Un homme de 33 ans comparaîtra à partir de demain devant la cour d’assises de Créteil (Val-de-Marne) pour avoir violé en guise de représailles un jeune homme auquel il reprochait d’entretenir une relation avec son ex-concubine. L’accusé, déjà condamné pour des faits de violences, est poursuivi pour “viol avec usage d’une arme”. Ses deux anciens beaux-frères, accusés de l’avoir aidé à perpétrer son crime, sont poursuivis pour “complicité de viol”. Les accusés sont d’origine ou de nationalité algérienne.

Le soir du 18 février 2007, l’accusé s’était rendu en compagnie de ses beaux-frères au domicile de son ex-compagne, à Cachan (Val-de-Marne), où cette dernière se trouvait avec son nouveau compagnon, un jeune homme d’origine africaine âgé de 21 ans. Tandis que l’un des frères retenait la femme dans sa chambre, l’ancien concubin s’en était pris violemment au jeune homme en le violant avec une barre en bois.

Profitant d’un moment d’inattention de ses agresseurs, le jeune homme avait alors réussi à s’enfuir par la fenêtre de l’appartement situé au rez-de-chaussée et à prévenir la police. Une patrouille l’avait retrouvé sur la voie publique, souffrant de multiples contusions. Quelques heures plus tard, la jeune femme s’était présentée au commissariat du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), en état de choc, pieds nus. Interrogée par les policiers, elle racontait s’être enfuie après avoir été séquestrée par sa famille et confirmait les faits survenus au cours de la soirée.

L’enquête policière, par la suite, avait mis en lumière les relations orageuses entre la jeune femme et sa famille, qui ne supportait pas la relation qu’elle entretenait avec son compagnon et qui lui reprochait de mal s’occuper de ses enfants.

AFP
04/11/2009 |

AP Nicolas VauxMontagny

Le tribunal de Paris a débouté mercredi Véronique Bernard qui avait assigné l’Etat pour faute lourde après la mort de sa soeur, Mireille Guilbault, des mains de son époux. La victime avait été tuée le 19 juin 2007 par son mari qui avait été laissé libre alors qu’il venait d’être mis en examen pour des viols qu’il lui aurait fait subir pendant quinze ans.

La plaignante a déclaré vouloir faire appel de cette décision.

L’époux avait attendu sa femme toute une nuit pour la tuer de douze balles de carabine à la sortie d’un hôtel à Vannes (Morbihan) avant de se suicider.

Selon le jugement, “aucun signal de danger n’était émis” lorsque la juge des libertés et de la détention de Poitiers avait décidé la remise en liberté du mari. “Le fait qu’un contrôle judiciaire ait été décidé, et non une mesure de détention provisoire à l’encontre de Pascal Guilbault, ne peut être constitutif d’une faute ou d’une négligence lourde, sauf à remettre en cause la fonction même de juger avec les périls de ce que cela pourrait comporter pour une société démocratique”, a dit le tribunal.

“Ce jugement est un manque de courage. On s’attaque difficilement à ses collègues”, a réagi Véronique Bernard qui était présente au moment du délibéré. “J’avais envisagé cette option. Je suis déçue car l’enjeu était de taille et ce jugement pouvait faire jurisprudence. Je n’en veux pas à l’Etat car ce n’est pas une personne mais j’attendais autre chose de la justice”, a-t-elle dit. “J’aimerais que les magistrats ne se contentent pas de faire du droit”, a ajouté la soeur de Mireille Guilbault.

Me Sophie Dechaumet, l’avocate de la plaignante avait affirmé fin septembre devant la 1ère chambre civile du tribunal de grande instance de Paris “qu’il y avait une limite à la liberté d’appréciation”. “Cette limite, c’est la faute grave de la juge des libertés” et de la détention qui avait laissé libre le mari, contre l’avis du parquet de Poitiers (Vienne), “alors que le dossier était accablant pour viols avec barbarie”. “Elle était en danger de mort réelle”, avait assuré l’avocate.

Le procureur Pauline Caby avait demandé que la plaignante soit déboutée. “C’est un geste qui n’était pas prévisible”, avait-elle dit dans son réquisitoire. “Cet homme n’avait jamais été condamné et seules des menaces dataient de 2004”. Cette remise en liberté était “conforme à la loi et à l’esprit de la loi”, avait-elle ajouté. AP

Le magistrat va reprendre ses fonctions de conseiller de Bernard Arnault et de membre du comité exécutif, pour lesquelles il a obtenu le feu vert de la commission de déontologie.

(c) Sipa

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CONSEILLER du président de la République pour les affaires judiciaires, le magistrat Patrick Ouart va retourner chez LVMH, où il prendra les fonctions de conseiller de Bernard Arnault et de membre du comité exécutif du groupe de luxe, qu’il avait déjà occupées de 2004 à 2007.

A l’Elysée, Ouart a supervisé la réforme de la carte judiciaire et de la procédure pénale. Il a également conseillé Nicolas Sarkozy dans le dossier Clearstream. Patrick Ouart est passé devant la commission de déontologie qui a rendu un avis positif sans réserves.

par la rédaction de Challenges, mercredi 4 novembre 2009.

Sur Internet

Bobigny

Tino et Reda, les assassins présumés du jeune homme de 19 ans, ont refusé d’évoquer les circonstances de leur crime au premier jour des assises.

Elodie Soulié | 04.11.2009, 07h00

Aux larmes d’une mère déchirée, ils ont répondu par le mutisme. Celui de la parole et presque celui des corps, malgré la carrure de Tino Horning, visiblement encombré de lui-même, et la sécheresse fébrile de Reda Alaouchiche, longtemps resté le visage et la nuque enfouis sous ses deux mains nouées, disparaissant presque sous le siège du box des accusés.
Au premier jour du procès de ces deux hommes de 22 ans et 24 ans, qui encourent la prison à vie pour l’assassinat de Yamine, frappé à mort et étouffé dans une cave de Bobigny, un soir de juillet 2006, la famille et les amis du jeune homme attendaient au moins des mots, au moins qu’« ils disent pourquoi ». Ils n’ont rien eu, ou alors si peu, quelques paroles laborieusement arrachées par une présidente de cour d’assises ouvertement excédée par l’apathie des accusés.

« Il reconnaît les faits mais sans émotion »

Des hommes capables de la pire et plus froide violence, mais incapables de soutenir un regard. Surtout pas celui d’une mère, effondrée jusqu’à l’évanouissement dès la lecture des faits et des blessures infligées à Yamine. Le garçon de 19 ans avait été roué de coups à la tête, étouffé ensuite par un sac en plastique. Son corps avait été découvert par ses meilleurs copains, quelques heures après une scène d’une rare violence.
Hier, les assassins présumés de Yamine ont refusé d’évoquer le meurtre tout en l’admettant. « Je ne sais pas, j’y arrive pas », a seulement lâché Tino. Reda a bien ébauché le scénario de cet après-midi et confirmé l’incroyable mobile qu’il a toujours soutenu pour expliquer son crime la crainte d’être dénoncé par Yamine, qui l’avait surpris en pleine consommation de cocaïne , puis il s’est arrêté. « Je n’arrive pas à continuer », a-t-il alors déclaré en se refermant sur lui-même, le regard dur et buté.
Pour la cour d’assises, leur silence valait apparemment lâcheté plutôt que honte et culpabilisation. L’enquêteur de personnalité venu évoquer le passé de chacun l’avait d’ailleurs perçu, en soulignant que « lorsqu’il parle des faits, Reda les reconnaît mais sans empathie, sans émotion particulière. Il ne s’amende pas ».
La cour a aussi découvert, hier, deux hommes unis dans le crime et pourtant si différents. Tino, le massif inhibé, maladroit dans son corps et avare de ses mots, un « grand gamin » grandi sans père et que son frère aîné décrit comme « un suiveur sans personnalité ». Le soir du 21 juillet 2006, Tino fut le bras armé de Reda, le commandeur aussi frêle de silhouette que l’autre est un colosse. D’ailleurs, Reda tout seul n’aurait rien pu, contre le 1,90 m et la ceinture noire de judo de Yamine.
A 24 ans, Reda assume avec un détachement déconcertant son passé de petit délinquant devenu assassin : au collège, ce fut un couteau de cantine lancé sur un professeur. Puis des vols de sacs à main, parfois très violents mais « pour s’amuser ». Puis la spirale de vols aggravés, la drogue, et en trois ans de détention, plusieurs fois le « mitard ». Le seul mot dont l’évocation semble déglacer son regard dur, c’est un prénom : Sabrina, la fille qu’il aimait et qu’il aime toujours, et auprès de qui il voulait « s’acheter une conduite ». Sabrina doit être entendue aujourd’hui à la barre des témoins.

Le Parisien

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(AFP) –

La garde des sceaux revient sur la réforme de la procédure pénale qui prévoit la suppression du juge d'instruction.

AFP/THIERRY ZOCCOLAN

La garde des sceaux revient sur la réforme de la procédure pénale qui prévoit la suppression du juge d’instruction.

PARIS — La garde des Sceaux Michèle Alliot-Marie déclare mardi dans une interview au Monde ne pas exclure un renforcement des compétences du futur juge de l’enquête et des libertés, amené à remplacer le juge d’instruction, en lui donnant la possibilité de renvoyer un mis en cause devant une juridiction.

“En cas de contestation, peut-on prévoir que le juge de l’enquête puisse lui aussi prendre la décision de renvoi devant une juridiction? C’est l’une des hypothèse de travail”, explique la ministre de la Justice.

“Peut-on envisager l’organisation d’une audience à l’issue de laquelle le juge de l’enquête et des libertés déciderait si l’affaire doit être renvoyée? Aucune porte n’est fermée”, ajoute Mme Alliot-Marie.

Le rapport Léger, qui sert de base à la réforme de la procédure pénale dont l’avant-projet de loi est attendu début 2010, laisse le soin au seul procureur de renvoyer ou non une personne devant un tribunal. Cette compétence est actuellement dévolue au juge d’instruction dont la rapport prévoit la suppression.

Son remplacement par un juge de l’enquête et des libertés “avec un champ de compétences et des pouvoir supérieurs” écarte tout “risque qu’un dossier sensible soit enterré”, assure encore le ministre. Un tel risque a été évoqué et dénoncé ces dernières semaines par de nombreux acteurs du monde judiciaire et politique.

Michèle Alliot-Marie, qui “s’élève contre l’idée que les procureurs seraient aux ordres”, affirme cependant qu'”il n’est pas question d’avoir un parquet en dehors de tout lien hiérarchique avec la chancellerie”. “Sinon, qui donnerait les instructions générales à mener sur tout le territoire”, interroge la ministre.

S’agissant du suivi des délinquants sexuels, la garde des Sceaux reconnaît un manque de moyens pour appliquer les dispositifs de prévention de la récidive qui se sont multipliés ces dernières années. “C’est vrai, nous manquons de psychiatres et de médecins pour travailler en prison ou pour assurer, à l’extérieur, le suivi médical des délinquants sexuels”, dit-elle.

Sur cet aspect qui “ne dépend pas” du ministère de la Justice, elle affirme travailler avec la ministre de la Santé Roselyne Bachelot sur la question des moyens et sur la coopération avec les médecins.

Enfin, elle ajoute “à titre personnel” n’être “pas favorable à la castration physique”. “Mais, je dis que l’opinion publique ne comprendrait pas que l’on refuse de discuter de ce sujet”, ajoute la ministre qui avait déjà estimé que la question “peut se poser et être débattue, y compris au Parlement”.

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Entretien

Michèle Alliot-Marie : “Pas de risque qu’un dossier sensible soit enterré”

LE MONDE | 03.11.09 | 14h10  •  Mis à jour le 03.11.09 | 17h13

près le renvoi de Jacques Chirac devant le tribunal correctionnel par une juge d’instruction contre l’avis du parquet, la ministre de la justice et des libertés, Michèle Alliot-Marie, répond aux critiques que suscite le projet de réforme de la procédure pénale. Elle explique que le juge de l’enquête et des libertés, qui contrôlera l’enquête des procureurs, pourrait renvoyer une personne mise en cause devant une juridiction.

La ministre expose également les grandes lignes de la nouvelle loi sur la récidive des délinquants sexuels, présentée, mardi 3 novembre, devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, avant le débat en séance prévu les 17 et 18 novembre.

Les juges d’instruction ont récemment prouvé leur indépendance. Si vous les supprimez, n’y a-t-il pas un risque de partialité dans la conduite des enquêtes par un parquet dépendant de la chancellerie ?

On dit sur ce sujet des choses partielles, parfois partiales, dont beaucoup relèvent de l’ignorance ou de la mauvaise foi. Nous n’allons pas purement et simplement supprimer le juge d’instruction. Nous allons créer un juge de l’enquête et des libertés, juge du siège également, qui le remplacera avec un champ de compétences et des pouvoirs supérieurs. Il sera compétent pour l’ensemble des enquêtes. Il pourra ordonner à un procureur de continuer une enquête que celui-ci voulait classer, ou l’obliger à faire des actes d’investigation, à la demande de la défense ou d’une partie civile. Il n’y a donc pas de risque qu’un dossier sensible soit enterré, surtout s’il s’agit d’une affaire dont les médias se sont emparés.

Je m’élève contre l’idée que les procureurs seraient aux ordres, et feraient des actes contraires à leurs convictions. Il n’est pas bon pour une démocratie de dire que les juges ne font pas leur travail ou sont de parti pris. Ce sont des accusations infondées. Dans le cadre de la réforme de la procédure pénale, l’autonomie de l’enquête et l’indépendance des décisions du parquet seront garanties. Je veux qu’on élimine tout soupçon qui pourrait porter atteinte à l’image des magistrats.

L’une des questions clés sera de savoir qui renverra un mis en cause devant une juridiction. Jusqu’ici, il est prévu que ce soit le seul procureur…

Il est prévu effectivement que ce soit le procureur qui renvoie le prévenu devant le tribunal. En cas de contestation, peut-on prévoir que le juge de l’enquête puisse lui aussi prendre la décision de renvoi devant une juridiction ? C’est l’une des hypothèses de travail. Peut-on envisager l’organisation d’une audience à l’issue de laquelle le juge de l’enquête et des libertés déciderait si l’affaire doit être renvoyée ? Aucune porte n’est fermée.

Allez-vous revoir le statut des procureurs, et leur mode de nomination, pour l’instant dans les mains de l’exécutif ?

Il n’est pas question d’avoir un parquet en dehors de tout lien hiérarchique avec la chancellerie. Sinon, qui donnerait des instructions générales à mener sur tout le territoire ? Il y a une cohérence entre le mode de nomination des procureurs et le fait qu’ils peuvent recevoir des instructions générales et des instructions dans des dossiers particuliers. Ces dernières sont strictement encadrées. Elles ne vont pas disparaître. Elles sont publiques et, depuis mon arrivée, motivées.

Les instructions passent parfois par le téléphone…

Nous entrons à nouveau dans l’ère du soupçon ! Je veux que les magistrats échappent aux pressions de tous les pouvoirs, qu’ils soient politique, économique ou médiatique. Mon rôle est d’assurer aux procureurs qu’ils puissent mener les enquêtes en toute autonomie. La réforme de la procédure pénale le garantira.

L’affaire Clearstream, comme celle du renvoi de l’ancien président, Jacques Chirac, ne doivent-elles pas conduire à réviser les conditions de l’immunité pénale du chef de l’Etat ?

En tant que garde des sceaux, je ne peux en aucun cas me prononcer sur des affaires en cours. J’observe par ailleurs que la question du délai entre la commission des faits et les poursuites judiciaires a été évoquée lors du débat sur l’immunité pénale du chef de l’Etat. Le Parlement a tranché, et je suis là pour appliquer les textes.

Vous présentez, en novembre, un nouveau projet de loi contre la récidive. Ce texte a été présenté il y a un an en conseil des ministres. Quels éléments nouveaux y ajoutez-vous ?

Le projet de loi prévoit que quelqu’un qui a commis une agression sexuelle sera, à sa sortie de prison, automatiquement interdit de séjour dans les lieux où travaille ou habite sa victime. L’autre objectif est d’assurer le suivi médical des agresseurs sexuels, par des traitements inhibiteurs de la libido, en prison mais aussi après la sortie.

Aujourd’hui, les condamnés qui suivent un traitement médical en détention perdent le bénéfice de leur remise de peine s’ils ne respectent pas. Mais quid après ? Je propose que cette logique s’applique aux condamnés astreints à un suivi une fois libérés : ceux qui ne respectent pas leurs obligations médicales seront réincarcérés pour non-respect de leur obligation de soin.

Dans un entretien au “Figaro Magazine” du 24 octobre, vous avez ouvert le débat sur la castration physique, qui est pourtant considérée comme une mutilation par le Conseil de l’Europe. Maintenez-vous cette proposition ?

J’essaie de faire preuve de bon sens en la matière. Francis Evrard, récemment condamné par une cour d’assises, l’avait réclamée avant l’ouverture de son procès. Je constate que cette possibilité existe dans des pays comme la Suisse ou le Canada, qui sont des démocraties.

A titre personnel, je ne suis pas favorable à la castration physique, mais je dis que l’opinion publique ne comprendrait pas que l’on refuse de discuter de ce sujet. C’est en refusant les débats qu’on fait le lit des extrémismes.

Depuis 1998, des lois sur la récidive des délinquants sexuels se sont multipliées, sans que les moyens pour les appliquer n’aient réellement suivi. Comment y remédier ?

C’est vrai, nous manquons de psychiatres et de médecins pour travailler en prison ou pour assurer, à l’extérieur, le suivi médical des délinquants sexuels. Cela ne dépend pas que de ce ministère. Je travaille avec la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, pour dégager les moyens nécessaires, mais aussi pour convaincre les médecins de participer à cette politique.

Vous publiez une circulaire de politique pénale adressée aux procureurs. Quelles en sont les grandes lignes ?

Je veux rendre la justice plus réactive, plus effective, plus protectrice des libertés. Contre le reproche de lenteur, je demande aux procureurs de développer le traitement en temps réel des affaires, les comparutions immédiates, les procédures de reconnaissance préalable de culpabilité, mais aussi les alternatives aux poursuites. Dans les cas où les affaires sont simples, il ne sert à rien d’allonger les délais. 32 000 condamnations ne sont pas exécutées. Ce n’est pas tolérable. Enfin, je demande aux procureurs de veiller aux libertés en étant vigilants sur les conditions de garde à vue et la mise à jour des fichiers judiciaires.

Propos recueillis par Cécile Prieur et Alain Salles
Article paru dans l’édition du 04.11.09
LEMONDE.FR avec AFP | 03.11.09 | 15h12  •  Mis à jour le 03.11.09 | 15h12

Le plus gros coffee shop des Pays-Bas est au cœur d'un procès pour trafic de drogue qui s'est ouvert mardi 3 novembre à Middelburg.

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Le plus gros coffee shop des Pays-Bas est au cœur d’un procès pour trafic de drogue qui s’est ouvert mardi 3 novembre à Middelburg
e plus gros coffee shop des Pays-Bas, qui fournissait jusqu’à 3 000 clients belges et français par jour, est au cœur d’un procès pour trafic de drogue qui s’est ouvert mardi 3 novembre à Middelburg. Dix-sept prévenus, dont le propriétaire du “Checkpoint”, situé à Terneuzen, à la frontière belge, absent mardi, sont poursuivis pour trafic de drogue et appartenance à un groupe criminel organisé.

Quelque 200 kilos de cannabis avaient été saisis par la police en 2007 et 2008 dans le coffee shop et des bâtiments voisins. La politique de tolérance néerlandaise permet aux coffee shops de stocker jusqu’à 500 grammes de cannabis et de vendre jusqu’à cinq grammes de cette drogue douce par jour et par personne. “La question est de savoir si les conditions posées par la politique de tolérance ont été violées”, a déclaré la présidente, Saskia Meeuwis, à l’ouverture de l’audience.

Le “Checkpoint”, qui possédait une licence municipale depuis 1995, s’était développé rapidement après son déménagement en 2006 en bordure du centre-ville. A sa fermeture en mai 2008, il accueillait jusqu’à 3 000 clients par jour, essentiellement belges et français. “Il fallait prendre un ticket numéroté pour se faire servir, comme au bureau de poste”, a noté la juge Meeuwis. Selon l’accusation, l’établissement a rapporté à son propriétaire, Meddy Willemsen, 58 ans, plus de 27 millions d’euros entre 2006 et mai 2008.

Les Pays-Bas ont décriminalisé en 1976 la possession et la consommation de moins de cinq grammes de cannabis. Mais les coffee shops sont approvisionnés par des groupes criminels, qui contrôlent la culture et la vente en gros, interdites. Sur les dix-sept prévenus qui comparaissent libres dans ce dossier, dont le propriétaire, le gérant et des producteurs de cannabis, un seul s’est présenté mardi, un livreur présumé âgé de 37 ans.

Il a expliqué à l’audience avoir livré au “Checkpoint” environ deux kilos de cannabis tous les quinze jours, entre juin 2007 et mars 2008, qu’il achetait à des producteurs locaux. Les prévenus, qui encourent jusqu’à dix ans et demi de prison, sont également poursuivis pour exportation de drogue pour avoir vendu du cannabis à des étrangers qui l’ont emporté dans leur pays. Le jugement doit être prononcé le 2 décembre.

La politique de tolérance des autorités néerlandaises est remise en cause, notamment par les maires qui se plaignent des nuisances générées par les millions de touristes de la drogue qui passent la frontière chaque année. En septembre, le gouvernement avait annoncé le dépôt, avant la fin de l’année, d’un projet de loi visant à rendre plus difficile l’achat de cannabis par les touristes dans les coffee shops, qui “doivent devenir plus petits et exclusivement orientés vers le consommateur local”.

Dans les communes de Roosendaal et Bergen-op-Zoom, proches de la frontière belge, la vente de cannabis est interdite depuis le 16 septembre. D’autres villes frontalières, comme Maastricht, veulent limiter, à partir de janvier 2010, l’accès à leurs coffee shops aux seuls détenteurs d’une carte de membre, qui ne pourront plus acheter que trois grammes maximum de cannabis.

[Actu]

Pour chercher, para buscar, to search , , , Publié par Denise Anne Clavilier

Demain, s’ouvrira le procès du dernier président anti-constitutionnel sous la dictature militaire de 1976-1983. C’est lui, Reynaldo Benito Bignone, qui, le 10 décembre 1983, avait transmis l’écharpe bicolore et le bâton de commandement présidentiel à Raúl Alfonsín, après les élections démocratiques d’octobre précédent, mettant, contraint et forcé, le point final à huit ans de la plus sanglante dictature connue en Argentine (1).
Bignone était arrivé au pouvoir après la défaite argentine aux Malouines (2).
Bignone, qui a 81 ans aujourd’hui, est poursuivi pour de nombreuses violations des droits de l’homme intervenues au Campo de Mayo, un lieu éloigné de tout qui avait été transformé par la junte en place en camp de torture et de détention arbitraire. Il est aussi poursuivi pour la destruction des archives des Forces Armées concernant ces faits de torture et de détention illégale. A ses côtés, comparaîtront 5 généraux, dont trois ont déjà été condamnés en août pour d’autres crimes du même ordre, un chef de bataillon de l’intelligence militaire et un ancien commissaire de police. En tout, ils sont poursuivis pour 56 cas de séquestration, torture et homicide. Les 5 généraux sont eux aussi octogénaires, ils ont entre 82 et 86 ans.
Aujourd’hui, seul le quotidien Página/12 parle de ce procès. Et il en fait sa une. Le journal ajoute aussi au dossier une analyse sous forme d’interview de ce qui fut la position et le rêve de Raúl Alfonsín, l’avocat militant des droits de l’homme qui rétablit la Constitution en Argentine et qui est décédé quelques semaines après les célébrations solennelles qui ont marqué l’année dernière, d’octobre à décembre, les 25 ans de ce retour à la démocratie (voir mes articles à son sujet, y compris celui-ci, en cliquant sur son nom dans le blog Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus). Página/12 donne en effet longuement la parole à Marcos Novaro, un chercheur qui apporte son interprétation de la stratégie menée par Alfonsín et de ses rapports avec les autres courants nationaux qui composent l’actuel démocratie argentine, notamment l’apport toujours central de l’idéologie péroniste (3).
Pour en savoir plus :
Lire l’article de Página/12 sur le procès
Lire l’interview de Marcos Novaro dans Página/12
Pour accéder à tous les articles de Barrio de Tango relatifs à cette douloureuse question des droits de l’homme en Argentine et en Uruguay (y compris celui-ci), cliquez sur le mot-clé JDH dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, en haut, sous le titre, ou sur le raccourci Justice et droits de l’homme, dans la Colonne de droite, dans la rubrique Quelques rubriques thématiques (partie haute).
(1) Mettons à part la dictature de Juan Manuel de Rosas, qui s’étendit de 1835 à 1852, qui ne concerne que Buenos Aires et l’actuelle Province de Buenos Aires, et qui est intervenue avant que la notion de démocratie telle que nous l’entendons aujourd’hui se forme, y compris en Europe.
(2) La Guerre dite des Malouines, en français, des Fauklands en anglais et de las Malvinas en espagnol a opposé de mai à juin 1982 la flotte anglaise et les trois armées argentines, après que l’Argentine avait pris militairement le contrôle de ces îles de l’Atlantique Sud, au large du sud de la Patagonie, sous souveraineté britannique en droit territorial international. Au 19ème siècle, ces îles appartenaient de fait et de droit à l’Argentine qui en a été dépossédée par l’Angleterre et qui continue à en réclamer le retour aujourd’hui encore. Du côté argentin, la guerre des Malouines a été faite essentiellement par de jeunes appelés, peu ou pas formés au combat, armés de fusils et sans protection vestimentaire contre l’hiver de cette région proche du cercle polaire.
(3) Raúl Alfonsín était un militant de l’UCR, Unión Cívica Radical, vieux parti de gauche, fondé en 1891 par des membres de la classe moyenne (professions intellectuelles et libérales) contre la classe dirigeante et corrompue des gros propriétaires terriens (dite Generación del Ochenta) et qui fut le premier mouvement nationaliste favorable à une décolonisation économique de l’Argentine (plutôt dirigé contre l’emprise capitaliste britannique, et, pour une plus faible part, française). Aujourd’hui, le Gouvernement argentin est aux mains des péronistes, autre mouvement, né au début des années 40, sous l’impulsion de Juan Perón, à une époque où la pression étrangère politique, géostratégique et économique, venait presque exclusivement des Etats-Unis d’Amérique et qui s’est épanoui au début de la guerre froide, dans des tensions idéologiques peu propices aux développement d’une culture de la pluralité d’opinions dans le pays. Concernant ces repères essentiels à la compréhension de l’histoire et du présent dans cette région du monde, se reporter à mon article Vademecum historique, dont le lien se trouve dans la rubrique Petites Chronologies (en partie centrale de la Colonne de droite).

LE MONDE | 31.10.09 | 13h49  •  Mis à jour le 31.10.09 | 13h49
La Haye (Pays-Bas) Correspondance

Le 25 octobre, les juges ont rendu leur dernier jugement à Freetown contre trois chefs du Front révolutionnaire uni (RUF), "l'un des groupes rebelles les plus brutaux des temps modernes", affirme Joseph Kamara, le procureur.

AFP/HO

Le 25 octobre, les juges ont rendu leur dernier jugement à Freetown contre trois chefs du Front révolutionnaire uni (RUF), “l’un des groupes rebelles les plus brutaux des temps modernes”, affirme Joseph Kamara, le procureur.

Au coeur d’une capitale mise à mal par onze années de guerre civile (1991-2002), les magistrats du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) s’apprêtent à boucler leurs valises.

Le 25 octobre, les juges ont rendu leur dernier jugement à Freetown contre trois chefs du Front révolutionnaire uni (RUF), “l’un des groupes rebelles les plus brutaux des temps modernes”, affirme Joseph Kamara, le procureur. En plus de sept ans, le tribunal spécial, établi par l’ONU à la demande du gouvernement, a jugé huit hauts responsables de la guerre civile.

Condamnés en appel à des peines de 25 à 52 ans de prison, les chefs du RUF, Issa Sesay, Morris Kallon et Augustine Gbao, ont été reconnus coupables de “crimes contre l’humanité” pour avoir transformé des gamins en soldats, massacré ou amputé des civils, pillé les mines de diamant, et forcé des filles à épouser des rebelles. Enlevées à leurs parents, souvent massacrés, elles étaient promises aux chefs de guerre en “cadeau” pour leur zèle au combat.

Un témoin, protégé par le pseudonyme TF1-314, avait à peine 10 ans lorsqu’elle fut capturée et violée par plusieurs hommes. Enrôlée dans une “small girls unit”, elle a été mariée à Scorpion, un petit chef rebelle. “J’étais dans sa maison et je devais tout faire pour lui. Je devais faire la cuisine, laver ses vêtements. Et lorsque la nuit tombait, je devais avoir des relations sexuelles”, avait-elle raconté aux trois juges – un Sierra-Léonais et deux magistrats internationaux à la cour. Les tâches ménagères accomplies, elle était entraînée au maniement des armes.

Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone laisse dans son sillage une sorte de carnet de bord d’une des guerres les plus terrifiantes d’Afrique de l’Ouest. Des milliers de combattants responsables d’atrocités restent impunis, mais le tribunal est parvenu à juger des chefs rebelles et, surtout, Charles Taylor, devenu président du Liberia. Il est accusé par le TSSL d’avoir soutenu les hommes du RUF en échange de diamants.

“Au cours des enquêtes, les gens disaient toujours que le tribunal ne réussirait jamais à attraper Charles Taylor, se souvient l’ancien procureur Alain Werner. Ils me disaient, c’est un “big man”. Il y a toujours eu ce mythe autour de lui.” Arrêté au printemps 2006, après trois ans d’exil au Nigeria, le procès de l’ancien chef d’Etat se tient aux Pays-Bas – pour des raisons de sécurité.

Correspondant en Afrique pour la BBC, Adolphus Williams note que “certains pensent qu’il fallait laisser la Cour rendre justice, mais d’autres personnes, qui vivent sous des bâches en plastique, réclament des pensions pour les amputés, des écoles… Ils regrettent tout cet argent pompé pour les procès”. En sept ans, le budget du tribunal spécial a atteint près de 150 millions d’euros.

Le procureur a longtemps affiché l’ambition de retrouver l’argent des “diamants de sang”. Mais c’est “impossible, estime Adolphus Williams. Il est perdu, comme les vies, et rien ne permettra de les retrouver”.

“Il est facile de prétendre que cet argent aurait été mieux utilisé pour les écoles. Mais quelle est la réalité ? interroge Alain Werner. Le pays reste corrompu. Et le tribunal n’a pas vocation à transformer la Sierra Leone en un modèle de gouvernance.”

Pour fonctionner, le tribunal a dû faire appel aux contributions volontaires des Etats. Elles sont venues principalement des Etats-Unis et du Royaume-Uni.

Mais lorsque le procureur a voulu inculper deux protagonistes de premier ordre, Ibrahim Bah, le “financier” de Charles Taylor (soupçonné de liens avec la mouvance d’Al-Qaida), et son bras droit, Benjamin Yeaten, les fonds manquaient. Autres grands absents dans le box des accusés, les diamantaires et marchands d’armes. “Comment dit-on impunité en krio (le créole sierra-léonais) ?”, interroge l’ancien greffier Robin Vincent.

Pendant des années, le premier tribunal international établi sur les lieux mêmes des crimes s’est rendu dans les villages les plus reculés pour recueillir les témoignages. Chaque semaine, des vidéos des procès étaient distribuées par hélicoptère ou par des motos, et projetées. “Nous avons demandé à des enfants de 5 ou 6 ans de dessiner le tribunal, raconte l’ancien greffier du tribunal. Ils ont dessiné des amputés, des combattants. Nous ne pouvons rien faire pour ôter cela de leur mémoire. Simplement espérer et dire qu’il n’y aura plus jamais ça.”


Stéphanie Maupas

Une juridiction hybride
La guerre Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a été créé le 16 janvier 2002 par un accord entre les Nations unies et le gouvernement sierra-léonais, au terme d’une guerre civile qui a fait près de 150 000 morts.

Les inculpés Treize hommes ont été inculpés pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Le procès de l’ancien président du Liberia, Charles Taylor, est en cours à La Haye, aux Pays-Bas.


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Article paru dans l’édition du 01.11.09