France 2
Cette semaine, France 2 diffuse en feuilleton un procès d’assises, qui se tient à Lyon, dans son journal de 13 heures. : France 2
La loi l’interdit, mais les exceptions sont de plus en plus nombreuses. Cette semaine,France 2 diffuse un reportage sur un procès d’assises tourné à Lyon.
Le déballage des pièces à conviction, le témoignage de la famille de la victime, la réunion des jurés juste avant le délibéré, l’accusé dans son « sas d’attente », poignets menottés… Habituellement, il n’est pas possible de voir ou d’entendre toutes ces étapes d’un procès d’assises. Depuis l’affaire Dominici, une loi de 1954 interdit les enregistrements audiovisuels, afin de préserver la sérénité des débats. La loi Badinter de 1985 a assoupli le principe en les autorisant pour les procès qui présentent un intérêt historique – comme celui de Maurice Papon, ou, actuellement, celui d’AZF à Toulouse.
Une approche pédagogique
Benoît Gadrey, correspondant pour France 2 à Lyon, a pourtant obtenu le droit de filmer, jusqu’au verdict, le procès de Jean-Marie Garcia, jugé pour meurtre en janvier. Cette semaine, la chaîne diffuse ce reportage en feuilleton dans son journal de 13 heures. Un cas de moins en moins isolé. De la série documentaire télévisée, Justice en France, de Daniel Karlin, diffusée au début des années 90, au film de Raymond Depardon, 10e chambre, des caméras se faufilent de plus en plus souvent dans les prétoires.
Justice spectacle
Les autorisations sont laissées à la discrétion des présidents de cour ou tribunal, sans forcément requérir l’aval de la Chancellerie. « Le président de la cour d’assises de Rhône-Alpes et le procureur m’ont dit oui très rapidement, témoigne Benoît Gadrey. À condition que j’obtienne l’accord de toutes les parties. Mon approche, volontairement pédagogique, a dû leur plaire. Ils n’ont même pas demandé à voir le résultat. »
Selon un sondage Ifop de mai 2008, commandé par le Conseil supérieur de la magistrature, 37 % des Français ne font « pas confiance » à la justice. Le CSM a suggéré, dans la foulée, un accès plus ouvert des micros et caméras aux salles d’audience, pour familiariser le public avec les rouages du système judiciaire. Mais pas à n’importe quelles conditions. Une commission, menée par la première présidente de la cour d’appel d’Angers, Élisabeth Linden, avait préconisé, en 2005, d’attendre le jugement définitif avant de diffuser et de proscrire les gros plans.
Le rapport est resté lettre morte. Aucun projet de loi n’est à l’ordre du jour, même si les demandes se font de plus en plus pressantes. Le ministère se contente de tolérer les libertés prises ponctuellement avec la loi, au nom de la « transparence de la justice ». « La seule limite reste l’enregistrement des délibérés en assises. Cela pourrait vraiment fausser le jugement des jurés », précise le porte-parole, Didier Guillaume.
Toutefois, avocats et magistrats ne crient pas tous de joie face à l’intrusion des caméras. « Nous restons assez réservés, témoigne Henri Ody, secrétaire national de l’Union syndicale des magistrats et président de chambre à la cour d’appel de Caen. Nous ne voulons pas d’une justice spectacle comme cela peut se voir aux États-Unis. Il ne faudrait pas non plus ne montrer que des bouts de procès, afin de respecter l’équilibre des parties. » En somme, pas d’extrait quotidien dans le journal télévisé, mais peut-être plus de documentaires…
Florence LE MÉHAUTÉ.
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