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Les avocats, les magistrats et les fonctionnaires de justice ont adopté une motion commune, réclamant notamment : “le détachement de 10 fonctionnaires de la Cour d’appel de Fort de France” au TGI de Cayenne et “à moyen terme” le recrutement de 20 fonctionnaires.

Les fonctionnaires de justice de Guyane seront à leur tour en grève vendredi a confirmé jeudi 12 mars un greffier du tribunal de grande instance (TGI) de Cayenne.
Les avocats, pour leur part, entameront vendredi leur 12ème jour de grève.
Mercredi, les avocats, des magistrats et les fonctionnaires de justice ont adopté une motion commune, réclamant notamment : ” à très court terme, le détachement de 10 fonctionnaires de la Cour d’appel de Fort de France” au TGI de Cayenne et “à moyen terme” le recrutement de 20 fonctionnaires dont “10 greffiers” ainsi que la “réactivation du projet de cité judiciaire et le rétablissement de la Cour d’appel à Cayenne”.

“C’était prévu avant la grève”

“Nous n’avons pas attendu la grève pour alerter la Chancellerie” a déclaré, Hervé Expert, 1er président de la Cour d’appel de Fort de France, l’un des deux chefs de Cour actuellement présents à Cayenne. “Mais nous ne sommes pas dans une négociation salariale du secteur privé où le directeur à la maîtrise. L’envoi de fonctionnaires supplémentaires passe par des commissions de nomination.”
“C’était prévu avant la grève : trois greffiers sont arrivés le 2 mars. 56 mois de vacataires ont été accordés. Trois greffiers arriveront en mai. Le fait nouveau, c’est que l’on va détacher, dès la semaine prochaine, un fonctionnaire de justice de Fort de France” a-t-il poursuivi
“Le problème, c’est que ces personnes ne compensent que l’absence de dix fonctionnaires perdus à Cayenne, y compris pour maladies graves, depuis fin 2008” a admis Hervé Expert.

“On ne répond à aucune des revendications”

“On est tous d’accord sur une partie du constat : le problème des effectifs, la dégradation des bâtiments. On est en train de définir les modalités pour y répondre” a-t-il ajouté
“On ne répond à aucune des revendications de la grève” estime au contraire l’avocate guyanaise Magali Robo. “Quand il manque quelqu’un, on change un fonctionnaire de service, on déshabille Pierre pour habiller Paul. Il y a trop peu de greffiers. On nous annonce des vacataires qu’il faudra former, on bricole depuis des années” a-t-elle ajouté.
Le TGI de Cayenne compte actuellement 16 magistrats et moins de 40 fonctionnaires contre 34 magistrats et 79 fonctionnaires au TGI de Fort de France. En 2008, il y a eu 745 comparutions immédiates à Cayenne, un chiffre supérieur à celui tribunal de Grasse dans les Alpes maritimes : 730 et très supérieur à celui de Fort de France : 480.

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Le député UMP des Hauts-de-Seine, présenté comme un proche de Nicolas Sarkozy, et qui était poursuivi dans une affaire de favoritisme, a également écopé de 4 ans d’inéligibilité et de 20.000 euros d’amende.
Le député UMP des Hauts-de-Seine et ancien maire d’Asnières-sur-Seine Manuel Aeschlimann a été condamné vendredi 13 mars par le tribunal de Nanterre à 18 mois de prison avec sursis, 4 ans d’inéligibilité et 20.000 euros d’amende pour favoritisme dans l’attribution d’un marché public en 1998.
La 15e chambre correctionnelle est allée plus loin que les réquisitions du parquet, qui avait demandé un an de prison avec sursis, 20.000 euros d’amende et l’inéligibilité pour l’ancien maire (1999-2008), âgé de 44 ans.

Aeschlimann fera appel

Manuel Aeschlimann, absent à la lecture du jugement, tout comme ses trois coprévenus, a annoncé qu’il ferait appel de sa condamnation, qu’il trouve “extrêmement injuste”.
Le tribunal a également condamné à 15 mois de prison avec sursis et 10.000 euros d’amende le chef d’entreprise Dominique Carbonnier pour recel de favoritisme.
Le prédécesseur de Manuel Aeschlimann à la mairie d’Asnières, Frantz Taittinger, écope de 8 mois de prison avec sursis et 10.000 euros d’amende pour favoritisme, tandis que l’ex-directrice de la communication de la Ville, Fabienne Van Aal, est condamnée à 3 mois de prison avec sursis pour complicité.

Adjoint de Taittinger

Manuel Aeschlimann, premier adjoint au maire RPR Frantz Taittinger à l’époque des faits, était accusé d’avoir imposé le choix de la société CDA Production, gérée par Dominique Carbonnier, pour organiser un festival du folklore sans passer par une mise en concurrence.
La trésorerie municipale d’Asnières, qui s’en était inquiétée, avait refusé de payer la facture, et le contrat d’environ 200.000 euros avait été rejeté par la préfecture des Hauts-de-Seine pour non-conformité au code des marchés publics.
Mais la mairie RPR avait persisté à confier le marché à CDA Production, en passant par une association paramunicipale (Asnières Communication), dirigée par Fabienne Van Aal.
Asnières Communication avait finalement reçu une “subvention exceptionnelle” de 200.000 euros pour régler la facture. L’année suivante, en 1999, Manuel Aeschlimann était devenu maire d’Asnières.

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Le tribunal de grande instance de Nanterre va rendre son jugement vendredi dans l’affaire de favoritisme pour laquelle est poursuivi le député UMP des Hauts-de-Seine et ancien maire d’Asnières-sur-Seine (1999-2008) Manuel Aeschlimann, apprend-on jeudi 12 mars.
Au cours du procès, fin janvier, le parquet de Nanterre avait requis un an de prison avec sursis, 20.000 euros d’amende et une peine automatique d’inéligibilité contre l’ancien maire, jugé pour favoritisme dans l’attribution d’un marché en 1998.
Des peines de prison et des amendes avaient également été requises à l’encontre de son prédécesseur Frantz Taittinger (huit mois et 10.000 euros), du chef d’entreprise Dominique Carbonnier, poursuivi pour recel (un an et 20.000 euros) et de l’ex-directrice de la Communication de la ville, Fabienne Van Aal, poursuivie pour complicité (six mois et 5.000 euros).
Manuel Aeschlimann, premier adjoint au maire RPR Frantz Taittinger au moment des faits, est accusé d’avoir imposé le choix de la société CDA Production, gérée par Dominique Carbonnier, pour organiser un festival du folklore, sans passer par une mise en concurrence.

Non-conformité au code des marchés publics

La trésorerie municipale d’Asnières, qui s’en était alertée, avait refusé de payer la facture, et le contrat d’environ 200.000 euros avait été rejeté par la préfecture des Hauts-de-Seine pour non-conformité au code des marchés publics.
Mais la mairie RPR avait continué à confier le marché à CDA Production, en passant par une association paramunicipale (Asnières Communication), dirigée par Fabienne Van Aal.
Asnières Communication avait finalement reçu une “subvention exceptionnelle” de 200.000 euros pour régler la facture. L’année suivante, en 1999, Manuel Aeschlimann était devenu maire d’Asnières.
Le jugement sera prononcé à 13H30 par la 15e chambre correctionnelle du tribunal.
Selon la procureure Marie-Aimée Gaspari, l’affaire est un “cas d’école”, qui “recèle tout ce qu’il y a d’irrégularités en matière de marché public”.

Un proche de Nicolas Sarkozy

Manuel Aeschlimann a longtemps été présenté comme un proche de Nicolas Sarkozy. Il a notamment été conseiller de l’ancien ministre de l’Intérieur à la direction de l’UMP. Le jugement survient moins d’un an après sa défaite aux élections municipales à Asnières, face à une coalition de candidats PS, MoDem et divers droite. La nouvelle municipalité, qui s’est constituée partie civile, a réclamé 106.000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice matériel, constitué selon elle par des surfacturations, et 50.000 euros de préjudice moral.
L’avocat de Manuel Aeschlimann, Me Olivier Metzner, a plaidé la relaxe a s’est élevé contre l’idée d’une peine d’inéligibilité, demandant “pourquoi il appartiendrait aux magistrats du siège de venir s’immiscer dans la désignation démocratique des élus?”.

France 2
Cette semaine, France 2 diffuse en feuilleton un procès d’assises, qui se tient à Lyon, dans son journal de 13 heures. : France 2
La loi l’interdit, mais les exceptions sont de plus en plus nombreuses. Cette semaine,France 2 diffuse un reportage sur un procès d’assises tourné à Lyon.
Le déballage des pièces à conviction, le témoignage de la famille de la victime, la réunion des jurés juste avant le délibéré, l’accusé dans son « sas d’attente », poignets menottés… Habituellement, il n’est pas possible de voir ou d’entendre toutes ces étapes d’un procès d’assises. Depuis l’affaire Dominici, une loi de 1954 interdit les enregistrements audiovisuels, afin de préserver la sérénité des débats. La loi Badinter de 1985 a assoupli le principe en les autorisant pour les procès qui présentent un intérêt historique – comme celui de Maurice Papon, ou, actuellement, celui d’AZF à Toulouse.

Une approche pédagogique

Benoît Gadrey, correspondant pour France 2 à Lyon, a pourtant obtenu le droit de filmer, jusqu’au verdict, le procès de Jean-Marie Garcia, jugé pour meurtre en janvier. Cette semaine, la chaîne diffuse ce reportage en feuilleton dans son journal de 13 heures. Un cas de moins en moins isolé. De la série documentaire télévisée, Justice en France, de Daniel Karlin, diffusée au début des années 90, au film de Raymond Depardon, 10e chambre, des caméras se faufilent de plus en plus souvent dans les prétoires.

Justice spectacle

Les autorisations sont laissées à la discrétion des présidents de cour ou tribunal, sans forcément requérir l’aval de la Chancellerie. « Le président de la cour d’assises de Rhône-Alpes et le procureur m’ont dit oui très rapidement, témoigne Benoît Gadrey. À condition que j’obtienne l’accord de toutes les parties. Mon approche, volontairement pédagogique, a dû leur plaire. Ils n’ont même pas demandé à voir le résultat. »

Selon un sondage Ifop de mai 2008, commandé par le Conseil supérieur de la magistrature, 37 % des Français ne font « pas confiance » à la justice. Le CSM a suggéré, dans la foulée, un accès plus ouvert des micros et caméras aux salles d’audience, pour familiariser le public avec les rouages du système judiciaire. Mais pas à n’importe quelles conditions. Une commission, menée par la première présidente de la cour d’appel d’Angers, Élisabeth Linden, avait préconisé, en 2005, d’attendre le jugement définitif avant de diffuser et de proscrire les gros plans.

Le rapport est resté lettre morte. Aucun projet de loi n’est à l’ordre du jour, même si les demandes se font de plus en plus pressantes. Le ministère se contente de tolérer les libertés prises ponctuellement avec la loi, au nom de la « transparence de la justice ». « La seule limite reste l’enregistrement des délibérés en assises. Cela pourrait vraiment fausser le jugement des jurés », précise le porte-parole, Didier Guillaume.

Toutefois, avocats et magistrats ne crient pas tous de joie face à l’intrusion des caméras. « Nous restons assez réservés, témoigne Henri Ody, secrétaire national de l’Union syndicale des magistrats et président de chambre à la cour d’appel de Caen. Nous ne voulons pas d’une justice spectacle comme cela peut se voir aux États-Unis. Il ne faudrait pas non plus ne montrer que des bouts de procès, afin de respecter l’équilibre des parties. » En somme, pas d’extrait quotidien dans le journal télévisé, mais peut-être plus de documentaires…

Florence LE MÉHAUTÉ.

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Le journaliste Mountazer al-Zaïdi était poursuivi pour avoir lancé ses chaussures au visage de George W. Bush.
Le journaliste irakien qui avait lancé ses chaussures sur George W. Bush, a été condamné jeudi 12 mars à trois ans de prison par la Cour criminelle centrale d’Irak.
Inconnu jusqu’alors, le journaliste avait lancé ses chaussures en pleine conférence de presse, le 14 décembre, en direction de l’ancien président américain George W. Bush et du Premier ministre irakien Nouri al-Maliki.

Manqué

Il s’était levé et avait crié au président américain qui effectuait une dernière visite en Irak : “C’est le baiser de l’adieu, espèce de chien”, avant de lui lancer ses chaussures. Celles ci n’avaient pas atteint leur cible.
Le procès de Mountazer al-Zaïdi a repris jeudi à Bagdad après trois semaines d’interruption. Le procès avait été ajourné en raison d’un débat sur la nature de la visite de Bush en Irak. La défense du journaliste voulait prouver que George W. Bush effectuait une visite surprise et non “une visite officielle” et ainsi invalider les chefs de poursuite. En ouvrant la séance, le juge Abdel Amir al-Roubaie a annoncé que l’ancien président américain avait bien effectué une “visite officielle” selon les informations qui lui ont été transmises par le gouvernement irakien.

“Ma réaction était naturelle”

Le journaliste de 30 ans avait plaidé non coupable à la reprise de son procès dans la matinée. “Oui, ma réaction était naturelle, comme celle de n’importe quel Irakien”, a-t-il répondu au juge qui lui demandait s’il était innocent. Son avocat a annoncé qu’il ferait appel de cette condamnation.
Mountazer al-Zaïdi a été reconu coupable d'”agression contre un chef d’Etat étranger lors d’une visite officielle”. Il était détenu depuis la mi-décembre dans une prison de la “zone verte”, le secteur ultra-protégé de Bagdad. Le journaliste, qui travaille pour Al-Baghdadiya, une chaîne irakienne basée au Caire, risquait jusqu’à 15 ans de prison.
Environ 200 personnes assistaient au procès.

Traduire George W. Bush en justice

Le 19 février, Mountazer Zaïdi avait justifié son acte par l’extrême émotion qu’il avait ressentie face “au responsable des crimes commis en Irak”. “Il est le plus grand responsable des meurtres commis contre mon peuple et j’ai donc modestement voulu faire quelque chose pour les victimes”, avait-il dit.
“Il parlait des victoires et des réussites (américaines) en Irak mais moi ce que je vois en matière de réussite, c’est un million de martyrs, le sang versé, les mosquées perquisitionnées, les Irakiennes violées, les Irakiens humiliés”, avait-il dit.
Le journaliste a assuré avoir été “battu et torturé à l’électricité après l’incident par un général”.
Ses frères ont indiqué qu’ils tenteraient de faire traduire en justice George W. Bush, Nouri al-Maliki et ses gardes du corps pour “torture” devant une cour belge ou espagnole.

Débrayages et préavis de grève se multiplient contre le manque de personnel et les locaux en piteux état de l’institution judiciaire guyanaise

Dans les couloirs du tribunal de Cayenne, un juge pour enfants glisse, un rien désabusé : « 99 % des enfants signalés que je reçois sont étrangers : Brésiliens, Guyaniens, Surinamiens, Haïtiens… La plupart vivent avec une mère seule sans papiers. Une partie ne mange pas tous les jours. » En cette période d’épidémie de dengue, à l’image de ce département-région où 25 % de la population vit sous le seuil de pauvreté selon l’Insee, l’institution judiciaire de Guyane ne se porte pas bien.

« Le tribunal de Cayenne est une caricature de la misère de la justice », assène, de son côté, le procureur de la République, François Schneider. Locaux exigus, matériel en piteux état, manque de personnel… Au palais de justice, les jardins n’ont pas été tondus depuis des mois. Dans la salle du tribunal correctionnel, le micro à la barre a rendu l’âme. Les témoins ou prévenus y sont inaudibles pour le public. Dans certains bureaux, des murs moisissent à cause de l’humidité.

« Dès qu’il pleut, l’eau s’infiltre dans les câblages du serveur informatique du tribunal et ça tombe en panne », explique, de son côté, un magistrat du siège. « Il n’y a pas de DVD pour enregistrer les auditions comme le stipule la loi. Il n’y a plus de recommandés pour convoquer les gens », déplore-t-on aussi dans un cabinet d’instruction. « Même pour avoir des chemises cartonnées, il faut l’accord de Fort-de-France et ça traîne », fustige un greffier.

Le seul tribunal de France à avoir sa Cour d’appel à 1.800 km
Le chef-lieu de la Martinique administre le tribunal de Cayenne qui n’héberge qu’une chambre détachée de la Cour d’appel de Fort-de-France avec un substitut général, quatre magistrats et… deux greffiers. « On souffre énormément d’être le seul tribunal de France à avoir sa Cour d’appel à 1.800 km, c’est plus que la distance Paris-Varsovie », maugrée, lunettes rondes et voix grave, le juge Stéphane Rémy, du syndicat de la magistrature, qui découvre parfois « une grande flaque d’eau en entrant dans (son) bureau » où le téléphone « ne fonctionne plus depuis plusieurs jours ».

En outre, le TGI de Cayenne n’a plus de président depuis juillet. Son remplaçant est attendu fin mars. Et pourtant la justice ne chôme pas : « Nous avons entre 70 et 90 meurtres à l’année, c’est plus qu’à Paris intra-muros », assure le procureur. Au total, en 2008, le tribunal de Cayenne a reçu 29.157 plaintes et jugé 745 personnes en comparution immédiate. « La chancellerie considère que chaque magistrat doit traiter 1.100 affaires poursuivables par an. On en est à 4 800 par magistrat du parquet à Cayenne », ajoute-t-il.

Pour sa part, l’avocat guyanais José Lama déplore « l’impossibilité d’avoir la copie des pièces d’une instruction en cours. Cela impose des allers-retours constants entre mon cabinet et le tribunal ». Un magistrat confirme. Et il y a les parents pauvres : « Au civil, il faut près de 15 mois pour amener à l’audience une affaire familiale », affirme le juge Stéphane Rémy. Un délibéré aux prud’hommes est tombé « trois ans et demi après l’audience », ironise un autre magistrat. Enfin, les immigrés représentant près de 30 % de la population selon l’Insee, « la plupart des procès et des auditions demandent des interprètes, ce qui augmente la durée des affaires », indique encore un greffier.

Résultat ? « Les gens sont débordés et épuisés », confie un agent du tribunal de grande instance. « Il nous manque de 10 à 15 fonctionnaires », estime François Schneider. En particulier, de l’avis de tous, « une dizaine de greffiers ». Un audit des chefs de cour de mai 2008 a admis que ce manque d’effectifs est « le problème central ».

«On est tout le temps sous pression, il peut y avoir des ratés»
Dans ce contexte, « on est tout le temps sous pression et il peut y avoir des ratés », admet Stéphane Rémy. Un exemple ? En 2007, un Guyanais est poursuivi pour avoir transmis, volontairement, le virus du sida à 4 mineures. Sur l’ordonnance de renvoi en correctionnelle, la quatrième victime est «oubliée». Au procès, sa constitution de partie civile sera jugée irrecevable.

Un autre exemple ? À la fin de l’année dernière, une affaire de trafic de faux papiers impliquant un policier et des agents de la préfecture aboutit à une ordonnance qui renvoie 15 personnes en correctionnelle après plus de cinq ans d’instruction et deux juges chargés successivement du dossier. Selon l’ordonnance, quatre autres mis en examen, dont un fonctionnaire de la préfecture pour corruption passive, ont bénéficié d’un non-lieu au motif que des pièces de procédure les concernant ont disparu.

« Ce n’est pas forcément une malveillance, prévient le procureur. Je pense que c’est lié à l’état du tribunal. Les dossiers traînent. Il n’y a pas de véritable circuit, rien n’est vraiment sécurisé, on pose les choses à droite et à gauche. » De fait, au cour de l’instruction de cette affaire, des écoutes téléphoniques qui s’étaient volatilisées ont été retrouvées dans la pièce des scellés…

Les archives moisissent dans l’ancienne prison de Cayenne
Au final, il ne se passe pas un jour sans que la justice ne soit soumise à d’autres aberrations. En 2008, un présumé faux en écriture constituant l’un des chefs de mise en examen d’un ex-maire guyanais et actuel conseiller général – la modification, sans délibération du conseil municipal, du budget primitif de sa commune à hauteur de 215 000 € supplémentaires – est évoqué dans le réquisitoire définitif du parquet mais oublié dans ses conclusions. Le 9 juin 2008, dans son ordonnance de renvoi en correctionnelle, la juge d’instruction chargée de l’affaire fait un copié-collé du réquisitoire sans relever l’oubli. Comment en est-on arrivé là ? La magistrate avait dû travailler sans greffier de juin à décembre dernier…

En janvier dernier, il y a eu aussi l’affaire de ce Brésilien clandestin, soupçonné d’avoir décapité au sabre un homme sur un site d’orpaillage illégal en août 2005, qui a dû être remis en liberté après 37 mois de détention provisoire, sans avoir encore été jugé : deux ans après son renvoi devant la cour d’assises, le 9 janvier 2007, il avait atteint la durée maximale d’incarcération. « Nous avions 79 dossiers d’assises en retard au 31 décembre 2008, ce dossier n’a pas été considéré comme une priorité », justifie le substitut général Jean-Paul Arnoux.

Sans compter les crimes restés sans réponse judiciaire. Entre le 1er janvier 2003 et le 15 mai 2008 : «75 homicides ou tentatives, liés à l’orpaillage clandestin, n’ont pas été élucidés», reconnaît le parquet. Et il ne s’agit que des faits portés à la connaissance des gendarmes. La justice guyanaise encourt même le risque de l’oubli : faute de place dans les locaux du tribunal, ses archives moisissent dans des cartons abîmés de l’ancienne prison désaffectée de Cayenne.

Frédéric FARINE à Cayenne, en Guyane

Fenua – Viols, viol aggravé, tentative de viol, agressions sexuelles… les jurés de la cour d’assises auront à juger six dossiers criminels d’ici le 19 mars prochain, exclusivement des affaires de moeurs. Mardi et vendredi, deux adultes devront répondre de viols et agressions sexuelles sur mineur de 15 ans. Des affaires qui devraient être jugées à huis clos, tous les procès de cette session étant susceptibles d’être frappés du sceau de la confidentialité.

En trois points

* La session du premier trimestre 2009 de la cour d’assises s’ouvre ce matin au palais de justice de Papeete avec la traditionnelle journée d’information aux jurés tirés au sort.
* La première affaire sera évoquée dès demain. Des viols et agressions sexuelles sur mineurs.
* Six affaires de moeurs, dont celle des agresseurs présumés de la jeune joggeuse sur la route du Belvédère, à Pirae, en février 2007

Mercredi, ce sera au tour d’un jeune homme de s’expliquer devant la cour, renvoyé pour viol aggravé avec usage ou menace d’une arme. Un dossier particulier puisque la victime de l’accusé n’est autre que son ex-concubine, une agression commise sur fond de séparation de couple. Le lendemain, jeudi, les jurés auront face à eux, dans le box des accusés, un homme poursuivi pour viol, là encore. Une agression commise aux Tuamotu dans un contexte particulier également, en décembre 2007. L’accusé s’était en effet introduit chez sa victime la nuit, pour la violer. La malheureuse n’avait pas réagi tout de suite, pensant avoir affaire à son mari qui dormait en réalité dans la pièce d’à côté. La seconde semaine de cette première session de l’année sera consacrée à deux affaires plus singulières, dont l’agression sauvage d’une jeune joggeuse de 23 ans un week-end de février 2007, sur la route du Belvédère à Pirae, affaire qui avait fait couler beaucoup d’encre le temps que les forces de l’ordre interpellent les suspects, après plus de six mois d’enquête.
Un prof de tae kwon do accusé de viol par une élève

Mais tout d’abord, c’est un professeur de tae kwon do bien connu à Papeete qui se trouvera dans le box des accusés lundi prochain. Rémy Ji Siou comparaîtra pour viol et agressions sexuelles sur trois de ses anciennes élèves. L’une d’elles, championne du monde de la spécialité, avait d’abord déposé plainte contre son mentor pour des faits remontant à plus de dix ans. Dans la foulée, deux autres jeunes femmes s’étaient manifestées pour dénoncer des attouchements. Elles seront toutes les trois parties civiles à l’audience. Comme dans chacune des affaires soumises aux jurés dès demain, l’accusé comparaîtra détenu.

Le violeur du Belvédère identifié grâce à son ADN
Pour conclure cette session, l’affaire dite du Belvédère sera jugée sur deux jours, mercredi 18 et jeudi 19 mars. Deux accusés seront dans le box pour tentative de viol en réunion. La tentative de meurtre, retenue pendant l’instruction, a finalement été abandonnée. Ce fait-divers s’était retrouvé à la une de la presse, en février 2007. Et à nouveau six mois plus tard quand la cavale des suspects a brutalement pris fin. L’auteur présumé de l’agression, ayant de plus en plus de mal à vivre avec la pression des gendarmes sur le dos, s’était dénoncé auprès de proches qui avaient eux-mêmes prévenu les autorités. Dans la foulée, son complice présumé était lui aussi interpellé. L’accusé principal avait surgi de nulle part le jour du drame, entraînant sa victime dans les fourrés avec la ferme intention de la violer. La jeune femme avait perdu connaissance, peut-être frappée à la tête avec une pierre (un des points que les débats devront confirmer à l’audience, Ndlr).

Dans un ultime réflexe de survie, la joggeuse était parvenue à lâcher un cri qui avait alerté un promeneur et mis son agresseur en fuite. Identifié grâce aux prélèvements ADN effectués sur la casquette qu’il avait abandonnée dans sa fuite, le fuyard sera retrouvé des mois plus tard. Son complice présumé, lui, et soupçonné de l’avoir attendu en voiture pendant qu’il commettait son crime. Reste à savoir exactement son rôle dans cette sordide histoire : ignoraitil les intentions de son acolyte ? Où a-t-il au contraire participé à l’élaboration du scénario ?

Raphaël Pierre

*Rappelons que tout accusé bénéficie de la présomption d’innocence et n’est déclaré définitivement coupable qu’après avoir épuisé toutes les voies de recours à sa disposition.

Cet homme de 33 ans était jugé mardi à Paris pour avoir agressé sexuellement quatre jeunes femmes dans le métro parisien.
Amélie GAUTIER –
Il y a du Dr Jekyll et Mr Hyde en lui. Damien (1), comptable de 33 ans à la tête de Mr tout le monde, comparaissait ce mardi 10 mars devant la 23e chambre du tribunal correctionnel de Paris, soupçonné d’agressions sexuelles dans le métro de la capitale entre avril 2008 et janvier 2009. Quatre victimes recensées et un même modus operandi : une main violemment passée sous la jupe à l’issue d’une traque de “prédateur” comme la définit le président du tribunal.

C’est Valérie (1), l’une des deux victimes présentes, qui la raconte avec le plus de précision teintée de virulence. Cette avocate de 33 ans a été agressée à la station Charles-de-Gaulle. Déjà attaquée par le passé, elle redouble, depuis, de vigilance. Aussi, ce 16 septembre 2008, prend-elle soin de ne laisser personne derrière elle dans les couloirs du métro : “Malgré mes précautions, j’ai senti une présence derrière moi dans les escaliers qui mènent à la sortie avenue de Wagram, raconte l’élégante jeune femme aux cheveux raides coupés court. En me retournant, j’ai vu quelqu’un qui m’a rassurée par son allure mais il se cachait”.

Valérie s’arrête, respire profondément puis reprend. “J’ai alors senti deux mains qui me touchaient les fesses et j’ai vu cet homme au visage déformé par un effrayant rictus.” La jeune femme a des trémolos dans la voix. La salle d’audience ne bronche pas. Et puis Valérie se lance dans une description du mal-être qu’elle vit depuis : “Je repense sans arrêt à ce jour-là, j’ai des crises de stress dans les transports, je me mets à courir brusquement dans le métro, je me mets à pleurer pendant mes plaidoiries… ” Elle sanglote, s’excuse et reprend, regardant le tribunal droit dans les yeux : “J’ai un sentiment de haine et de violence. Si quelqu’un tentait de me faire le quart de ce qu’il m’a fait, je ne réponds pas de mes gestes….” A ses côtés, l’autre victime baisse les yeux. Toutes deux ont bénéficié de 10 jours d’ITT.

“J’ai envie de la toucher”

“Je savais à l’époque que mes actes étaient graves mais je ne me rendais pas compte des répercussions psychologiques et physiques qu’ils pouvaient avoir.” Questionné à maintes reprises par le tribunal, le prévenu, qui reconnait tous les faits, n’aura pas d’autres explications que cette phrase. Une longue phrase répétée à l’envie. Petites lunettes, coupe courte, veste noir au col Mao sur chemise blanche, Damien semble se confondre avec la transparence de la vitre de son box. D’une voie basse à peine relevée par le micro qu’il tient fermement de sa main gauche, il dit avoir commencé “ça” depuis ses 16 ans. “Ça”, cette quête éphémère du plaisir, à raison de “5 à 6 fois par an”. “Mais pourquoi faites vous cela ?”, le presse le président. “Je ne sais pas, murmure Damien évoquant un “état second”, une “pulsion”. Je vois une fille qui me plaît, j’ai envie de la toucher, je la suis et si je vois qu’il y a un moment propice….” “Mais pourquoi n’avez-vous pas un comportement normal en n’essayant pas de séduire la personne à la terrasse d’un café ou même via internet ?”, s’interroge le président terminant par une autre question : “pourquoi trouvez-vous plus normal de l’agresser que l’aborder ?”.

L’expertise psychiatrique met en évidence une attitude narcissique accompagnée d’un plaisir à faire du mal aux gens. En concubinage depuis près de 10 ans, Damien bénéficie d’une bonne réputation à son travail, ses collègues le décrivant comme courtois, souriant, drôle même. Sa concubine évoque elle un comportement immature, citant sa passion pour la Playstation. Seul élément marquant dans la vie de ce jeune homme : la perte de sa mère trois ans auparavant avec qui il entretenait, selon les mots de son défenseur, une relation “extrêmement fusionnelle”. A chaque fois que sa mère est évoquée, Damien verse une larme. “A aucun moment il n’a pleuré à l’évocation des victimes”, relève l’une de leurs défenseures. “Je ne pensais pas leur faire du mal ainsi”, martèle encore Damien. Des regrets lancés du bout des lèvres, la voix qui tremble mais pas de larmes. Il ne sera plus tenté par les jeunes filles en jupe dans le métro. Damien est condamné à trois ans de prison, dont deux avec sursis. Il écope également d’une mise à l’épreuve avec obligation de soin et l’interdiction de prendre le métro. Il devra en outre verser 1500 euros pour le préjudice moral.

(1) Les prénoms ont été modifiés

Ahmad O. est condamné à perpétuité pour le meurtre de sa sœur Morsal

La chambre correctionnelle 21 de la cour d’assises de Hamburg a tranché : Ahmad-Sobair O. n’est pas un meurtrier, mais l’exécutant d’un code de l’honneur archaïque. Le jugement prononcé vendredi a donné lieu à une vive agitation dans la salle d’audience du tribunal.

Le procès à l’encontre de cet allemand d’origine afghane de 24 ans, ouvert le 16 décembre, s’est clôturé dramatiquement hier. Un accès de fureur de l’accusé – O. n’était apparemment pas préparé à cette dure condamnation « à perpétuité ». « Fils de pute », rugit-il à l’attention du procureur de la République Boris Bochnick à l’issue de l’audience. « J’encule ta mère ! » ? Le jeune homme a complètement perdu le contrôle, agitant les bras et balançant les documents de son avocat dans la salle, jusqu’à ce qu’il soit finalement maîtrisé par trois officiers de police et emmené.

Ahmad O. devait répondre d’une agression mortelle au couteau sur sa sœur de 16 ans, Morsal. Selon l’accusation, il lui aurait tendu un piège dans un parking du quartier St Georg d’Hamburg le 15 mai de l’année dernière et tuée de 23 coups de couteau. Son motif : il désapprouvait son style de vie libre.
La psychiatre Marianne Röhl, a certifié qu’Ahmad O. présente des troubles majeurs de la personnalité

Au cours des dix jours d’audience du procès, 27 témoins ont été entendus. Après la récusation d’un expert pour cause de suspicion, un autre expert, la psychiatre Marianne Röhl, a certifié qu’Ahmad O. présente des troubles majeurs de la personnalité, entraînant une responsabilité pénale amoindrie.

Lors de son plaidoyer chargé d’émotion, le procureur de la République Bochnick a évoqué la semaine dernière un « meurtre planifié », évoquant pour lui « l’obscurantisme médiéval ». La défense le voyait quant à elle d’un autre œil : d’après l’avocat Hartmut Jacobi, son mandant aurait agi sous le coup de l’émotion et seul un chef d’homicide involontaire devrait par conséquent être retenu contre lui. O. s’est tu pendant tout le procès. À la surprise générale, il a utilisé hier son droit de parole pour avoir le dernier mot : « Je n’avais pas prémédité de la tuer – je suis désolé », assura-t-il avec des sanglots dans la voix.
La chambre correctionnelle ne le croit pas et estime qu’il s’agit d’un « acte planifié infâme et machiavélique qui s’est terminé dans un bain de sang », a déclaré le président Wolfgang Backen lors de ses attendus du jugement de 60 minutes. « L’accusé a tué Morsal par pure intolérance », d’après le juge. Cette jeune fille heureuse de vivre aurait subi un « martyre d’une année » avant de mourir et aurait été battue et menacée par l’accusé, car elle voulait vivre comme ses amies allemandes. « C’était une femme, ce fut là son malheur. » La famille porte également une « grande part de culpabilité morale ». Ses membres ne se sont pas intégrés en Allemagne et vivent plutôt dans une « colonie afghane » selon les « codes de leur pays natal ».
Les membres de la famille pleuraient et criaient. « Vous ne connaissez donc aucune justice »

La défense souhaite se pourvoir en cassation. « Le jugement est défectueux », a déclaré Thomas Bliwier. « Le tribunal n’a pas tenu compte du rapport d’expertise certifié de madame Röhl et a adopté l’opinion d’un expert récusé pour suspicion. Le porte-parole du ministère public, Wilhelm Möllers récuse toutes les critiques. Pour lui, il est tout à fait admis et courant de ne pas tenir compte de rapports d’expertise. Les parents et amis de l’accusé ont été consternés par le verdict et la salle d’audience a été ici et là secouée par une vive agitation. Les membres de la famille pleuraient et criaient. « Vous ne connaissez donc aucune justice » sanglotait la mère d’Ahmad. Son plus jeune frère a dû quitter la salle après avoir tambouriné sur la cloison de séparation en verre de la salle réservée au public avec ses poings.

Dans le public, des cris de joie se sont mêlés aux cris vindicatifs de la famille. « Le verdict est encore trop clément », déclara un retraité qui ne cachait pas son opinion, « Dans un autre pays, il aurait été pendu ». Heidemarie Grobe, porte-parole de « Terre des Femmes », trouve ce genre de « débordements » scandaleux. Elle salue toutefois un verdict « orienté vers l’avenir ». « J’espère que d’autres jeunes femmes auront le courage de mener une vie libre ».

De Susann Witt-Stahl, Hamburg
Traduction Corinne Boutry