AP

Le tribunal de grande instance de Paris a condamné mercredi l’un des responsables du syndicat policier Synergie Officiers à un euro de dommages et intérêts pour des propos offensants envers les avocats lors d’une émission sur la garde à vue, mais a débouté l’Ordre des avocats de Paris qui demandait la condamnation de ce syndicat pour des propos similaires dans un tract. Lire la suite l’article

En novembre 2009, alors que le débat sur les conditions et la réforme de la garde à vue prenait de l’ampleur, le syndicat Synergie Officiers avait écrit qu’il n’avait “pas de leçon d’intégrité à recevoir de commerciaux (les avocats, NDLR) dont les compétences en matière pénale sont proportionnelles au montant des honoraires perçus”. Le mois suivant, M. Patrice Ribeiro, secrétaire général adjoint de ce syndicat, avait dénoncé sur RTL l'”offensive marchande” des avocats dans le débat sur la garde à vue qui n’interviennent que “pour une prestation tarifée”.

Les propos de M. Ribeiro, accusant les avocats d’intervenir en garde à vue “pour des raisons financières et en les suspectant sans nuance de commettre de graves manquements à la déontologie” ont, selon le tribunal, brossé “un portrait uniquement négatif de la profession, sans évoquer le moindre avantage lié à la présence de l’avocat en garde à vue”.

Des propos qui, relève le tribunal, ont “dépassé les limites de la liberté d’expression et du droit de critique autorisée” et sont “constitutifs de faute délictuelle” ayant entraîné “un préjudice moral subi par la profession d’avocat dans son ensemble”.

M. Ribeiro a été condamné à verser un euro symbolique de dommages et intérêts à l’Ordre des avocats à la cour d’appel de Paris et au Syndicat des avocats de France (SAF).

Le tribunal a débouté l’Ordre des avocats de Paris et le SAF sur l’autre versant de leurs poursuites, le tract diffusé en novembre 2009 par ce syndicat. S’il considère “leur ton vif et leur caractère réducteur”, le tribunal considère que les propos poursuivis n’ont pas dépassé “les limites admissibles de la liberté d’expression et du droit de critique”.

Ce procès, qui avait duré trois jours en mars, avait tourné à un face à face entre partisans et détracteurs des conditions de la garde à vue. Des avocats de renoms étaient venus apporter leur pierre au débat sur la garde à vue et le directeur général de la police nationale, Frédéric Péchenard, cité par Synergie Officiers, avait voulu “faire entendre la voix de la police” avant de regretter que ce débat ait lieu dans une enceinte judiciaire. AP

AP

Les députés doivent examiner mardi soir le projet de loi organique réformant le Conseil supérieur de la magistrature (CSM).

Ce texte, adopté par le Sénat le 27 avril en deuxième lecture, vise à mettre en oeuvre la révision constitutionnelle de juillet 2008. Il prévoit la refonte du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui ne sera plus présidé par le chef de l’Etat, mais par le premier président de la Cour de cassation.

Les magistrats seront minoritaires au sein du conseil, sauf dans le cadre des décisions disciplinaires, où ils seront à parité avec des personnalités qualifiées, extérieures au corps judiciaire.

Le texte ouvre également au justiciable la possibilité de saisir le CSM. Un dispositif de filtrage permettra de s’assurer que la plainte n’est pas irrecevable ou infondée. Cette procédure a été présentée par le gouvernement comme destinée à offrir “un droit nouveau, réel et efficace pour les justiciables qui auraient effectivement subi les conséquences du comportement d’un magistrat constitutif d’une faute disciplinaire”, lors du passage du texte en conseil des ministres du 10 juin 2009. AP

marc-machin-seul-contre-tous-livre-editions-pascal-galode-canalplus.jpgMarc Machin, 28 ans, comparaît mardi 18 mai, devant le tribunal correctionnel de Paris pour agressions sexuelles sur une jeune femme et deux adolescentes. L’une d’elles étant mineure à l’époque des faits, ce procès pourrait ce tenir à huis -clos. La jeune femme concernée, Marie (*), 37 ans, avait témoigné sur son agression par le prévenu dans ce blog, en date du 16/04/2010 : (« Exclusif : une victime de Marc Machin raconte ses traumatismes »). Une agression extrêmement violente perpétrée huit mois après la sortie de prison du marginal en octobre 2008, à la suite des aveux d’un SDF qui s’est accusé à sa place du meurtre de Marie-Agnès Bedot, le 1er décembre 2001 sur le pont de Neuilly-sur-Seine. Un meurtre pour lequel Marc Machin avait été condamné en appel à 18 ans de prison. Le 13 avril dernier, la Cour révision a décidé d’annuler cette condamnation et de renvoyer de nouveau le jeune homme aux assises pour y être rejugé dans l’affaire du pont de Neuilly, estimant qu’elle n’était pas « en possession de tous les éléments lui permettant de déclarer l’innocence de Marc Machin ». Voici des extraits de l’ordonnance de renvoi de celui-ci devant le tribunal correctionnel (ORTC) pour les agressions de Marie, de Louise (*), 14 ans, et de Léa (*), 15 ans. Photo ci-dessus : Marc Machin invité à Canal+ pour la sortie de son autobiographie.

Les conditions de l’arrestation de Marc Machin le 15 juin 2009. Après son agression, le 5 juin précédent, dans le 20ème arrondissement, Marie a déclaré à la police que ce jour-là, après être sortie du métro Gambetta, elle se rendait à son domicile et que c’est en arrivant dans la cour de son immeuble qu’elle a été agressée. La jeune femme décrit celui qui l’a attaqué et frappé comme étant de type européen, âgé d’environ de 25 ans, de corpulence athlétique, rasé, aux yeux très bleus. Le voisin, venu au secours de Marie, en entendant les appels à l’aide de celle-ci, décrit de son côté un homme entrain de prendre la fuite, dont il n’a pu voir le visage, « corpulent, mesurant environ 1m80, cheveux rasés plutôt blonds».

Pour retrouver l’agresseur de Marie, les policiers de la brigade criminelle ont d’abord visionné les bandes de vidéo- surveillance de la RATP, en date des faits, placées à la station Gambetta. D’après l’ORTC, on y voit un individu en position d’attente à proximité des portiques automatiques, regarder Marie (clairement visible), et lui emboîter le pas en la suivant dans les escaliers mécaniques. « Cet individu mesurait environ 1m80, de corpulence normale, vêtu d’un sweat-shirt bleu foncé portant l’inscription « Delaveine » sur le devant et un bas de jogging blanc avec de larges liserés bleus sur les côtés ». Cette bande vidéo montre aussi que l’homme, arrivé dans l’enceinte de la station à 14H28, a passé les tripodes sans payer et qu’il a alors été contrôlé par une patrouille de police. Un coup de chance pour les enquêteurs ! Identifiés, les quatre policiers ayant effectué ce contrôle indiquent que le nom du resquilleur était « Machin » mais qu’ils n’ont pas relevé son prénom. Ils précisent que l’homme leur a confié être sorti de prison il y a peu. Quatre personnes portant ce nom figurent à l’époque dans la base de données Canonge, un fichier utilisé par la police, alimenté par les photographies des auteurs de crimes et de délits. Parmi les photos de ces quatre « Machin », les policiers reconnaissent formellement l’homme contrôlé au métro Gambetta. Marie, quant à elle, identifie son agresseur sur une planche photographique comportant les visages de neuf autres personnes d’aspect similaire. Le listing du téléphone portable de Marc Machin, indique par ailleurs que l’appareil a activé une cellule le 5 juin 2009, à 14H33, à la station Gambetta. Soit quelques minutes avant que Marie ne sorte du métro.

Lors de son interpellation le 15 juin suivant, à proximité du domicile de son père, dans le 18ème arrondissement, à Paris, Marc Machin est vêtu du sweat-shirt portant l’inscription « Delaveine », repéré sur la bande de vidéo- surveillance de la RATP. Placé en garde-à-vue, il reconnaît l’agression de Marie. Il explique l’avoir remarqué parce qu’elle était « élégante ». Il aurait décidé de la suivre, dans un premier temps, avec l’idée de faire une vidéo en filmant sous sa jupe « pour faire le voyeur ». Il admet avoir envoyé quatre claques à la victime lorsque celle-ci, le découvrant accroupi sous elle, dans la cour de son immeuble, l’a giflé. Mais nie les coups de poings, portées sur la tête, déclarés par Marie. Il dit qu’il a perdu son sang froid et que tout a « dérapé » lorsque la jeune femme est tombée au sol. Il a alors tenté d’écarter ses cuisses « peut-être pour la violer ». Il affirme que la vue du sang de la victime et ses cris l’ont mis en fuite. Or, il semble que ce soit l’arrivée du voisin de Marie qui ait provoqué son départ précipité.

Tout de suite après cette agression, Marc Machin s’est rendu à  l’« Espace psychanalytique d’orientation et de consultations » (EPOC). Une association où il a pris rendez-vous avec un psychologue afin de se soumettre au suivi psychologique auquel l’astreint une condamnation avec sursis mis à l’épreuve prononcée en 2001 pour des faits d’agressions sexuelles. Il dépend alors du « Service pénitentiaire d’insertion et de probation » (SPIP), un organisme rattaché au ministère de la justice chargé de surveiller les personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire et de favoriser leur réinsertion sociale. Mais un rapport du SPIP, de juin 2009, fait état du manque de mobilisation de Marc Machin pour se soumettre à son suivi psychologique. Il refuse de se rendre par exemple à l’ EPOC au prétexte que les locaux de cette association, situés dans le 19ème arrondissement de Paris, sont trop éloignés de son domicile du 18ème. Il ne se présente pas régulièrement aux convocations de son conseiller d’orientation et de probation. Le rapport du SPIP indique que Marc Machin est alors particulièrement investi dans l’écriture de son autobiographie et dans la gestion de sa relation avec les médias.

Placé en garde-à-vue le marginal raconte que, depuis mars 2009 (soit trois mois avant son arrestation), il filme sous les jupes des femmes à l’aide de son téléphone portable. Il dit s’excuser d’avoir agressée Marie et demande à bénéficier d’une aide psychologique. Il dit aussi regretter la lenteur de la Commission de révision qui n’a pas encore examiné son recours dans l’affaire du pont de Neuilly. Sur le pantalon de jogging qu’il portait le 5 juin, sont découvertes des tâches de sang contenant l’ADN de Marie. L’exploitation des images vidéos du téléphone portable de Marc Machin montre 28 scènes tournées sous les jupes de femmes différentes, entre le 27 mars et le 13 juin 2009, dont celle de l’agression de Marie. Plusieurs vidéos démontrent qu’il a suivi plusieurs d’entre elles jusqu’à des entrées d’immeubles. Le 13 juin 2009, deux jeunes filles ont été filmées ensemble selon la même méthode. Les policiers découvriront plus tard qu’il s’agit de Louise et de Léa.

Lors de son interrogatoire de première comparution devant un juge d’instruction Marc Machin maintient ses déclarations initiales concernant l’agression de Marie, en disant cette fois qu’il n’avait jamais eu l’intention de violer celle-ci mais que cela lui avait « peut-être effleuré l’esprit ». Il explique son comportement par une pulsion, par défaut de prise en charge psychologique et par le fait d’avoir été « brisé par le système ». Il affirme ne pas s’être livré à d’autres agressions sexuelles depuis les faits commis au temps de sa minorité et pour lesquels il a été condamné. Dans un interrogatoire ultérieur, il niera fermement avoir eu l’intention de violer la jeune femme.

Le 13 juin 2009, deux adolescentes, Louise et Léa, sont suivies par un homme alors qu’elles entrent dans l’ascenseur de l’immeuble de la grand-mère de Louise, situé dans le 18ème arrondissement de Paris. L’homme se livre sur elles à des attouchements sexuels, tente de pénétrer Louise manuellement, et mord Léa à un pouce lorsque celle-ci se débat et se met à crier. Une fois l’ascenseur arrêté, il s’enfuit. Les deux adolescentes le décrivent à la police comme étant « blond- châtain, aux cheveux très courts ». Deux jours plus tard, le 15 juin, date de l’interpellation de Marc Machin, les enquêteurs établissent un rapprochement avec l’agression de Marie. L’exploitation de la vidéo -surveillance de la station de métro Jules- Joffrin, d’où étaient sorties les petites avant de se diriger vers le domicile de la grand-mère de Louise, permet de les voir immédiatement suivies par un homme « aux cheveux blonds foncés très courts, de corpulence athlétique, porteur d’un tee-shirt blanc avec une bande bleue turquoise sur les épaules, présentant une forte ressemblance avec Marc Machin ».

Extrait de prison le 2 juillet 2009 pour un interrogatoire sur ces faits, Marc Machin reconnaît immédiatement son implication. Il affirme qu’il ne s’était pas rendu compte que les jeunes filles étaient des adolescentes. Il explique qu’il a eu « un déclic » à la vue de leurs mini- jupes. Il se souvient de s’être livré dans l’ascenseur à des attouchements sur Léa mais pas sur Louise. Il nie la tentative de pénétration ainsi que la morsure et indique que l’agression de Marie (huit jours plus tôt, ndlr) a constitué un déclencheur qui l’a fait « partir en vrille ». Lors d’un nouvel interrogatoire, Marc Machin, qui a été formellement reconnu par les deux adolescentes, explique que ne parvenant pas à filmer les jeunes filles sous leur robe, alors que celles-ci montaient les escaliers de la station Jules Joffrin, « il était alors entré dans un état d’excitation et avait eu envie de leur caresser les fesses, raison pour laquelle il les avait suivies jusque dans l’ascenseur». Il maintient que de dos, les chevelures et la tenue de Louise et de Léa lui avaient fait penser à « de jeunes femmes, demoiselles et pas adolescentes », ajoutant que la jeunesse actuelle est « trompeuse». Lors de sa confrontation avec les deux victimes, il admet que celles-ci ont bien l’air de mineures et comme d’habitude, il exprime ses regrets. Les investigations menées à partir des vidéos et photos de son téléphone portable ne permettront pas d’identifier les 25 autres femmes filmées à leur insu par Marc Machin.

Son casier judiciaire porte alors la mention de nombre de condamnations : 2 ans de prison dont 18 mois de sursis et de mise à l’épreuve durant 2 ans pour une agression sexuelle avec pénétration digitale commise en 2000 à l’encontre d’une femme de 45 ans et alors qu’il est mineur, 2 ans de prison dont 18 mois de sursis et mise à l’épreuve de trois ans pour une agression sexuelle en 2001 sur une étudiante suédoise, 18 ans de prison en appel, en 2005, pour le meurtre du pont Neuilly (peine suspendue en juillet 2008), et trois autres condamnations concernant des infractions commises en prison dont l’agression d’un surveillant.

Enquête de personnalité effectuée après les agressions de Marie, de Louise et de Léa : Marc Machin est membre d’une fratrie de trois enfants. Très tôt la vie conjugale de ses parents est marquée par la mésentente du couple et par l’alcoolisme du père, alors gardien de la paix. A l’âge de 2 ans, le garçon et sa sœur d’un an de plus sont confiés à l’ « Aide sociale  à l’enfance ». Ils reviennent chez leurs parents à la naissance du benjamin de ces derniers puis sont renvoyés en famille d’accueil. Marc Machin se plaint d’avoir été maltraité par la famille qui l’a  accueilli et abusé sexuellement par un autre enfant, plus âgé que lui, également placé dans cette famille. A 9 ans, à la mort de sa mère, victime du sida, il est confié à ses grands -parents paternels. Il a 12 ans quand sa grand-mère succombe d’un cancer. Un décès qu’il aurait vécu comme une injustice et qui serait à l’origine de sa rébellion. Son père le reprend ensuite avec lui. Le garçon ne supporte pas son autorité et multiplie les comportements d’opposition qui entraîneront ses premiers ennuis avec la justice des mineurs. Exclu du collège en classe de 5ème, Marc Machin interrompt sa scolarité. Il entame plusieurs formations (marin- pêcheur, peintre en bâtiment, palefrenier) que ce consommateur régulier de cannabis ne mène jamais à bout. Son incarcération dans l’affaire du meurtre du pont de Neuilly intervient dans un contexte d’escalade personnelle dans la violence.

Lors de la suspension de sa détention pour cette affaire, en octobre 2008, (après que le SDF David Sogno se soit accusé d’avoir tué Marie-Agnès Bedot, ndlr), Marc Machin n’a rien résolu de ses problèmes passés, selon l’enquêteur de personnalité. Toujours d’après celui-ci, il est alors immédiatement exposé à une médiatisation importante et désigné comme  « modèle d’erreur judiciaire ». Cette perspective aurait accentué un sentiment de victimisation déjà présent, constate encore l’enquêteur de personnalité. Marc Machin s’indigne de « l’absence d’excuses et de la lenteur de la procédure » de révision. Fortement sollicité alors par les médias et par la publication de son autobiographie, il se remet à consommer des stupéfiants « dans un cadre festif ». Ses difficultés d’insertion sont toujours présentes et complexes, « liées à sa personnalité immature et peu construite ».

Une expertise psychologique, réalisée en août 2009, décrit un homme “en forte attente de prise en considération, ne parvenant pas a assumer l’entière responsabilité de ses actes, et restant fixé sur ses manques et carences. Il se positionne “en victime des aléas de la vie, en attente de réparation”. Il projette « ses ressentis d’impuissance, d’injustice et de maltraitance sur toutes les instances d’autorité ». La médiatisation de son cas pourrait avoir “favorisé des réactions de toute puissance”. Il apparaît peu à même « d’accepter sans réaction les frustrations et les contraintes inhérentes à un processus de réhabilitation sociale ». Il présente « des caractéristiques d’un fonctionnement psychique égocentrique avec des tendances à la susceptibilité et à l’impulsivité, en dépit de ses désirs d’ouverture ». Il peut présenter “des tendances manipulatrices ».

La deuxième expertise psychiatrique confiée aux très renommés docteurs Michel Dubec et Roland Coutanceau , conduite entre le 18 août et le 19 octobre 2009, ne met pas en évidence de pathologie psychiatrique majeure ayant pu abolir le discernement de Marc Machin. Celui-ci l reste donc accessible à une sanction pénale. Les deux experts le décrivent comme un sujet égocentré « ayant une  trajectoire de vie à tonalité psychopathique sur fond d’une enfance un peu chaotique ». Concernant l’agression de Marie, Marc Machin explique la violence de sa réaction en réponse au sentiment qu’il avait eu que la victime se posait « en justicière ». Il aurait interpellé son geste de l’agripper comme une volonté de le faire interpeller. Il reconnaît une dimension voyeuriste assez forte avec un plaisir de filmer l’intimité des femmes en s’interrogeant de manière un peu obsédante sur celles-ci, ce que les deux experts analysent comme « le surinvestissement fantasmatique d’une curiosité infantile ». Là encore, un suivi psychologique a été préconisé…

SV

(*) Afin de protéger l’identité des trois victimes leurs prénoms ont été changés

AP

Quatre hommes et une femme, considérés pour la plupart comme proches des milieux nationalistes corses, comparaissent à partir de mercredi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir hébergé et aidé Yvan Colonna durant les quatre ans de sa cavale. L’assassin présumé du préfet Erignac sera présent, lui aussi, sur le banc des prévenus pour y répondre d’infractions à la législation sur les armes.

Ce procès, qui doit durer deux semaines devant la 16e chambre du tribunal correctionnel, s’ouvre alors que la Cour de cassation n’a pas encore examiné le pourvoi du “berger de Cargèse” contre sa condamnation en mars 2009 par la cour d’assises d’appel à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une mesure de sûreté de 22 ans pour avoir abattu le préfet de Corse Claude Erignac le 6 février 1998 à Ajaccio.

Yvan Colonna, présenté alors comme l’homme le plus recherché de France, a réussi à échapper à toutes le forces de police et de gendarmerie entre sa fuite le 23 mai 1999 et son arrestation le 4 juillet 2003 aux abords d’une bergerie isolée d’Olmeto (Corse-du-Sud) par des policiers du RAID. Agé de 50 ans, il est actuellement détenu à la maison d’arrêt de Fresnes (Val-de-Marne).

Selon l’ordonnance de renvoi établie par les juges antiterroristes Gilbert Thiel et Laurence Le Vert, Yvan Colonna a bénéficié durant sa cavale de la “logistique organisée, structurée et très cloisonnée” d’une “association de malfaiteurs” qui lui a permis pendant plus de quatre ans de se soustraire à la justice.

Trois des cinq prévenus jugés au côté de Colonna -Marc Simeoni, André Colonna d’Istria et Patrizia Gattaceca- sont renvoyés pour recel et association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, les deux autres -Frédéric Paoli et Claude Serreri- uniquement pour recel de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Contrairement à Colonna, ces cinq prévenus comparaissent libres, sous contrôle judiciaire.

Marc Simeoni, 36 ans, fils d’Edmond Simeoni -figure historique du nationalisme corse-, est présenté par les juges d’instruction comme “l’un des pivots” de cette association de malfaiteurs et “l’un des plus éminents soutiens” de Colonna. Il est reproché à ce consultant en management d’avoir mis à la disposition du meurtrier présumé “à plusieurs reprises et sur de longues périodes” un appartement situé en plein centre de Bastia, mais également sa carte bancaire pour des achats en ligne. Pourtant, Simeoni affirme n’avoir jamais rencontré le berger de Cargèse durant sa cavale ni lui avoir apporté un quelconque soutien matériel ou logistique.

Contrairement à Simeoni, Patrizia Gattaceca, 52 ans, reconnaît être venue en aide à Yvan Colonna durant sa cavale et l’avoir hébergé durant l’été 2002 puis durant l’hiver 2002-2003 chez elle, une maison isolée du petit village de Penta Acquatella (Haute-Corse). Professeur de langue corse, Patrizia Gattaceca est plus connue comme chanteuse et membre fondatrice des Nouvelles Polyphonies Corses, groupe avec lequel l’artiste a obtenu une Victoire de la musique en 1992. “Persuadée” de l’innocence de Colonna, elle revendique ses actes au nom de la “règle d’or de l’hospitalité”, mais nie avoir pris part à un quelconque réseau.

Autre personnage clé de l’accusation, André Colonna d’Istria, 51 ans, propriétaire d’un camping à Propriano (Corse-du-Sud), est soupçonné d’avoir participé à la constitution de ce réseau de soutien logistique ayant fourni à Yvan Colonna “plusieurs structures clandestines d’hébergement”. Début 2001, ce nationaliste présenté comme proche du FLNC du 5-Mai aurait ainsi sollicité Frédéric Paoli, le propriétaire de la fameuse bergerie d’Olmeto, pour qu’il accueille le fuyard.

Paoli, 49 ans, interpellé quelques heures après Colonna, reconnaît avoir hébergé ce dernier “en connaissance de cause” d’avril à octobre 2001, puis encore trois semaines avant son arrestation, mais, dit-il, à la demande expresse d’André Colonna d’Istria. Enfin, Claude Serreri, 52 ans, frère de l’ex-compagne de Colonna -Pierrette Serreri- et exploitant d’un débit de boissons à Propriano, est soupçonné d’avoir apporté au fugitif une aide seulement “ponctuelle” lors de son séjour à la bergerie d’Olmeto.

Si les enquêteurs pensent avoir à peu près reconstitué les deux dernières années de la cavale de Colonna par l’intermédiaire de ces cinq prévenus, des zones d’ombre persistent sur les deux premières années (printemps 1999-printemps 2001).

Quant à Yvan Colonna, il est poursuivi pour détention et port d’armes sans autorisation lors de son arrestation, à savoir une grenade à main explosive à fragmentation contrôlée et un chargeur de pistolet automatique contenant 12 cartouches de calibre 9mm, signe, selon les juges, qu’après plus de quatre années de clandestinité, le meurtrier présumé n’avait toujours pas renoncé “au recours à la violence”. AP

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L’injustice sociale est une évidence si familière, elle est d’une constitution si robuste, qu’elle paraît facilement naturelle à ceux mêmes qui en sont victimes.
Aymé (Marcel)

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L’indépendance du Parquet : on est prié de ne pas rire !


Démonstration en 20 exemples (récents) par le /Syndicat de la magistrature que l’indépendance du Parquet est une fable et que la suppression programmée du juge d’instruction est plus que dangereuse.

Une affaire sensible ne prospère pas devant un tribunal correctionnel si le parquet ne l’a pas souhaité. Avec la suppression annoncée du juge d’instruction, il faudra un miracle. Argumentaire du Syndicat de la Magistrature en 20 exemples.

Bakchich.info publie ci-dessous l’intégralité de la longue et édifiante “Lettre ouverte à ceux qui feignent de croire en l’indépendance du Parquet” signée du Syndicat de la Magistrature :

« Le parquet n’étouffe pas les affaires » Jean-Claude MARIN, procureur de la République de Paris le 10 novembre 2005

« Il serait erroné de conclure de la hiérarchie réelle et indispensable du parquet que ses décisions sont nécessairement celles de la hiérarchie. Dans les sociétés modernes, le propre du chef est d’aider à l’émergence des bonnes décisions, en favorisant le dialogue et l’échange. Il n’est bien sûr pas question d’imposer d’en haut des décisions toutes faites. Cela ne fonctionnerait pas ». Laurent LE MESLE, procureur général de Paris Le 9 janvier 2009
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« Enterrer des affaires, je ne vois pas pourquoi, et je ne vois pas surtout comment ». Michèle ALLIOT-MARIE, garde des sceaux Le 5 juillet 2009

« Croyez-vous que, aujourd’hui, on puisse arrêter une affaire sensible ? C’est impossible et c’est heureux » Nicolas SARKOZY, président de la République Le 8 juillet 2009

« Je remarque que, dans le passé, même s’il y a eu des tentatives de bloquer certaines enquêtes, elles n’ont jamais atteint leur but puisque les médias s’en sont saisis ». Rachida DATI, député européen Le 29 août 2009
http://www.bakchich.info/IMG/jpg_Maman_Dati.jpg
« La nature ainsi que la structure du parquet donnent aux magistrats la possibilité d’agir selon les principes de hiérarchisation interne, d’indivisibilité et d’indépendance » Rapport dit du « comité Léger » Le 1er septembre 2009

Mesdames et Messieurs les représentants du pouvoir exécutif, Messieurs les hauts procureurs,

Par vos déclarations angéliques tout entières au service d’un projet politique d’asservissement de la justice, vous contribuez, avec l’autorité qui est la vôtre, à mystifier le peuple français. Vous n’hésitez pas, alors que se joue le destin d’une institution, le juge d’instruction – qui, malgré ses défauts, dont nous étions prêts à discuter, présentait l’immense avantage d’une certaine indépendance – à fausser les termes d’un débat essentiel en affectant de croire que le ministère public, qui vous est tout acquis, pourra mener toutes les enquêtes avec la même indépendance que le juge que vous entendez supprimer.

Vous avez une conscience aiguë, aux fonctions qui sont les vôtres, de la duplicité de votre discours. Vous percevez parfaitement l’un des enjeux principaux de votre réforme, qui est d’anéantir l’une des principales garanties du système pénal actuel, et de contrôler sans réserve toute la justice, alors même que vous savez que son indépendance a été pensée au bénéfice du peuple et non à celui de ses juges.

Le droit comparé vous enseigne que le parquet français est celui dont le rapport entre l’étendue de ses pouvoirs et la précarité de son statut est le moins porteur de garanties pour le justiciable. La Cour européenne des droits de l’Homme vous l’a clairement dit : le ministère public ne présente pas les caractéristiques d’une autorité judiciaire parce qu’il n’est pas indépendant du pouvoir exécutif. Qu’à cela ne tienne : vous renforcez encore son pouvoir sans changer son statut.

Nous n’ignorons pas plus que vous les objectifs de votre discours, parce que nous travaillons chaque jour dans vos parquets, ou à côté, comme juges du siège, mais également au ministère de la justice, où se décide chaque jour le sort des affaires que vous appelez « sensibles ». Nous savons qu’il s’agit pour vous de garder le contrôle absolu de ces affaires, quelles qu’en soit le coût pour la démocratie.

Aujourd’hui, afin que chacun puisse se faire une opinion qui ne soit pas faussée par votre propagande, nous rappelons les faits qui confortent nos inquiétudes et que vous ne sauriez honnêtement contredire : tel qu’il est conçu et tel qu’il fonctionne, le parquet français n’offre pas les garanties minimales d’indépendance et d’impartialité qui vous permettraient de lui confier la direction de toutes les enquêtes.
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Meaux, avril 2004. Un juge d’instruction, saisi deux ans plus tôt pour crimes contre l’humanité dans l’affaire dite des « disparus du Beach », a réuni suffisamment d’éléments pour penser que Jean-François N’DENGUE, le chef de la police congolaise à l’époque des faits, a participé aux crimes sur lesquels il enquête. Celui-ci est interpellé le 1er avril 2004, déféré le lendemain, mis en examen et placé en détention provisoire, eu égard aux risques évidents de fuite, aux risques de concertation et à la gravité des faits. De manière surprenante au regard des pratiques quotidiennes des parquets, le ministère public n’a pas requis cette incarcération. Comme la défense de Jean-François N’DENGUE, le parquet fera appel du placement en détention, de façon complètement inaccoutumée. Plus grave, avec une diligence extraordinaire, le parquet général réussira à faire juger cet appel à deux heures du matin, dans la nuit du 2 au 3 avril 2004, réunissant en catimini un greffier et trois magistrats. Est-ce une survivance de la Françafrique ?

Basse Terre, depuis 2006 : des plaintes sont déposées par plusieurs associations pour « administration de substances nuisibles », s’agissant de l’utilisation, postérieurement à son interdiction en 1993, du chlordécone, un pesticide destiné à éradiquer un parasite des bananiers, dont l’utilisation a provoqué la mort de nombreuses personnes. Stratégie du parquet devant cette affaire de santé publique qui, aux Antilles, a traumatisé la population : contester, jusque devant la Cour de cassation, la recevabilité à agir des parties civiles, afin de faire annuler l’ensemble du dossier. Il est vrai que ce dossier a été ouvert sur constitution de partie civile en 2006, devant l’inertie du ministère public. Bien sûr, la Cour de Cassation a donné tort au parquet, et l’enquête a pu se poursuivre, délocalisée au pôle de santé publique de Paris. Détail : les possibles mis en cause dans cette affaire sont de riches industriels, tout l’opposé, en somme, des victimes…

Paris, tribunal aux armées, 6 février 2006 : par ordonnance, la juge d’instruction de ce tribunal estime recevables quatre plaintes accusant l’armée française, lors de l’opération Turquoise, de complicité de génocide au RWANDA en 1994. Ce faisant, elle s’oppose frontalement au parquet qui a pris des réquisitions contraires et qui, fait assez rare, décide de faire appel de cette décision sur la recevabilité. Le 29 mai 2006, malgré des réquisitions contraires, la chambre de l’instruction devait définitivement valider ces plaintes. Le parquet avait déjà tout fait pour ne pas enquêter sur cette affaire : saisi des plaintes avec constitution de partie civile, il avait, là encore de façon inaccoutumée, refusé d’ouvrir une
information judiciaire, au prétexte que les plaintes n’étaient pas suffisamment étayées – alors que justement, l’objet de l’information judiciaire aurait été d’étayer ces plaintes ! Question : les conséquences politiques prévisibles d’une telle affaire sont-elles dénuées de tout lien avec l’abdication par le parquet dans ce dossier de son rôle d’autorité de poursuite ?

Paris, octobre 2006, affaire BORREL. Sophie CLEMENT, la juge qui instruit ce dossier, recueille des indices graves ou concordants contre deux ressortissants de Djibouti, soupçonnés d’avoir participé à l’assassinat du juge Bernard BORREL. Comme ces deux individus sont en fuite, elle demande au parquet de PARIS de se prononcer sur la délivrance de mandats d’arrêt. Le parquet répond que cette délivrance est prématurée, alors que le crime date d’octobre 1996, et que l’ADN de l’un de ces individus a été retrouvé sur le vêtement du défunt ! Maître MORICE, l’avocat de la veuve BORREL, évoque une « obstruction systématique du parquet dans la recherche de la vérité ». II est vrai que dans une affaire connexe de subornation de témoins, le parquet général de VERSAILLES s’était déjà opposé à la délivrance de deux mandats d’arrêt contre le Procureur et le chef des services secrets de Djibouti, sans, bien sûr, être suivi par la chambre de l’instruction, qui avait confirmé la délivrance de ces mandats. A partir de mai 2007, toujours extrêmement « indépendant » de l’exécutif, qui soutient désormais la thèse de l’assassinat, le procureur de Paris prend un communiqué dans lequel il explique pourquoi il fait sienne la thèse criminelle.

Créteil, juin 2007. Des écoutes téléphoniques laissent penser que Christian PONCELET, alors président du Sénat, pourrait être intervenu pour obtenir des marchés publics en faveur d’un homme d’affaires, moyennant finances. Ces écoutes sont transmises au parquet de Paris, qui décide prudemment de ne pas ouvrir d’information judiciaire. Ce n’est que près de deux ans plus tard, en mars 2009, alors qu’il avait quitté ses hautes fonctions depuis plusieurs mois, que Christian PONCELET sera entendu, hors garde à vue, par la police. La décision de ne pas saisir un juge d’instruction, et le train de sénateur pris par l’enquête, n’ont évidemment rien à voir avec quelque mansuétude que ce soit pour un homme alors au pouvoir.

Versailles, octobre 2007 : après avoir terminé d’instruire l’affaire dite « de la fondation Hamon », dans laquelle Charles PASQUA, André SANTINI et une quinzaine de personnes étaient mis en examen pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêt, la juge d’instruction communique le dossier au parquet pour règlement. Un an plus tard, c’est-à-dire quatre fois le délai légal et nonobstant le caractère sensible du dossier (André SANTINI étant par ailleurs secrétaire d’Etat), le parquet adresse au juge un réquisitoire supplétif. Mais comme la juge d’instruction estime avoir suffisamment d’éléments, elle refuse de reprendre ses investigations, qui ne lui paraissent pas de nature à faire avancer la vérité, mais plutôt à retarder le dossier. Le procureur de la République fait alors appel de son ordonnance, soutenu par le procureur général. Le 20 mars 2009, la chambre de l’instruction ordonne le supplément d’information. La belle constance du parquet et de la chambre de l’instruction à vouloir faire perdre encore plusieurs mois à une affaire déjà vieille de six ans, afin d’affûter les charges contre un secrétaire d’Etat et un ancien ministre, ne peut que susciter l’admiration.

Paris, octobre 2007 : Le casino « indépendant » de Gujan-Mestras, en Gironde a déposé plainte avec constitution de partie civile en mars 2007 pour favoritisme. Il soupçonne le ministère de l’intérieur d’avoir protégé les intérêts financiers des grands groupes que sont Partouche et Barrière, à son détriment. Ce « petit casino » a en effet obtenu devant les juridictions administratives plusieurs annulations de décisions en défaveur du ministère de l’intérieur, relatives à l’exploitation de machines à sous supplémentaires. La gérante du casino avait peu d’espoir de voir sa plainte aboutir. Agacée, elle dépose en octobre 2007 une autre plainte pour extorsions contre Bernard LAPORTE,

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très en cour à Paris, qui s’était vanté de pouvoir lui obtenir, moyennant finances, la précieuse autorisation. Il s’agissait, d’après lui, d’une « plaisanterie ». Elle n’a pas été déçue : le 7 mars 2008, le parquet de Paris classe purement et simplement cette plainte. S’agissant du premier dossier, le procureur de la République demande à la doyenne Françoise NEHER de déclarer la plainte irrecevable, ce que celle-ci refuse de faire. Appel du parquet. Le 11 avril 2008, malgré les réquisitions contraires du procureur général, la chambre de l’instruction confirme que la plainte est recevable et que l’affaire doit être instruite. Le procureur de Paris a eu raison de se méfier : le 17 septembre 2008, la juge d’instruction Françoise DESSET a fait une perquisition place Beauvau…

Nanterre, février 2008. Le juge d’instruction qui enquête sur les emplois fictifs de la ville de Paris souhaite se dessaisir de son dossier au profit d’une juge d’instruction parisienne qui enquête sur l’affaire dite des « chargés de mission » de la même ville. Problème : cette dernière a mis, dans ce dossier, Jacques CHIRAC en examen au mois de novembre précédent, et elle ne fait pas partie des juges qui se laissent impressionner. Dans un bel élan de solidarité avec la défense, le parquet de Nanterre s’oppose – fait rarissime – au dessaisissement. Le juge ne suit pas ses réquisitions, et le parquet fait appel de l’ordonnance – cas sans doute unique dans l’histoire judiciaire française. La Cour d’appel confirme le dessaisissement : le parquet général se pourvoit en cassation et obtiendra enfin gain de cause… Il n’en demeure pas moins qu’en s’opposant à la jonction, le procureur de Nanterre et le procureur générale de Versailles ont été salués par Maître VEIL, l’avocat de Jacques CHIRAC. En effet, celui-ci ne pouvait pas juridiquement faire appel de l’ordonnance de dessaisissement : heureusement que le ministère public veillait.

Paris, 12 février 2008. Deux juges d’instruction, en charge de l’affaire dite des faux électeurs du cinquième arrondissement, renvoient notamment Jean et Xavière TIBERI devant le tribunal correctionnel. Depuis avril 2006, ces magistrats attendaient les réquisitions du parquet qui ne sont jamais venues. Furieux de ce renvoi, le procureur de la République Jean-Claude MARIN n’a pas hésité à dénoncer avec un aplomb incroyable « une immixtion des juges dans la campagne électorale. Je note que les juges auraient pu renvoyer Jean TIBERI plus tôt, pourquoi ne l’ont-ils pas fait ? ». Ce magistrat oubliait de dire que, le 23 novembre 2007, les juges d’instruction lui avaient signifié qu’ils rendraient leur ordonnance sans les réquisitions si celles-ci n’arrivaient pas. Il serait évidemment excessif d’analyser l’étonnante lenteur du parquet comme une volonté de faire traîner encore un peu plus une procédure ouverte depuis plus de dix ans…

Créteil, janvier 2009 : le tribunal correctionnel condamne quatre policiers à huit mois d’emprisonnement avec sursis pour des violences aggravées, condamnation dont ils font appel. Le parquet n’avait pourtant pas épargné ses efforts pour éviter que cette affaire arrive entre les mains du tribunal, requérant deux non-lieux pendant l’instruction, et ne demandant pas de peine lors de l’audience. Cette affaire ne susciterait aucun commentaire s’il n’était observé que le parquet ne manifeste pas une telle mansuétude dans les affaires quotidiennes de violences.

Créteil, avril 2009 : le procureur de la République requiert un non-lieu au bénéfice de René DAHAN. Le 27 octobre 2006, ce commerçant et sa femme sont agressés chez eux par trois individus. Au terme d’une bagarre, René DAHAN se saisit de l’arme d’un des agresseurs, provoquant leur fuite. Il tire trois balles dans de dos de l’un d’eux qui meurt. René DAHAN est mis en examen pour meurtre et placé quelques jours en détention provisoire à la demande du parquet. Nicolas SARKOZY, alors ministre de l’intérieur, écrit un courrier au ministère de la justice, pour s’offusquer de cette détention : « cette affaire suscite une émotion considérable parmi nos concitoyens, qui ont du mal à admettre qu’un honnête homme, agressé chez lui, menacé de mort avec une arme soit en retour mis en examen et placé en détention provisoire ». Durant la première partie de l’information judiciaire, c’est-à-dire avant les propos de Nicolas SARKOZY, le parquet avait réfuté la thèse de la légitime défense. Mais, bien sûr, analyser les réquisitions de non-lieu, inhabituellement signées par le procureur de la République en personne, comme un gage donné aux plus hautes autorités de l’Etat relève de la plus insigne mauvaise foi.
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Paris, 7 mai 2009 : le parquet fait appel de l’ordonnance de recevabilité des plaintes avec constitution de partie civile déposées contre des chefs d’état africains pour recel et complicité de détournements de biens publics et privés. Pourtant, au moment des dépôts de plaintes simples en mars 2007, le parquet les avait jugées parfaitement recevables, puisqu’une enquête avait été diligentée, classée en novembre 2007 pour cause « d’infraction insuffisamment caractérisée ». C’est donc des plaintes avec constitution de partie civile que les associations Transparence Internationale, Sherpa, ainsi qu’un citoyen gabonais étaient contraints de déposer en décembre 2008, plaintes déclarées recevables le 5 mai 2009 par la doyenne des juges d’instruction. Le 17 septembre 2009, la chambre de l’instruction a examiné la recevabilité de ces plaintes et le représentant du parquet général a requis avec un aplomb assez remarquable leur irrecevabilité. Il a en effet soutenu que cette affaire relevait de l’intérêt général, dont seul le ministère public pouvait assurer la défense. Or, justement, le ministère public avait décidé de ne pas agir dans ce dossier. Ou comment préserver les relations avec nos amis chefs d’Etats africains…

Rennes, 9 mai 2009 : une motarde, qui circule sur une bretelle d’autoroute entre Rennes et Lorient, est dangereusement doublée par un gros 4X4 qui s’amusait à la coller au point d’avoir touché le coffre arrière de la motocyclette. Le véhicule prend la fuite et, d’après la plaignante, ses occupants lui font un bras d’honneur. Elle parvient à relever le numéro d’immatriculation et dépose plainte. La police effectue alors ses recherches et comprend qu’il s’agit d’un véhicule appartenant au premier ministre François FILLON, et que le conducteur n’était autre qu’un de ses fils. Celui-ci a été convoqué pour un… rappel à la loi. La lutte contre l’insécurité routière, priorité affichée du gouvernement, trouve parfois des limites.

Paris, juin 2009 : Qui a commandité l’attentat de Karachi le 8 mai 2002, dans lequel quatorze personnes dont onze français ont trouvé la mort ? Al Qaïda comme l’enquête s’acharne à le démontrer ? Cet attentat n’est-il pas au contraire le résultat de représailles à la suite de l’arrêt en 1995 du versement de commissions au Pakistan dans la foulée de contrats de livraison de sous-marins, commissions ayant pu générer des rétro-commissions ayant servi à financer la campagne électorale d’Edouard BALLADUR en 1995 ? Ce qui est certain en revanche, c’est que plusieurs éléments qui militaient en ce sens, parvenus à la connaissance du parquet, n’ont pas été joints au dossier des magistrats instructeurs. Quoi qu’il en soit, le chef de l’Etat, qui avait un rôle essentiel dans la campagne d’Edouard BALLADUR en 1995, a qualifié cette hypothèse de « fable ». Le parquet de Paris lui a immédiatement emboîté le pas en publiant un communiqué pour affirmer qu’aucun « élément objectif » ne reliait l’attentat à un contentieux franco-pakistanais.

Paris, juillet 2009 : révélations sur l’affaire dite des moines de Tibéhirine. En 1996, sept moines français sont exécutés en Algérie. A l’époque, le drame est attribué aux Groupes Islamistes Armés. Aucune enquête n’aura lieu, contrairement à la pratique la plus systématique lorsqu’un ressortissant français meurt à l’étranger de mort violente. En juillet 2009, un témoignage vient conforter une thèse qui affleurait déjà dans le dossier : ces assassinats pourraient résulter d’une « erreur » de l’armée ou des services secrets algériens. Alain MARSAUD, ancien juge d’instruction antiterroriste et ancien député UMP, affirme : « c’est une affaire qui a été enterrée volontairement ». Il rappelle qu’en 1996, il avait reçu des informations essentielles mettant en cause l’Etat algérien dans ce dossier. Il s’en était ouvert à Jacques TOUBON, alors garde des sceaux, qui lui avait dit qu’il « n’était pas question d’ouvrir une information judiciaire ». Effectivement, l’information judiciaire ne sera pas ouverte avant… 2004, soient huit ans après les faits. Ce qui n’empêche pas aujourd’hui certains d’affirmer que le parquet peut, à sa guise, ouvrir des informations judiciaires et que le garde des sceaux n’a absolument pas le pouvoir de s’y opposer.

Ajaccio, 31 juillet 2009 : le juge d’instruction Jean-Bastien RISSON renvoie devant le tribunal correctionnel plusieurs individus pour des vols de yachts de luxe. Parmi ces mis en examen, Imad et Moez TRABELSI, neveux du président tunisien BEN ALI. Le parquet décide alors de ne pas convoquer à l’audience les deux neveux, décidant de disjoindre leur sort, et assurant qu’il seront « jugés rapidement en Tunisie ». Le 30 septembre 2009, le tribunal a donc condamné les seconds couteaux, mais pas les frères TRABELSI. Cette attitude incroyable du parquet, en totale contradiction avec l’ordonnance du juge d’instruction, peut-elle s’analyser autrement que comme une volonté de soustraire deux dignitaires du régime tunisien à la justice Française ?

Pornic, 26 août 2009, un individu est mis en garde à vue pour refus d’obtempérer : il a roulé largement au dessus de la vitesse autorisée, et ne s’est pas arrêté lorsque les gendarmes ont voulu l’interpeller. Ces derniers comprennent vite que l’intéressé n’est pas n’importe qui : il est le frère de Jean-Marie HUET, directeur des affaires criminelles et des grâces de Michèle ALLIOT-MARIE. Ils informent immédiatement le parquet de Saint-Nazaire, qui leur demande de remettre cet homme de bonne fratrie en liberté, et « que la procédure lui soit transmise sous pli fermé ». Les gendarmes ajoutent dans leur rapport : « un classement sans suite est déjà décidé par l’autorité judiciaire ». Tellement énervés, les gendarmes, qu’ils ont fait paraître la nouvelle dans leur revue mensuelle. Enervés par quoi, d’ailleurs ?

Paris, septembre 2009, ouverture du procès dit « Clearstream ». Le procureur de la République tient lui-même le siège de l’accusation. Quelques jours plus tôt, il a affirmé sur une radio que Dominique DE VILLEPIN avait été « un bénéficiaire parfaitement conscient » de la falsification de fichiers nominatifs. A l’époque pourtant où celui-ci était premier ministre, le parquet de Paris développait une vision très différente du dossier, rapportée par le Canard Enchaîné : « Dominique de Villepin ne pouvait imaginer que Jean-Louis GERGORIN ait mis sa réputation en jeu en utilisant des listings qu’il savait faux ». Relever que l’argumentation juridique du parquet de Paris dans cette affaire sert opportunément mais systématiquement les intérêts du pouvoir en place relève, à l’évidence, de la calomnie.

Paris, 1er septembre 2009 : le parquet classe sans suite l’enquête ouverte contre François PEROL pour prise illégale d’intérêt. Au début de l’année 2009, le secrétaire général adjoint de l’Elysée a été nommé à la tête des Banques Populaires et des Caisses d’Epargne, sans que la Commission de Déontologie ne soit saisie. Le président de la République avait alors affirmé faussement que la commission avait été saisie. Devant l’ampleur des protestations, une enquête a donc été ouverte. Deux mois plus tard, le député Jérôme CAHUZAC a indiqué qu’ « aucune audition n’avait eu lieu dans le cadre de cette enquête », accusant le pouvoir de vouloir l’étouffer.Qui pourra encore accuser le parquet de Paris d’une trop grande sévérité envers les justiciables ?
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Nanterre, septembre 2009. Dans la procédure opposant Liliane BETTENCOURT et sa fille Françoise, le journal Le Monde titre : « Affaire BETTENCOURT : le parquet tente de bloquer la procédure ». En effet, lors de l’audience du 3 septembre 2009 où Françoise BETTENCOURT poursuivait le photographe François-Marie BANIER pour abus de faiblesse par voie de citation directe, le parquet a pris des réquisitions tendant à contester la recevabilité de la partie civile. Le tribunal n’a pas suivi ces réquisitions, et le parquet a immédiatement fait appel. La cour d’appel, par arrêt du 18 septembre 2009, a débouté le parquet de son appel. Il est vrai qu’imaginer que le soutien du parquet à la cause de la femme la plus riche de France ne résulte pas que d’une application scrupuleuse des règles de droit serait parfaitement inconvenant. Selon que vous serez puissant ou misérable…

Nanterre : l’enlisement des dossiers… Affaire de l’informatisation des collèges des Hauts-de-Seine, affaire du marché du chauffage du grand quartier d’affaire, affaires de la SEM92, de la SEM Coopération, affaire de la rénovation des collèges du département… Le procureur de Nanterre, Philippe COURROYE, nommé contre l’avis du CSM et décoré par le Président de la République, ne manque pas de travail. Il a pourtant choisi de conserver la maîtrise de certains de ces dossiers en ne confiant pas les enquêtes à un juge d’instruction. Lorsqu’il l’a fait, c’est d’ailleurs la police qui a cessé de travailler, comme l’a révélé un courrier d’une juge versé dans un dossier. Comme le remarque le journal Le Point en septembre 2008 : « La plupart des dossiers progressent peu depuis deux ans. Nommé en mars 2007 à la tête du parquet de Nanterre, le procureur, a surpris par son manque de pugnacité ». Surpris, vraiment ?
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Paris, la valse des non-lieux. Ces derniers mois, on ne compte plus les dossiers sensibles dans lesquels le procureur de Paris a demandé aux juges d’instruction de prononcer des non-lieux. L’affaire des 3 millions d’euros dont auraient bénéficié Charles PASQUA et Jean-Charles MARCHIANI de la part des frères SAFA ? Non-lieu requis le 30 juin 2009. L’affaire « pétrole contre nourriture » et ses 22 mis en examen ? Non-lieu requis pour Charles PASQUA, Christophe de MARGERIE et son équipe, malgré le projet de renvoi au correctionnel du substitut régleur, croit savoir Charlie-Hebdo. L’affaire VIVENDI ? Non-lieu général requis en janvier 2009, malgré les conclusions de l’AMF. Ce qui vaut à Jean-Claude MARIN le surnom, dans ce même journal, de « roi des fossoyeurs ». Celui là même qui jurait naguère, la main sur le cœur, que « le parquet n’étouffe pas les affaires ».

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Paris, 28 septembre 2009. Mais l’affaire d’entre les affaires, celle dans laquelle le parquet ne se sera rien épargné pour qu’elle n’aboutisse pas, c’est évidemment celle dite des « chargés de mission de la Ville de Paris », dans laquelle Jacques CHIRAC et de nombreuses personnalités sont mises en examen pour avoir fait payer par la ville de PARIS des employés qui travaillaient en réalité à tout autre chose. Jugeons-en plutôt : à la suite de la réception d’un courrier anonyme par un juge d’instruction de Créteil, qui le transmet à PARIS, une minuscule enquête est ouverte par le parquet, presque immédiatement classée sans suite. En 1998, grâce à la pugnacité d’un contribuable parisien, l’enquête redémarre sur plainte avec constitution de partie civile. A la faveur de la loi sur l’immunité pénale du chef de l’Etat, elle est mise en attente pendant quelques années. Début 2009, la juge d’instruction Xavière SIMEONI, qui a achevé son enquête, transmet le dossier au parquet pour réquisitions. Surprise : durant le procès CLEARSTREAM, Jean-Claude MARIN trouve le temps de signer un réquisitoire de non-lieu général. Quelques éléments de contexte : le procureur de la République de Paris, qui a signé ces réquisitions, a été directeur des affaires criminelles et des grâces de Dominique PERBEN. Surtout, Laurent LE MESLE, son supérieur hiérarchique, a été le propre conseiller de Jacques CHIRAC pour les affaires judiciaires à l’Elysée. Comment concilier ces fonctions passées avec l’apparence d’impartialité qui doit s’attacher aux fonctions de magistrat ? Le Canard Enchaîné s’est amusé à décrire les contorsions auxquelles s’est livré Jean-Claude MARIN (« créez votre emploi fictif grâce au proc’ de Paris »). Il reviendra à la juge d’instruction de dire le droit dans cette affaire : ce n’est pas tous les jours que la question se pose de renvoyer un ancien président de la République devant le tribunal. Pour cela, il ne faut qu’un principe : l’impartialité, et qu’une qualité : l’indépendance.
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Ne cherchez pas de scoop, il n’y en a pas. La presse s’est déjà fait l’écho de ces faits, ce qui n’a pas empêché leur répétition… Une actualité chassant l’autre, la mémoire nous fait parfois défaut et on omet d’analyser tous les ressorts de ces affaires judiciaires. Cette compilation ne révèle qu’une chose : la totale hypocrisie de votre discours. Il est aujourd’hui très difficile qu’une affaire sensible prospère devant un tribunal correctionnel lorsque le parquet ne l’a pas souhaité. Demain, avec la suppression annoncée du juge d’instruction, il faudra un miracle. Mais tout cela, vous le savez, puisque c’est essentiellement dans cet objectif que vous l’avez décidée.

signé : LE SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE
Source : Bakchich Infos

mardi 11 mai 2010

  • La salle d'audience du tribunal.

    La salle d’audience du tribunal.

Beaucoup le croient fermé. Pourtant, le tribunal d’instance reste actif, au point même d’avoir sauvé la mise lors de la dernière réforme de la carte judiciaire, contrairement à Fougères et Vitré.

Reportage« Beaucoup de gens pensent que nous avons fermé. » C’est Pascale Jegou, la greffière en chef, qui l’avoue. Pourtant, le tribunal fonctionne bel et bien. À l’intérieur du bâtiment construit en 1870, c’est calme, certes. L’activité, elle, se passe derrière la porte du greffe. Cinq fonctionnaires y travaillent. En toute discrétion.

Le conseil des Prud’hommes, transféré à Rennes, a fermé en 2008. Mais il y a toujours des audiences, rue Joseph-Desmars. Avec des jugements au pénal et au civil. Deux types de magistrats y rendent la justice.

D’abord, un juge professionnel, à l’heure actuelle délégué par le tribunal de grande instance de Rennes. « Un magistrat est parti à la retraite, le poste est toujours vacant », explique Pascale Jégou.

Ensuite, un juge de proximité. Cette strate de juridiction a été instituée en 2003. À l’époque, le monde de la magistrature s’était déchaîné contre ces juges non-professionnels, souvent d’anciens policiers ou avocats.

Un gros service : les tutelles

Au pénal, les magistrats ne jugent à Redon que les infractions mineures. Dites de première à quatrième classe. « Des contraventions, excès de vitesse, ou ivresses manifestes sur la voie publique », indique la greffière en chef. Pascale Jégou estime à une centaine le nombre d’affaires par année. Les audiences ont lieu tous les deux mois. Passée la catégorie des délits de cinquième classe, les jugements se font à Rennes.

Mais le gros de l’activité du tribunal porte sur les affaires civiles. Principaux dossiers : les baux ruraux, le surendettement, et surtout, le service des tutelles. « Il concerne les personnes qui ont besoin d’être encadrées dans leur vie quotidienne », explique Pascale Jégou.

Elles sont âgées, malades, ou handicapées. Les tutelles des mineurs représentent 300 dossiers par an, sur un total de 2 000 affaires traitées. Quant à la conciliation, surprise, c’est une activité infime du tribunal. « 30 à 40 % des litiges se règlent par le circuit judiciaire classique, estime Pascale Jégou. Souvent à l’amiable, dès la réception de la lettre recommandée envoyée par le tribunal. »

Accueillir les justiciables, leur indiquer les différentes voies possibles, les orienter selon la durée des différentes procédures, c’est aussi le rôle des employés du greffe. Pas toujours facile. « Nous devons expliquer que le juge d’instance ne s’occupe pas d’un seul dossier », déclare la greffière. D’autant que le territoire couvert par la juridiction est grand : « Nous arrivons aux portes de Rennes, vers Pont-Péan », souligne Pascale Jégou.

Rescapé

Ce qui explique sans doute le volume d’affaires traitées. Qui a peut-être été salutaire au tribunal. Avec la réforme de la carte judiciaire menée par l’ancienne Garde des Sceaux, Rachida Dati, le couperet est tombé sur les tribunaux de Vitré et Fougères. Les justiciables doivent se rendre dans la capitale bretonne.

Mais ici, tout reste complexe. Un Nicolasien, par exemple, doit se rendre au tribunal de Saint-Nazaire, alors que celui de Redon est à moins de cinq minutes. Pascale Jégou rappelle que « les magistrats redonnais demandent une extension de leur compétence territoriale aux départements voisins depuis plus de 15 ans ». Un voeu que la sous-préfecture a longtemps formulé, avant de l’obtenir. Au tribunal de Redon, on se bat aussi pour faire reconnaître la spécificité du territoire…

Comme beaucoup de Kurdes en quête de titre de séjour, l'accusé  évoque des scènes d'atrocités dans son enfance non loin de la frontière  irakienne / Christophe Bustizoom

Comme beaucoup de Kurdes en quête de titre de séjour, l’accusé évoque des scènes d’atrocités dans son enfance non loin de la frontière irakienne / Christophe Busti


Une chose est sûre, Marie-Marthe a aimé follement Izzetine Aydin de près de trente ans son cadet. Le coup de foudre en 2003 a opéré entre cette belle femme blonde, aide-soignante et ce jeune kurde de 30 ans, au physique avenant, arrivé en France deux ans plus tôt. Et si bien prospéré que, réticente au départ, la famille a adopté ce réfugié sans papiers pour sa gentillesse et son opiniâtreté à travailler dans les pires conditions. Le beau-fils est aujourd’hui d’autant plus amer qu’il a le sentiment d’avoir été trahi. D’avoir finalement donné un blanc-seing à celui qui, le soir du 7 août 2007, a poignardé de 15 coups de couteau sa belle-mère sur son balcon de l’avenue Salengro à Villeurbanne. Et cela malgré l’intervention de quatre gardiens de la paix du commissariat dans une rue toute proche. Si les proches de la victime sont prêts à aller loin dans l’introspection et la recherche de la vérité, il n’en est pas de même pour ce grand gaillard qui, avec l’aide d’un interprète, assure devant la cour d’assises le strict minimum. Rarement aussi catégorique, l’expert psychiatre Jean Canterino a balayé sans le moindre doute la thèse de l’amnésie évoquée au moment des faits : « Nous sommes en présence d’un système de défense qui relève du mensonge et de la simulation, servi sur un le ton d’un discours théâtral ». Fermez le ban. Aydin, beaucoup plus prolixe pour évoquer les scènes d’atrocité décrites par tous les candidats au statut de réfugié politique par les Kurdes de Turquie, nourrissait cette obsession d’obtenir un statut légal dans cette France qu’il avait rejointe en investissant une forte somme d’argent pour le compte de passeurs. Marie-Marthe Romain aurait elle été le maillon fort de cette naturalisation ? Sceptique, l’OFPRA avait rejeté peu de temps avant le drame la demande de papiers, flairant un mariage blanc notamment en raison de la différence d’âge. Dans les dernières semaines, les choses s’étaient dégradées dans le couple. On évoquait du bout des lèvres des scènes de violence, une consommation accrue d’alcool pour Izzettine, un désir manifeste de rupture de la part de Marie-Marthe et plus vraisemblablement une érosion des sentiments. L’avenir en cet été 2007 paraissait orageux pour celui qui allait devenir « le meurtrier sans mémoire ». Plus de gîte, d’appui dans ses démarches, retour à la clandestinité avec aux fesses un avis d’expulsion. Assez finalement pour, dans un accès de colère et une ultime explication, mettre fin à sa manière à une comédie se changeant en tragédie. Reprise des débats à 9 h 30.

Michel Girod

publié le 12.05.2010 04h00

Un ancien capitaine des pompiers, Fabrice Motch, 44 ans, comparaît à partir de lundi devant la cour d’assises des Yvelines pour avoir drogué et violé ou abusé de sept jeunes sapeurs-pompiers qu’il encadrait, ainsi que des deux fils de son ex-épouse.

L’accusé est également poursuivi pour l’assassinat du premier mari de son ex-femme dans un dossier distinct.

Somnifères

Fabrice Motch, qui était chargé de la formation des jeunes sapeurs-pompiers à l’école départementale de Trappes (Yvelines), a été arrêté en septembre 2007. Un jeune stagiaire avait appelé les secours. Lors de son interpellation, le capitaine se trouvait en compagnie de trois jeunes sapeurs-pompiers, dont l’un était inconscient.

Les trois jeunes garçons, âgés entre 14 et 17 ans, racontent que leur formateur leur a donné des pilules, qui s’avèreront être des somnifères pris avec de l’alcool, après leur avoir fait passer des tests sportifs, puis a abusé ou tenté d’abuser d’eux.

D’autres viols découverts

Fabrice Motch a reconnu les faits, indiquant aux enquêteurs avoir procédé de manière similaire avec deux autres jeunes sapeurs-pompiers en 2005 et 2006. Il dit aussi avoir violé le jeune fils de son épouse.

Deux autres apprentis sapeurs-pompiers, violés en 2001 et 2006, seront découverts au cours de l’enquête et le fils aîné de l’épouse de Fabrice Motch, qui suivait depuis 1994 la formation de sapeur-pompier sous l’autorité de l’accusé, dénoncera lui aussi des faits de viol.

Et un meurtre

L’instruction a été marquée par un rebondissement de taille: après des révélations faites par sa soeur, Fabrice Motch avoue avoir tué en décembre 1996 le premier mari de son épouse avec l’aide de celle-ci et de son frère.

SOURCE