Guillaume Perrault

Lorsqu’il était ministre de l’Intérieur et président de l’UMP, Nicolas Sarkozy a croisé le fer avec les syndicats de magistrats.

«Je ne suis pas garde des Sceaux, mais il y aurait des choses à faire dans ce secteur. Ne le répétez pas, on me prêterait des ambitions que je n’ai pas.» Ainsi s’exprimait Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, devant les élèves de l’École nationale de la magistrature, à Bordeaux, le 12 décembre 2003.

Lorsqu’il assumait les fonctions de «premier flic de France», Sarkozy ne s’était pas privé de critiquer des magistrats lors d’affaires criminelles qui avaient choqué l’opinion. Et certaines de ces polémiques avaient fait date. «L’homme soupçonné d’avoir tué un policier de 32 ans le mois dernier avait été arrêté 53 fois et condamné à 21 reprises !», avait-il ainsi tonné en octobre 2003. Sarkozy avait réclamé à cor et à cri des «peines planchers», sans craindre d’empiéter sur les plates-bandes du ministre de la Justice, Dominique Perben. Au printemps 2007, à peine après avoir quitté le ministère de l’Intérieur, le président de l’UMP avait inclus les peines planchers dans son programme lors de la présidentielle.

La responsabilité des magistrats avait aussi été l’occasion d’un bras de fer entre Nicolas Sarkozy et ­les syndicats de magistrats dès juin 2005. L’auteur supposé d’un crime de sang qui avait alors frappé les esprits – l’assassinat de Nelly Crémel, une mère de famille de 39 ans tuée en Seine-et-Marne pendant son jogging – s’était en effet révélé être un condamné à perpétuité pour meurtre, qui avait bénéficié d’une libération conditionnelle.

«Une décision aussi grave que la remise en liberté d’un assassin qui commet à nouveau un assassinat ne pose-t-elle pas la question de la responsabilité des magistrats ?», avait lancé Sarkozy, redevenu ministre de l’Intérieur. «Le juge qui a fait une faute devra payer», avait-il tranché.

http://www.lefigaro.fr/medias/2009/04/22/240ab75a-2ebb-11de-a9a4-5018d54e05d1.jpgNicolas Sarkozy entouré de Bruno Cotte, président de la Chambre criminelle de la Cour de cassation et Jean-Louis Nadal, procureur général près la Cour de Cassation, en 2007.

Bousculé par son encombrant voisin de la Place Beauvau, qui s’était rendu aux obsèques de la victime, le ministre de la Justice, alors Pascal Clément, avait accepté de mettre à l’étude une réforme de la responsabilité des juges, qui n’avait toutefois pas abouti à un projet de loi.

«La pensée unique» critiquée

Manifestement ravi du tollé politico-médiatique provoqué à chaque fois par ses critiques contre les juges – la gauche et les syndicats de magistrats lui reprochaient d’accréditer la formule simpliste «les policiers arrêtent les délinquants, les tribunaux les relâchent» -, Nicolas Sarkozy avait in­variablement répondu à ses dé­­tracteurs en mettant en cause «la pensée unique».

Lors de la campagne présidentielle de 2007, le candidat UMP écrivait ainsi dans son programme : «Je veux que le Conseil supérieur de la magistrature soit composé majoritairement de non-ma­gistrats, que vous puissiez le saisir si vous vous estimez victimes de la négligence ou de la faute d’un magistrat.»

La réforme du CSM, adoptée lors de la révision de la Constitution en juillet 2008, ambitionne désormais de passer du discours aux actes.

» Bientôt un texte sur la responsabilité des juges

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=-Dl1PG4hQnI[/youtube]

AP

Le procès des meurtres particulièrement violents des deux étudiants français tués en juin 2008 à Londres s’ouvre mardi dans la capitale britannique. Les accusés, Daniel Sonnex et Nigel Farmer, risquent la prison à perpétuité.

Selon l’autopsie, Laurent Bonomo et Gabriel Ferez, tous deux âgés de 23 ans, ont été bâillonnés et ligotés sur leurs chaises avant d’être torturés. Ils ont succombé à près de 250 coups de couteaux portés notamment au niveau du torse, du cou et de la tête. L’appartement du crime a ensuite été incendié.

Les deux suspects plaident non coupable. Le procès devrait durer six semaines.

Originaires de la région d’Aix-en-Provence et de Picardie, Laurent Bonomo et Gabriel Ferez étaient arrivés en mai 2008 à Londres. Ces étudiants en biologie moléculaire à l’école Polytechnique de Clermont-Ferrand étaient venus se perfectionner lors d’un stage de quelques mois et devaient repartir en France à la fin du mois de juillet.

Le samedi 28 juin, ils s’étaient retrouvés dans le studio de Laurent Bonomo, situé à Sterling Gardens, une impasse fleurie du quartier populaire de New Cross, dans le sud-est de Londres. Vers 23h30, Marie, une étudiante française qui s’était récemment pacsée avec Laurent Bonomo, avait téléphoné à son compagnon, qui lui avait répondu être en train de s’amuser à des jeux vidéo avec Gabriel Ferez.

Le lendemain, Marie, inquiète de ne pas avoir de nouvelles, avait alerté la mère de Laurent. Cette dernière ne parvenait à joindre, ni son fils, ni Gabriel, et en alertait le commissariat local.

Le 30 juin en début d’après-midi, le consulat général de France prévenait les familles des deux jeunes gens qu’un incendie avait dévasté le studio loué par Laurent et que deux corps avaient été retrouvés sur place.

L’autopsie a confirmé les identités des cadavres et révélé la violence du double meurtre. Les enquêteurs londoniens ont par ailleurs établi que deux téléphones mobiles, deux consoles de jeux vidéo et deux cartes bancaires avaient été dérobés aux victimes. Quant à l’incendie, il aurait été allumé vers 21h30 par un homme afin de faire disparaître des indices compromettants. L’individu ayant été aperçu par des témoins, son portrait-robot a été rapidement diffusé par les médias britanniques.

Quelques jours après, Nigel Farmer, un sans-abri britannique de 33 ans dont le visage ressemblait au signalement du suspect, se présentait dans un commissariat. Les mains brûlées, il avouait être impliqué dans l’incendie de l’appartement.

Peu après, Daniel Sonnex, 23 ans, un délinquant qualifié de “dangereux” par les policiers, était interpellé. Il aurait été filmé par une caméra de surveillance alors qu’il tentait de retirer de l’argent avec la carte bancaire d’une des victimes. Il est également soupçonné d’avoir dérobé l’ordinateur portable de Laurent Bonomo, qui avait été cambriolé une semaine auparavant. Le cambrioleur s’était introduit par la fenêtre ouverte pendant que l’étudiant français prenait sa douche.

Le meurtre des deux étudiants français est survenu alors que Londres connaissait une vague sans précédent d’agressions et de meurtres commis notamment par des jeunes armés de couteaux et autres armes blanches. AP

L’exposition de cadavres humains “Our body, à corps ouverts” a été interdite mardi par un juge de Paris, qui a donné raison à deux organisations de défense des droits de l’homme. Lire la suite l’article

L’exposition, en cours depuis le 12 février à l’Espace Madeleine à Paris, devra fermer dans les 24 heures, sous astreinte de 20.000 euros par jour de retard.

Ses organisateurs, Encore events productions, devront remettre les quelques 17 cadavres aux autorités publiques sous astreinte de 50.000 euros par jour de retard, dit la décision.

L’exposition, déjà présentée dans de nombreuses villes dans le monde et aussi à Lyon et Marseille, devait se poursuivre jusqu’au 10 mai avant de déménager jusqu’en août au Parc floral de Vincennes. Les organisateurs ont fait appel, mais le premier jugement reste exécutoire.

Pascal Bernardin, gérant de Encore events, s’est déclaré “stupéfait” de cette décision. Selon lui, “il n’y aucune atteinte au respect des morts, il ne s’agit pas d’une exposition artistique, il s’agit d’une exposition anatomique, pédagogique”.

Statuant en référé (urgence) à la demande de deux associations, le magistrat s’est appuyé sur une loi de décembre 2008 qui a étendu aux cadavres la protection accordée aux personnes vivantes.

Il estime qu’hormis les usages médicaux prévus par la loi avec autorisation, “l’espace assigné par la loi au cadavre est au cimetière”, ou à la crémation.

“La loi prohibe les conventions ayant pour objet de marchandiser le corps”, déclare le magistrat dans ses attendus. “La commercialisation est une atteinte manifeste au respect dû aux cadavres”, ajoute-t-il.

DES CORPS DE CONDAMNÉS À MORT ?

Le tribunal de grande instance de Paris a statué après avoir été saisi par deux associations, Ensemble contre la peine de mort (ECPM) et Solidarité Chine, selon qui l’exposition violait les principes de respect du cadavre et d’inviolabilité du corps humain.

Les associations avaient dit craindre que les corps présentés et préservés selon un procédé nommé “plastination”, imaginé en 1977 par le plasticien allemand Günther von Hagens, soient ceux de condamnés à mort en Chine.

L’exposition revendique jusqu’à ce jour 30 millions de visiteurs dans le monde. La plastination consiste à plonger les corps dans des bains de formol puis d’acétone pour remplacer toutes ses graisses et liquides par de la silicone, ce qui produit un cadavre figé avec tous ses organes.

L’exposition les met en scène dans diverses postures. L’origine des corps est incertaine, les organisateurs parlant de Chinois ayant fait don de leurs corps à la science.

Pascal Bernardin assure avoir tous les documents justifiant une origine régulière. Les organisations plaignantes disent que Günther von Hagens a lui-même reconnu que certains corps présentaient une balle dans la tête. Le Comité national d’éthique avait émis des réserves sur le spectacle.

L’association soulevait l’hypothèse que les corps proviennent d’un trafic organisé par la police chinoise. Dans les documents de promotion, les organisateurs de l’exposition proposaient au public de découvrir “où est la rate, les poumons et l’hypophyse, comment les muscles fonctionnent quand on court et à quoi ressemblent les poumons d’un fumeur”.

Jean-Baptiste Vey et Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse

LE MONDE |
BERLIN CORRESPONDANCE

ls sont trois, dont deux Allemands. Trois islamistes qui projetaient de perpétrer, dans le pays où ils ont grandi, des attentats encore plus violents que ceux de Madrid (11 mars 2004, 191 morts) et de Londres (7 juillet 2005, 56 morts).

Sur le banc des accusés, les convertis Fritz Gelowicz et Daniel Schneider, ainsi que le Turc Adem Yilmaz, comparaissent à partir de mercredi 22 avril devant la cour d’assises spéciale de Düsseldorf pour un procès antiterroriste qui pourrait durer deux ans. Ils doivent répondre d’appartenance à une organisation terroriste étrangère, l’Union du djihad islamique (UJI), et de préparation d’attentats à l’explosif. Selon l’accusation, le groupuscule voulait punir l’Allemagne pour son engagement en Afghanistan.

La police avait démantelé, en septembre 2007, au terme d’une enquête, la “cellule du Sauerland”, du nom de cette région du sud-ouest où ont été arrêtés les accusés. L’Allemagne découvrait avec stupeur l’existence, sur son sol, du terrorisme “de terroir”. “Cela a vraiment été une cassure, affirme Rolf Tophoven, l’un des principaux experts du sujet outre-Rhin. Depuis, ce phénomène préoccupe les forces de sécurité. D’autant que les terroristes issus de la communauté des convertis sont souvent plus difficiles à repérer.”

Chef présumé de la cellule, Fritz Gelowicz, 29 ans, vient d’une famille aisée d’Ulm (sud-ouest). En recherche d’un sens à donner à sa vie, ce fils d’un couple divorcé d’ingénieur et de médecin s’est converti à l’islam à l’âge de 18 ans. Il s’est radicalisé au contact de la communauté islamiste d’Ulm, considérée comme un vivier pour les djihadistes allemands.

VIDÉOS EN LANGUE ALLEMANDE

Après avoir suivi des cours d’arabe à Damas en 2005, il a rejoint un camp de l’UJI au Pakistan, au printemps 2006. Il était accompagné d’Adem Yilmaz, 30 ans, qui vit en Allemagne depuis l’enfance. A l’image de Fritz Gelowicz, Daniel Schneider, 23 ans, est issu d’un milieu social favorisé, et il s’est tourné très jeune vers un islam radical. Ce Sarrois de Neunkirchen a suivi des cours d’arabe en Egypte en 2006, avant de rejoindre le camp d’entraînement de l’UJI.

Le parcours des deux Allemands a soulevé des interrogations sur le phénomène des convertis. L’Allemagne en compte plus de 21 000, selon l’Institut central des archives de l’islam. L’exactitude de ce chiffre est discutable, car il résulte de sondages partiels menés auprès des associations musulmanes. Une certitude toutefois : le nombre de conversions augmente, le phénomène se serait même considérablement accéléré ces dernières années. La pratique d’un islam modéré est la règle chez les convertis, même s’ils sont souvent “plus fervents, plus stricts”, décrit Salim Abdullah, de l’Institut des archives de l’islam. Un nombre infime se laisse séduire par la doctrine islamiste. Pour les recruteurs d’organisations extrémistes, ces profils sont bienvenus : les convertis passent plus inaperçus.

Selon les autorités, quelque 150 personnes venues d’Allemagne ont séjourné au cours des dix dernières années dans des camps d’entraînement proches de la mouvance Al-Qaida, dont une douzaine de convertis. Ainsi, Eric Breininger, originaire de Neunkirchen, est sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis l’automne 2008, après avoir adressé un message d’avertissement à l’Allemagne depuis un camp à la frontière pakistano-afghane. Ces derniers mois, le pays a d’ailleurs été régulièrement menacé par des vidéos diffusées en langue allemande.

Marie de Vergès
Article paru dans l’édition du 22.04.09

Stéphane Durand-Souffland
La personne qui harcelait Michel Dubec a été condamnée à dix-huit mois de prison dont huit ferme.

Psychiatre, spécialiste des tueurs en série, Michel Dubec est harcelé par une ancienne patiente.

Les risques du métier ? Le docteur Michel Dubec est harcelé, depuis des années, par une ancienne patiente, Brigitte B. Assisté par Me Georges Kiejman, ce psychiatre réputé, expert agréé par la Cour de cassation, connu pour ses travaux sur les tueurs en série menés avec son confrère Daniel Zagury, a obtenu de la cour d’appel la condamnation de sa tourmenteuse à dix-huit mois de prison dont huit ferme et trois ans de mise à l’épreuve. Une autre plainte du praticien est aujourd’hui à l’instruction, qui vise des faits postérieurs.

Au printemps 2008, à l’occasion du procès Fourniret et de son épouse, Monique Olivier, Mme B. avait approché des avocats, des journalistes et même le président de la cour d’assises des Ardennes, afin de discréditer l’expert qui devait déposer. Mme B., explique Me Bertrand Burgot, le second avocat du Dr Dubec, est de surcroît «à l’initiative d’une pétition sur Internet» accusant son client de faire l’«apologie du viol». Ce texte s’appuie sur des passages tronqués, relatifs à Guy Georges, extraits du livre Le Plaisir de tuer (Le Seuil, 2007), coécrit avec Chantal De Rudder, ancienne journaliste du Nouvel Observateur.

Par ailleurs une douzaine de plaintes ont été déposées à l’ordre des médecins contre le psychiatre, qui répond de «manquement à la dignité et à l’obligation de réserve, violation du secret professionnel». «On retrouve la phraséologie de la pétition dans la plupart d’entre elles», relève Me Burgot. La chambre disciplinaire de première instance devrait examiner l’affaire d’ici à la fin de l’année. Elle peut, le cas échéant, prononcer des sanctions allant du simple avertissement à la radiation.

Enthousiasme collectif

Le livre du Dr Dubec lui a valu, ainsi qu’à l’éditeur, une condamnation insolite devant le tribunal correctionnel de Paris pour «injures à caractère racial». Il était poursuivi par Maurice Joffo, jadis expertisé par le psychiatre puis condamné à de la prison ferme pour recel, et qui s’était senti mis en cause dans l’ouvrage en raison de sa judéité. Le fait que Dubec partage la même confession – il n’en fait pas mystère au fil des pages – n’a pas joué en sa faveur. Quoi qu’il en soit, explique Me Burgot, M. Joffo grossit la cohorte des plaignants du Conseil de l’ordre, au côté du père d’une victime de Guy Georges, alors que l’expert a livré sur celui-ci, aux assises, une déposition accablante, et le terroriste Carlos, également expertisé par l’auteur. L’avocate de Carlos, Me Isabelle Coutant-Peyre, confie d’ailleurs au Figaro que son attention a été attirée sur Le Plaisir de tuer par «une de (ses) clientes… Brigitte B.».

«Il est trop facile de poursuivre un médecin sans raison valable», estime Me Burgot. Un sentiment que partage le professeur Claude-François Degos, président du conseil départemental de l’ordre : «On dit que nous sommes protégés à l’extrême, mais c’est faux», confirme-t-il. La preuve est faite qu’une dénonciation, même fantaisiste, peut susciter un certain enthousiasme collectif. Surtout si elle est véhiculée par Internet, instrument rêvé pour la contagion de ce qui peut s’apparenter à un délire.

CLICANOO.COM |En décembre 2006, Souma Soumaïla avait tué un de ses compagnons de beuverie de quatre coups de couteau. Les jurés l’ont condamné à quinze ans de prison et ont écarté la thèse de la légitime défense soutenue par l’accusé.
Diminuer la taille des caractères Augmenter la taille des caractères Imprimer Envoyer l’article à un ami Vos réactions

2 réactions de lecteurs

S’il a comparu libre, c’est menottes aux poignets que Souma Soumaïla, est ressorti hier soir de la cour d’assises de Saint-Denis. Ce Mahorais de 38 ans a été condamné à quinze ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Saïd Anrifadjati. La peine prononcée avait été requise au préalable par le ministère public. “Cette histoire, c’est une querelle d’ivrogne qui dégénère, avec une réponse disproportionnée de la part de l’accusé”, a résumé l’avocat général François Basset. “Il n’a pas agi comme un type en état de légitime défense”, a-t-il ajouté. Jusque-là encore floue, la raison pour laquelle cette journée du 20 décembre 2006 s’est terminée aussi tragiquement a laborieusement émergé au fil de l’audience. Tout a commencé dans l’après-midi. Souma Soumaïla avait décidé de sortir en compagnie de sa concubine et de ses enfants afin que ces derniers puissent “prendre un peu l’air”. Ils se rendent au supermarché La Centrale à Saint-André, et achètent un poulet grillé dans un commerce situé à proximité. Sur le parking de la grande surface, Souma Soumaïla donne quelques morceaux à ses enfants et, seul, il va rejoindre des membres de la communauté mahoraise. Il s’invite dans le groupe qu’il a l’habitude de fréquenter et envisage de célébrer la fête Kaf avec eux. Il marque sa participation en donnant 15 euros à un ami pour acheter du vin. Ce dernier revient avec huit litres de boisson. Tout le monde boit jusqu’à plus soif. L’ambiance dégénère quand Saïd Anrifadjati, dit Binot, “cherche des embrouilles”. “Il a renversé le vin et quelqu’un de la bande lui a fait une réflexion. J’en ai fait une aussi. Il m’a insulté et on a commencé à se battre”, relate Souma Soumaïla.

“Je voulais lui faire peur”

Puis les choses accélèrent. Au cours de la bagarre, Saïd Anrifadjati, très imbibé, tombe. “En se relevant, il a ramassé une chopine de bière et a fait comme s’il allait l’envoyer sur moi. Je me suis baissé pour l’esquiver et quand j’ai relevé la tête, j’ai vu qu’il ne l’avait pas lancée. Ensuite, il l’a fracassée sur ma tête, derrière mon oreille”. Des explications corroborées par le médecin qui a examiné l’accusé : la plaie était profonde de 3 cm. Sonné, Souma Soumaïla s’empare du couteau dont il s’était servi pour manger le reste du poulet et menace son adversaire. “Je voulais lui faire peur. Je n’avais pas l’intention de le tuer. Mais il n’était pas du tout impressionné et a continué d’avancer vers moi en brandissant le tesson”, affirme le mis en cause. “Vous aviez l’occasion de partir, de fuir, pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?”, lui demande le président Michel Carrue. “Je n’avais pas l’idée de faire cela, j’étais énervé et j’avais peur”, rétorque-t-il avant de mimer les gestes qui ont conduit à la mort du malheureux. “Comme il venait sur moi, j’ai pris le couteau et je l’ai piqué une première fois au niveau de la poitrine. Il a continué à avancer. Je l’ai frappé une deuxième fois, je l’ai poussé et poignardé à nouveau dans le dos”, explique Souma Soumaïla qui dit avoir arrêté seulement lorsque sa fille et sa concubine lui ont intimé de le faire. Mais le mal est fait. Un des coups, quatre ont été relevés, a provoqué de graves lésions : l’arme, introduite jusqu’à la garde, a perforé un poumon et l’oreillette droite du cœur, altérant par là même, l’activité cardiaque.

Un sujet immature et anti-social

Rapidement prise en charge, la victime, décédera une demi-heure plus tard. Elle n’avait aucune chance de s’en sortir. “J’étais pas venu là pour batailler, j’étais avec ma femme et mes enfants. C’est lui qui, après m’avoir frappé, aurait dû prendre pitié et partir”, lance-t-il de sa voix grave. Des propos qui tendent à refléter l’expertise du psychologue. “Il se victimise et présente peu de culpabilité sur les faits. Il dénie toute gravité”. Pour l’expert psychiatre, Souma Soumaïla est un sujet immature, impulsif et de personnalité anti-sociale. En témoigne son casier judiciaire plutôt fourni : l’homme a déjà cinq condamnations à son actif. Au moment des faits, il sortait tout juste de prison. “Ses capacités d’adaptations sont très limitées. Il reste dangereux sur le plan social”, souligne l’enquêteur de personnalité. Un aspect repris par Me Rémi Boniface, représentant des parties civiles, dans sa plaidoirie. Selon l’avocat, la thèse de l’accident est inadmissible. “Rien ne peut justifier son acte criminel. Ce n’est ni une histoire de fatalité, ni la faute des autres mais bien la sienne. C’est lui qui a décidé de prendre le couteau. L’intention précède donc bel et bien l’action”. Du côté de la défense, Me Léopoldine Settama a tenté de démontrer que son client était en état de légitime défense et que ses actes sont intervenus en réponse à la menace qu’il sentait venir : la victime brandissait la chopine de bière et Souma Soumaïla n’a pas pu réagir autrement qu’en le frappant, pour se défendre. Une thèse qui n’aura pas convaincu les jurés

M.N

– Aujourd’hui et demain Le procès devrait se dérouler à huis clos car la victime était âgée de 11 ans à l’époque des faits. À la Plaine des Palmistes, courant 2003, J.G. est confondu pour un viol commis sur sa propre fille.

Roxanna Saberi