Le rapport attend le prochain garde des Sceaux. Son auteur, Philippe Léger, haut magistrat chargé par Nicolas Sarkozy de revoir la procédure pénale, vient d’achever ses travaux. Son rapport, qui préconise la suppression du juge d’instruction, sera remis officiellement au successeur de Rachida Dati début juillet.
D’une quarantaine de pages, le document a été rédigé avec soin, afin de concilier les positions des différents membres de la commission. Au cours des dernières séances, le groupe a de nouveau travaillé sur une question centrale de la réforme de l’instruction : la place de la défense dans la procédure. Même si elles ne donnent pas pleinement satisfaction aux avocats, les propositions du rapport augmentent de façon significative les droits de la défense.
Le mode d’emploi de la garde à vue – on en compte environ 560 000 par an – est entièrement revu. Les avocats pourront être présents à la première heure pour un entretien avec leur client, puis à la douzième avec un accès aux procès-verbaux. Ils pourront assister entièrement leurs clients en cas de prolongation au-delà de 24 heures (sauf dans les affaires de crime organisé et de terrorisme). Le comité propose l’enregistrement obligatoire de toutes les gardes à vue, et non plus uniquement en matière criminelle. Même si, pour les services de police, cette disposition risque d’être difficile à mettre en œuvre, «il faudra bien y arriver, pour lever toutes les suspicions. C’est le sens de l’histoire», estime un haut magistrat à la Chancellerie.
Le comité Léger veut également restreindre le recours à cette mesure attentatoire aux libertés, qui a fortement augmenté depuis quelques années, note le rapport. Les experts suggèrent d’interdire le placement en garde à vue si la peine encourue est inférieure à un an. Selon eux, la loi devrait de plus préciser qu’elle ne doit être utilisée «que si la contrainte est tout à fait nécessaire».
La «retenue judiciaire»
Le cas de Julien Dray a également été une source de réflexion pour les membres du comité, qui se sont souvent référés à cette affaire au cours de leurs débats. «Le droit français ne connaît en effet que deux cadres d’audition au cours de l’enquête : une audition libre ou une audition après placement en garde à vue», explique le rapport, qui préconise du coup la création de la « retenue judiciaire», inspirée du modèle hollandais, d’une durée maximale de six heures, pour les personnes soupçonnées d’une infraction punie de moins de cinq ans d’emprisonnement.
Toujours dans l’idée de rééquilibrer les droits de la défense, le comité a cherché à encadrer la détention provisoire. Les membres du groupe de travail ont d’abord pensé à l’écarter dans les cas d’atteinte aux biens (par opposition aux atteintes aux personnes), puis ils ont considéré que «des délais butoirs extrêmement réduits constituent la meilleure garantie d’un changement culturel quant à la pratique de la détention provisoire». Une personne mise en cause ne pourrait par exemple par rester incarcérée plus de six mois si elle encourt une peine inférieure à cinq ans. Au-delà, si elle n’est pas jugée, elle devrait être libérée, sous surveillance.
En attendant le prochain garde des Sceaux, la Direction des affaires criminelles et des grâces à la Chancellerie a déjà lancé un chiffrage de ce nouveau modèle. Elle cherche notamment à déterminer le coût de la place plus large faite aux avocats, qui va peser sur le budget de l’aide juridictionnelle, un autre casse-tête.
Laisser un commentaire
Participez-vous à la discussion?N'hésitez pas à contribuer!