TRIBUNAL FÉDÉRAL | La police cantonale a interpellé à tort un ressortissant dominicain lors d’une rafle de dealers à Yverdon. Humilié en raison de sa couleur, il exigeait, en vain, une enquête.

G.-M.B. | 30.07.2009 | 00:04

Il est au mauvais moment et au mauvais endroit, ce 27 juin 2007 vers 17 heures à Yverdon. Les forces de l’ordre embarquent ce jour-là toute personne à la peau noire dans le cadre d’une opération antidrogue orchestrée par la police cantonale. Marié à une Suissesse, bien intégré, Carlos Santana, 32 ans, ressortissant dominicain, va chercher son épouse à la sortie de son travail. Sans explication, il se retrouve arrêté, menotté, déshabillé, fouillé, fiché, pris dans le filet en compagnie d’une trentaine de trafiquants africains. Relâché vers 20 h 30, les policiers lui auraient dit qu’il aurait «au moins quelque chose à raconter à son épouse». Très perturbé par cet épisode, les excuses verbales lui paraissent un peu courtes. Il dépose une plainte.

Le juge d’instruction organise d’abord une rencontre avec le chef de la brigade des stups. Il propose un règlement à l’amiable moyennant une indemnisation. La négociation échoue.

Puis, en juin 2008, le magistrat, se fondant sur le rapport de police, décide de classer le dossier. Carlos Santana réclame des mesures d’instruction. Il reçoit en retour un avis de non-lieu. Dépité, il s’adresse au Tribunal cantonal. Et cette instance confirme le non-lieu, rejetant le préavis du ministère public, qui estime pourtant que des investigations s’imposent. Pour la justice vaudoise, l’homme a certes été victime d’une méprise, mais le principe de la proportionnalité a été respecté.

Saisi d’un recours, le Tribunal fédéral vient de communiquer un jugement qui sonne comme une volée de bois vert: «Force est de constater qu’il n’a été procédé à aucune enquête officielle approfondie et effective, telle qu’exigée par la jurisprudence.» Et de constater que non seulement le juge «n’a entrepris aucune investigation en vue d’élucider les allégations du recourant, mais n’a pas donné suite aux requêtes formulées en ce sens par ce dernier».

Pour la Cour suprême, il ne fait dès lors aucun doute que le grief de violation de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) est fondé. Mon-Repos ne se prononce évidemment pas sur les faits eux-mêmes, mais souligne que «s’ils devaient être établis, ces faits, allégués de manière défendable, seraient suffisamment graves pour être constitutifs d’un traitement dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH». Le Canton est prié de revoir sa copie.

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