, que je soutiendrai en 2012 parce que je crois dans la démarche de réformes justes qu’il a engagée et que je souhaite, avec l’énergie qui est la sienne et avec la vision qu’il a du monde et de notre société, qu’il puisse les poursuivre, qu’il ne pourra l’emporter que si l’aile gauche de la majorité, que mon parti, la Gauche moderne, est seul à structurer politiquement, a pleinement sa place et dans la majorité aujourd’hui, et dans la campagne électorale demain.
Ma position n’est pas toujours facile, que ce soit au sein du gouvernement ou dans la majorité, mais l’allié loyal que je suis a la conviction que nous pourrons, dans les deux années à venir, conforter cette position d’aile gauche, la faire comprendre mieux, tant au sein de la majorité que dans le pays, et constituer, dans la perspective de 2012, un marqueur pour une partie de l’électorat de gauche et de centre gauche, que leurs aspirations – et notamment la justice sociale –, leurs idées, leurs sensibilités, ont davantage leur place dans cette majorité, aux côtés de ce président, qu’au Parti socialiste tel qu’il est encore aujourd’hui. Et je sais de quoi je parle.
Que pense Mr Bockel de ce dysfonctionnement majeur auquel Alliot-Marie se refuse de mettre un terme, cette affaire financière impliquant directement Perdriel mais sabotée par un juge d’instruction qui siégeait à la SDL et au conseil de surveillance du Monde, pour préserver le rapprochement Monde / Obs.
Que pense Mr Bockel de cette impunité renouvelée par Alliot-Marie récemment, pour permettre à Perdriel de prendre les rênes du Monde et renvoyer l’ascenseur à Sarkozy le moment venu .
Mr Bockel dispose d’une occasion UNIQUE de dénoncer
– l’instrumentalisation de la Justice par le pouvoir pour garantir l’impunité à vie à telle ou telle personnalité
– l’existence au sein du pouvoir judiciaire d’une machine à enterrer prête à être utilisée, et que les gardes des sceaux entretiennent consciencieusement
-Pour l’indépendance du parquet, il faut revoir! Quand on apprend avec l’affaire Bettencourt que le juge Courroye semble recevoir ses instructions de l’Élysée.
-Quant à Mulhouse, JMB n’avait jamais annoncé pendant la campagne municipale qu’il laisserait la ville à l’UMP. S’il l’avait fait, il n’aurait jamais été réélu maire. Je rappelle qu’il a été élu avec 168 voix d’avance sur 24000 suffrages exprimés:
http://www.linternaute.com/ville/ville/elections-municipales/1034/mulhouse.shtml
Le départ de Bockel, à part le NC et des opportunistes, a provoqué le basculement des centristes et de l’élue MoDem dans l’opposition. Il n’y a plus d’entente municipale.
-Pour la présidentielle, on admire le réalisme de JMB… En tout cas, il est fidèle à son rôle de sous-fifre. Quant à la réforme juste, HADOPI, LOOPSI, TEPA, etc, et bientôt la réforme de l’aide juridictionnelle, où est-elle cette réforme juste? Injuste pour les plus faibles! On est parti vers la privatisation de l’AJ au profit des assurances; Il y aura ceux qui peuvent payer et les autres.
-Un secrétaire d’Etat à la justice sans attributions, n’est-ce pas un cadeau empoisonné? Surtout avec l’hyper gaulliste MAM, ça doit pas être facile tous les jours quand on se dit de gauche même moderne…
-Comme pour le Nouveau Centre, comment la Gauche Moderne peut-elle être libre et indépendante et à la fois solidaire de la majorité? Je reste perplexe.
Tout ceci est une farce grotesque.
Je viens de prendre connaissance du chat avec J.M BOCKEL que j’apprécie en qualité d’homme politique, sincère, ce qui est rare…
J’aurais aimé savoir ce qu’il pourrait penser dans le cadre d’une plainte pour Abs et faux en écritures visant un ex Pdg du Cac 40 et plusieurs cadres d’un groupe cimentier Français au parquet de Nîmes, du fait que ce dernier semblerait vouloir classer, voir enterrer ce dossier en requérant un non lieu acrobatique … Les faits sont constitués et avérés, s’agissant pour ce Pdg d’avoir fait construire 6 villas locatives au profit de la Sci de son épouse… ” Les pratiques sont condamnables sur le plan fiscal et comptable “, MAIS, il n’y verrait pas d’intentions frauduleuses ( sans rire )… C’est quoi la justice ????