Une femme, accusée par son ex-compagne d’avoir provoqué la chute qui l’a rendue tétraplégique, a été acquittée, hier, par la cour d’assises du Morbihan. Elle encourait quinzeans de réclusion criminelle.

Sa vie a basculé en quelques secondes, la nuit de Noël1997. Depuis sa chute du sixième étage à Lorient, PatriciaM., âgée de 41 ans, est prisonnière à perpétuité d’un corps handicapé. Durant plusieurs années, elle a assumé ce terrible accident de la vie. Puis, après sept ans de silence, elle s’est accrochée à une autre version, accusant son ex-compagne d’être à l’origine de la chute de dix-huit mètres qui l’a rendue tétraplégique.

De la tentative de meurtre aux violences volontaires

Ce tardif revirement a conduit l’accusée, âgée de 39 ans, devant la cour d’assises du Morbihan, à Lorient. Mais les deux jours de procès n’ont pas permis de faire la lumière sur ce drame à huis clos. Seule certitude: la victime a enjambé le rebord de la fenêtre. «C’était une jeune femme profondément dépressive, adoptant des comportements dangereux». Toutefois, selon son avocate, il s’agissait, cette nuit-là, d’une bravade. «Elle voulait attirer l’attention sur elle». Mais sa compagne l’aurait volontairement précipitée dans le vide, en la frappant sur les mains. «Cette relation passionnelle entre deux écorchées de la vie était ponctuée de violence», affirme l’avocate. Pourtant, à sa sortie du service de réanimation, la victime confirme la thèse de l’accident. Ses révélations tardives puis ses explications confuses et changeantes n’ont pas balayé les doutes exprimés dès l’instruction. Le ministère public n’avait-il pas requis un non-lieu, pour la qualification de tentative de meurtre? Et la requalification en violences volontaires sur concubin ayant entraîné une infirmité permanente n’a pas levé pour autant les incertitudes.

«Des doutes trop nombreux»

«La victime manque de souvenirs très précis, ce qui la conduit à en construire», souligne l’avocat général, en s’interrogeant sur la crédibilité de la version venue étayer une qualification criminelle. S’il admet les violences volontaires – c’est-à-dire les coups ou les tapes sur les mains selon la version de la victime ou de l’accusée -, aucun élément ne permet de prouver que ces violences lui ont fait lâcher prise. «C’est la chute qui a entraîné les blessures. Les coups ont-ils entraîné la chute? «Il n’y a pas de réponse certaine. Il y a des doutes, trop nombreux dans ce dossier pour permettre une condamnation. L’accusée a une responsabilité morale. Mais la cour d’assises est là pour juger une responsabilité pénale».

Vengeance d’une femme jalouse?

Sans en prononcer le mot tout au long de son réquisitoire, l’avocat général a ouvert la voie à un acquittement. L’accusée aurait-elle été la cible de la vengeance d’une femme jalouse, délaissée et dépressive? «La motivation était financière», avance l’avocate de la défense. «Libérez-la de cette accusation injustifiée. Elle est innocente d’un point de vue pénal et moral». «Je l’aimais», confie l’accusée qui a toujours défendu la thèse du suicide. Les jurés l’ont acquittée au terme d’une heure et demie de délibération. Souffrante, Patricia M.n’a pas pu assister, hier, au dénouement de cette très longue histoire tumultueuse.

Patrick Hernot

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