Un film retrace le combat de Christian Laplanche pour porter la robe noire, en dépit de vieilles condamnations

“Cinq ans et demi à se battre pour exercer le métier qu’on veut exercer, c’est long et pénible”, confie Christian Laplanche.

Un documentaire diffusé samedi sur France3 Sud, un livre à paraître dans les mois prochains… Christian Laplanche avait un besoin impérieux de raconter son étonnant combat pour porter une robe d’avocat. Il l’endosse depuis que le barreau de Paris l’a accueilli dans ses rangs, en juillet dernier.

Le conseil de l’ordre n’a rien vu à redire au fait que, il y a vingt-cinq ans, Christian Laplanche avait commis des braquages dans les Bouches-du-Rhône, qui lui ont fait connaître la prison et les cours d’assises. Alors que les barreaux de Nîmes, d’Avignon et de Cayenne lui avaient singulièrement claqué la porte au nez, au motif d’un oubli et d’une réhabilitation impossibles.

En 2003, ce Nîmois décide de s’inscrire au barreau. Ses diplômes, sa carrière de professeur de droit puis de maître de conférences l’autorisent à exercer la profession d’avocat. La douche est glacée lorsque le barreau lui refuse son inscription au motif qu'”il ne remplit pas les conditions d’honneur et de probité indispensables à la profession d’avocat”. Son passé l’a rattrapé, en dépit d’une réinsertion exemplaire depuis une vingtaine d’années : ses condamnations sont non avenues, son casier judiciaire purgé et sa réhabilitation établie de droit.

Christian Laplanche riposte, saisit la cour d’appel qui lui donne raison et ordonne son inscription au barreau de Nîmes. Pour les juges, l’avocat a “donné des gages de réinsertion sociale plus que suffisants”. Prestation de serment, installation dans son cabinet de la rue du Mûrier d’Espagne, premiers clients, premières affaires… “Que ce soit devant un tribunal correctionnel ou une cour d’assises, je me sens à ma place. Je ressens très fort les enjeux. Peut-être parce que je suis déjà passé par la moulinette des juridictions répressives.” Dans les années 1980, le jeune Laplanche avait su gagner la confiance des magistrats.

D’abord, celle du juge d’instruction de Tarascon – il entrera par la suite dans les ordres – qui fait confiance au gamin qui a braqué La Poste de Barbentane. Il le libère sous contrôle judiciaire. Une liberté remplie par les études. Et devant la cour d’assises des Bouches-du-Rhône, le président d’alors, Bernard Fayolle, mais surtout les jurés, donnent sa chance à cet accusé sur le chemin de la rédemption, inscrit à la fac de droit. C’est sûrement pour cela que Christian Laplanche a la défense pénale dans les tripes.

En 2006, après quinze mois d’exercice, la Cour de cassation annule la décision ordonnant son inscription au barreau. “Dès le lendemain, je recevais un fax du bâtonnier m’indiquant que mon cabinet allait être liquidé, que je n’étais plus avocat.” La secrétaire licenciée, les clients évaporés en laissant une belle ardoise d’honoraires non payés et ce satané passé qui lui “revenait en pleine gueule”. Aucun droit à l’oubli, pas la moindre reconnaissance de vingt ans d’une vie sans tache.

Le barreau d’Avignon ne veut pas de lui non plus. Celui de Cayenne où il enseigne à la faculté de droit traîne des pieds… Ces refus successifs “laissent des traces. On sort brûlé d’une affaire comme celle-là”. Les caméras de Jarmila Buzkova ont suivi ce cheminement chaotique, depuis la première prestation de serment, à Nîmes en 2003, à celle de Paris, le 6juillet dernier. Le droit chemin, cinquante-deux minutes d’images, d’interview pour montrer le coeur d’une profession qui ne cesse de plaider face aux juges que lorsque la peine est purgée, il faut faire confiance.

Un peu l’histoire du cordonnier le plus mal chaussé… Dans son nouveau cabinet, ouvert au centre de Nîmes, Christian Laplanche redémarre son activité. Il sait gré au barreau de Paris non pas de lui avoir fait une fleur mais d’avoir appliqué la loi. “Pour le bâtonnier de Paris, le mot réhabilitation a un sens, un sens juridique et un sens moral.”

Quelques dossiers ouverts seulement mais une farouche envie de revanche. “Cinq ans et demi à se battre pour exercer le métier qu’on veut exercer, c’est long et pénible.” La page est tournée. Il ne reste plus qu’à devenir simplement Me Laplanche et non plus “le braqueur devenu avocat”. Encore un beau défi à relever…
Par Luc Leroux ( lleroux@laprovence-presse.fr )

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